Liturgie du jour avec Etienne Lorant (2009-2010)

[etienne lorant]

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 16,19-31.
Jésus disait cette parabole : « Il y avait un homme riche, qui portait des vêtements de luxe et faisait chaque jour des festins somptueux.
Un pauvre, nommé Lazare, était couché devant le portail, couvert de plaies.
Il aurait bien voulu se rassasier de ce qui tombait de la table du riche ; mais c'étaient plutôt les chiens qui venaient lécher ses plaies.
Or le pauvre mourut, et les anges l'emportèrent auprès d'Abraham. Le riche mourut aussi, et on l'enterra.
Au séjour des morts, il était en proie à la torture ; il leva les yeux et vit de loin Abraham avec Lazare tout près de lui.
Alors il cria : 'Abraham, mon père, prends pitié de moi et envoie Lazare tremper dans l'eau le bout de son doigt pour me rafraîchir la langue, car je souffre terriblement dans cette fournaise. -
Mon enfant, répondit Abraham, rappelle-toi : Tu as reçu le bonheur pendant ta vie, et Lazare, le malheur. Maintenant il trouve ici la consolation, et toi, c'est ton tour de souffrir.
De plus, un grand abîme a été mis entre vous et nous, pour que ceux qui voudraient aller vers vous ne le puissent pas, et que, de là-bas non plus, on ne vienne pas vers nous. '
Le riche répliqua : 'Eh bien ! père, je te prie d'envoyer Lazare dans la maison de mon père.
J'ai cinq frères : qu'il les avertisse pour qu'ils ne viennent pas, eux aussi, dans ce lieu de torture ! ’
Abraham lui dit : 'Ils ont Moïse et les Prophètes : qu'ils les écoutent ! ¦
Non, père Abraham, dit le riche, mais si quelqu'un de chez les morts vient les trouver, ils se convertiront. '
Abraham répondit : 'S'ils n'écoutent pas Moïse ni les Prophètes, quelqu'un pourra bien ressusciter d'entre les morts : ils ne seront pas convaincus. ' »

Lorsque Jésus a raconté cette parabole, Il n'était pas encore descendu "aux enfers" et donc, qui pourrait me dire ce qu'il est advenu, finalement, de ce mauvais riche ? Si l'on me dit : "Il est en enfer !", je réponds que je suis étonné: s'il est bien en enfer, comment se fait-il qu'il prie en disant "Abraham, mon père", et que ce dernier lui réponde: "Mon enfant..." Les âmes des damnés gardent-elle des liens avec les âmes des Justes ? Si l'on me cite le grand abîme qui a été mis entre eux, je réponds encore: lorsque je serai au purgatoire, ne serai-je pas dans une flamme moi aussi ? Et n'y aura-t-il pas un "abîme infranchissabe" entre les âmes des saints et la mienne ? Mais n'ai-je pas entendu par ailleurs qu'en certaines fêtes, la Vierge Marie descend au purgatoire pour en retirer de nombreuses âmes pour les mener au Ciel ?

Bref, voici un partage qui n'en est pas un, mais qui pose une question. Cette Parole de Jésus est une des rares qui décrive ce qui se passe pour nous après la mort (il y a également celle qui concerne l'avenir des couples mariés, et quelques lignes ailleurs dont je ne me souviens pas maintenant). Si ces textes sont peu nombreux, il Comment l'interpréter correctement. Si quelqu'un connaît un texte de théologie ou d'un mystique ou d'un Docteur de l'Eglise, merci de me donner de me le faire connaître !

[PaxetBonum]

Peut-être une réponse ici ?

http://www.gratuit-cours.com/livres/bossuet1489.pdf

[gerardh]

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Bonjour,

Le mauvais riche est en enfer, ou plutôt dans la géhenne. Il n'est pas là parce qu'il était riche mais parce qu'il était méchant.


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[coeurderoy]

Commentant hier cet évangile le prêtre signalait que cette séparation n'était pas l'Enfer éternel mais il n'a pas développé ce point (il s'agit d'un jeune prêtre très respectueux de la solennité de la liturgie et appartenant à l'institut Notre-Dame de Vie ) : qu'en disent les docteurs ???

La faute du mauvais riche : il était vide du désir de Dieu et vautré dans l'auto-satisfaction que lui procurait son bien-être illusoire...

[Fée Violine]

Le théologien Arnaud Dumouch pense que le riche est au purgatoire, car il se soucie de ses frères, tandis qu'en enfer on n'aime personne. Il y a quelques années, Arnaud était sur ce point (comme sur beaucoup d'autres) en désaccord avec M. Delaporte du forum Thomas d'Aquin, à l'époque où Arnaud est parti fonder son propre forum.

