Kings'heart tradi-road-movie, episod 2nd :
Liaisons Dangereuses
La Motte-Tilly, paisible village des bords de Seine entre Nogent et Provins, la France profonde à 100 kms de Paris. L' abbé Pierre Mazué (+) est un insoumis, théologien, littéraire, lyrique, tourmenté...je connais peu son passé mais (malgré tout le mal que j'entends dire des intégristes) il m'apparait infiniment sympathique : isolé, souffrant, pathétique. Pâques 1980, je me rends à une première Messe (basse) à Courceroy, qu'il dessert également. Lui proposant de le raccompagner à la Motte en voiture (il fait le trajet à pieds), il m'invite à assister à la Messe chantée dans l'église St Pierre-et-St-Paul de la Motte-Tilly : révélation (ou retrouvailles plutôt d'une messe pratiquée dans mon enfance), simplicité et profondeur de la liturgie (avec les moyens pauvres d'une paroisse rurale), Victimae Pascali Laudes chanté par des voix cristallines. Bref, entièrement conquis (et stupéfait de l'abandon de tels trésors) je vais désormais assister tous les dimanches à cette Messe dominicale. L'abbé est assez peu représentatif de ce que verrais par la suite dans le "tradiland" : c'est un inquiet, anxieux mais dont j'apprécie le sermons musclés, courageux, toniques : quel contraste avec la mélasse gaucharde de tant de paroisses !
Cette année là le Pape Jean-Paul II vient en France (à Lisieux notamment) ,malgré mon projet de m'y rendre je "loupe" (hélas !) ce rendez-vous.
Le 8 décembre je pousse la porte du presbytère : confession générale, accueil d'un tendre père souriant et indulgent.
Mai 81, dans le même mois élection de François III
et attentat contre le Pape à Rome : je revois l'abbé Pierre Mazué, affolé, dans la rue, l'oreille collée à son transistor, il est catastrophé...
Cette fin d'année 81 va marquer ma rencontre avec un "sédévacantiste" de mon âge faisant un stage dans la région. Conversations théologiques, encycliques arborées en boucliers, je découvre "Quas primas", le syllabus, le Modernisme et sa condamnation. En même temps je lis beaucoup (trop) d'auteurs mystiques mais rencontre Bernard de Clairvaux, Thérèse d'Avila et les "
Notes Intimes" de Marie Noël, "Lumières" dans mes ténèbres (car côté purgatoire cette quête était assez décapante...)
1983 retraite dans ce milieu sédé, au sud de Paris, prêchée par un abbé aujourd'hui "recyclé" et fécond producteur d'analyses politico-théologiques... je deviens prosélyte , abandonne un appel (?) à la vie consacrée (impossible car plus de "bonne Messe" "ordres contemplatifs pourris ou infiltrés"... L'abbé Mazué, fidèle au Pape me met en garde contre le sédévacantisme et le Père Barbara qui traverse l'Atlantique pour convertir les évêques à sa thèse : il n'y a plus de Pape, un imposteur hérétique et schismatique occupe la chaire de Pierre.
1986 : converti moi-même, j'abandonne alors un cadre de vie superbe, un boulot intéressant (avec logement de fonction), mes amis, ma famille champenoise pour rejoindre, en Touraine, l'abbé Z ( diacre viré d'Ecône, puis de la "chapelle" constituée à Tours par le Père Noël Barbara : nous sommes "Forts dans la Foi". Des prêtres décédés aujourd'hui (abbés Saffré et Delmasure ) viennent régulièrement de...Nice (!) ou de Mayenne pour assurer la Messe et les confessions. Années humainement difficiles (j'ai un poste crevant de brancardier en clinique privée). Entièrement donné à "l'oeuvre" pie de l'abbé Z , je découvre, avec la jeune fille qui va devenir ma femme (les chorales ont du bon !) que les "têtes intellos" au service du Père Barbara membres de l' ICP (Institut Cardinal Pie) tirent les ficelles sans srucupules, manipulant des laïcs mariés "aux ordres" pour telle ou telle "haute" mission. Confusion spirituel-temporel, ce petit monde vivant dans le désordre (aux crochets de bienfaiteurs !) rêve de renverser tout simplement le pouvoir politique en place pour installer une...théocratie : gare aux traîtres
Certains d'entre eux mettent les choses au clair, racontent les méthodes sectaires du groupuscule et désertent l'esquif <: mal en point !
Fin 88 (je suis alors fiancé) j'assiste à l'éclatement du groupuscule : l'abbé Z, électron libre sans directeur, sans contrôle hiérarchique a créé sa petite église : la plupart des fidèles (chargés de famille et confrontés aux réalités bassement terrestres de l'éducation des enfants) rejoignent, à Tours, la chapelle des Minimes, desservie par les prêtres de la FSSPX. 1988, année où Mgr Lefebvre vient de sacrer quatre évêques, aujourd'hui célèbres...
Suite au prochain épisode : tradis ralliés
et tradis brut de décoffrage !