[Pneumatis]

Bonjour,

Un point important qu'a souligné notre curé durant son homélie, hier : le riche ne s'adresse pas à Dieu. S'étant radicalement coupé de son prochain (Lazare mendiant juste devant sa porte) il s'est tout aussi radicalement coupé de Dieu. A tel point qu'une fois en situation d'expiation, ce n'est même pas vers Dieu qu'il se tourne, mais vers Abraham qui, tout patriarche en alliance avec Dieu qu'il était, était aussi pour les gens de l'époque une figure de l'ordre social : Abraham était symbole de fécondité, de grand peuple, et donc de grande réussite sociale. Le modèle qu'il aurait dû représenter pour ce riche peut très bien avoir été détourné, pour ne plus représenter un modèle d'amour de Dieu, mais un modèle de figure sociale.

Par rapport à l'argument d'Arnaud Dumouch, je peux émettre le même genre de réserve (quoique très néophyte) : replacé dans le contexte (ce n'est qu'une supposition), on peut peut-être se dire que l'attention que porte le riche à ses frères n'est pas vraiment une forme de charité, transposable à Dieu en l'état, mais encore une fois, l'attachement au clan (social), à une identité.

Bref, ce qui me semble déterminant dans cette parabole, c'est l'absence totale de Dieu dans cette histoire. Ce qui s'apparente bien à l'Enfer. Mais comme c'est une parabole, et non pas une histoire réaliste, cela me semble peut-être inopportun de la penser en terme de paradis/enfer/purgatoire. C'est d'autant plus délicat que la tradition juive à l'époque comportait des subtilités qui nous échappent sur la question. Ainsi pensait-on que la "sainteté" d'un fils pouvait justifier le père (compenser ses péchés - le fils étant comme l'oeuvre du père), de même que les péchés d'un parent pouvaient retomber et être expiés par ses enfants (sur l'aveugle né : ce n'est ni lui ni ses parents qui ont péché, etc...). Le tout étant de toute façon antérieur au jugement dernier, lorsque les morts se relèveront. Et parler de mort éternelle avant même la résurrection du Christ, c'est juste anachronique (même si dans l'histoire, la notion de temps est plutôt tordue à utiliser).

Il faudrait que je retrouve mais il y a je crois, dans la tradition juive, un exemple avec Abraham et son père Térach, connu dans la Bible pour être un idolâtre et qui eut pu être sauvé de la géhenne par l'obéissance à Dieu d'Abraham.

Toujours est-il que si rien ne dit dans cet évangile que le riche est en enfer éternel, il ne montre ni espoir pour sortir de là où il est, ni supplication à Dieu (ni même d'allusion). En sorte que, où qu'il soit, cela s'apparente bel et bien à l'Enfer (absence totale d'amour de Dieu) et ça a l'air assez mal barré pour lui d'en sortir.

[Fée Violine]

Il y a ici une réponse toute simple et que je trouve excellente:
http://marthetmarie.lifediscussion.net/ ... .htm#29711

[gerardh]

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Bonjour,

Cette parabole a une dimension allégorique, ce qui peut relativiser certaines transpositions.


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[Cgs]

Bonjour,

Notre prêtre a été sans ambiguité : c'est bien de l'enfer qu'il s'agit concernant cet homme riche. Mais maintenant qu'Etienne a posé la question, j'avoue que je ne sais plus quoi penser. Je demanderai à des dominicains

Bien à vous,

[etienne lorant]

Quand je relis cet Evangile, j'ai toujours l'impression que Jésus parle d'une situation qu'il a vue. Les détails (les chiens qui viennent lécher les plaies de Lazare, le nombre de frères - Jésus inventerait-il ?!?). En faveur de l'option du purgatoire, il est incontournable que ce mauvais riche désire tout de même prévenir ses frères, il s'est rendu compte de cette froideur de coeur, il désire les prévenir: vous devez changer d'attitude.

Je désire être plus charitable moi-même, en tout cas.

[etienne lorant]

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Une discussion s'éleva entre les disciples pour savoir qui était le plus grand parmi eux.
Mais Jésus, connaissant la discussion qui occupait leur pensée, prit un enfant, le plaça à côté de lui
et leur dit : « Celui qui accueille en mon nom cet enfant, c'est moi qu'il accueille. Et celui qui m'accueille accueille aussi celui qui m'a envoyé. Et celui d'entre vous tous qui est le plus petit, c'est celui-là qui est grand. »
Jean, l'un des Douze, dit à Jésus : « Maître, nous avons vu quelqu'un chasser les esprits mauvais en ton nom, et nous avons voulu l'en empêcher, car il n'est pas avec nous pour te suivre. »
Jésus lui répondit : « Ne l'empêchez pas : celui qui n'est pas contre vous est pour vous. »

Pour répondre à cette manifestation de désordre et d'orgueil (on est près de la dispute, lorsqu'une discussion s'élève au sujet des mérites de l'un ou l'autre !), Jésus place un enfant. Et j'ai remarqué ce détail: Il le place à côté de Lui, comme pour le rassurer ou comme pour mieux s'identifier à lui. Jésus avait déjà déclaré ailleurs: "Je suis au milieu de vous comme celui qui sert". Ici, je peux paraphraser en mettant dans la bouche de Jésus: "Je suis au milieu de vous comme cet enfant". Si donc, vous n'avez pas pour ambition de ressembler à cet enfant, comment parvenir à être le plus grand ? Et cet homme, cet inconnu qui a entendu la Parole de Jésus et l'a gardée, et qui en recourant à la seule foi dans le nom de Jésus, s'est mis à chasser les esprits impurs... cet homme-là, qui va seul, animé dans son coeur par l'amour du Maître, n'est-il pas - en cet instant, du moins - le plus grand d'entre eux ? Qu'ont-ils donc à croire que Dieu ne peut pas couvrir de bienfaits et de puissance quiconque a entendu et a cru ?
Cela me rappelle que, plus tard, devant ses disciples, Jésus dira d'un centurion romain, un païen et un ennemi: "Vraiment, en tout Israël, je n'ai vu pareille foi !" Quelle leçon !

[etienne lorant]

Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean 1,47-51.
Lorsque Jésus voit Nathanaël venir à lui, il déclare : « Voici un véritable fils d'Israël, un homme qui ne sait pas mentir. »
Nathanaël lui demande : « Comment me connais-tu ? » Jésus lui répond : « Avant que Philippe te parle, quand tu étais sous le figuier, je t'ai vu. »
Nathanaël lui dit : « Rabbi, c'est toi le Fils de Dieu ! C'est toi le roi d'Israël ! »
Jésus reprend : « Je te dis que je t'ai vu sous le figuier, et c'est pour cela que tu crois ! Tu verras des choses plus grandes encore. »
Et il ajoute : « Amen, amen, je vous le dis : vous verrez les cieux ouverts, avec les anges de Dieu qui montent et descendent au-dessus du Fils de l'homme. »

Si je sors de l'imagerie de l'ange aux grandes ailes et tout lumineux, je retrouve néanmoins les inspirations qui me touchent à certains moments de ma journée, mais aussi la qualité lumineuse de ces intuitions... Aujourd'hui - et déjà hier, il m'est venu à l'esprit plusieurs fois de prier mais avec une sorte de "chanson intérieure", et de prier avec amour et par amour, sans la moindre demande. Or, cette idée m'avait déjà touché une première fois, un matin, vers deux heures, au sortir d'un profond cauchemar dont les péripéties m'échappent mais qui mêlait des images très pénibles concernant la vieillesse et la mort sans amour... Très accablé, après avoir d'abord pris une douche, j'avais recherché un ouvrage spirituel dans ma bibliothèque. J'avais trouvé Maître Eeckhart et ce conseil qui tenait en une courte phrase: : "Il faut cesser de rechercher Dieu pour obtenir des réponses, mais il faut prier Dieu pour Dieu, car Il EST la réponse !"

Je me suis donc mis à prier ainsi et je continue d'évoluer dans des pensées où se mêlent gratuité et reconnaissance. J'ai par exemple songé que le sacrifice d'Abel au Seigneur, qui lui valut la rancune de son frère Caïn, tenait plus d'une somptueuse corbeille de fruits, agencés avec soin, que du simple résultat d'une cueillette sans ordre... La beauté mêlée à la prière, après tout, après cette messe retransmise depuis Solesmes, qui la contredirait !

Le monde, derrière le petit écran de la télé - ou de l'ordinateur, me paraît évoluer de façon de plus en plus chaotique. A l'instant, j'ai de nouveau frémi en voyant passer un groupe de jeunes étudiants, dont chacun avait sa propre musique qui lui hurlait dans les oreilles... j'ai vérifié : pas dans une oreille, non, dans les deux ! Ils ont l'âge des multiples rencontres, et ils s'isolent... n'est-on pas en train de fabriquer un monde de zombies ?

Et finalement, plus je me sens pécheur, plus je me sens l'objet de la Miséricorde divine. Abattu, peut-être, mais de plus en plus confiant dans l'issue finale. "Vous verrez les cieux ouverts", dit Jésus. Eh bien, j'en suis sûr, oui, je les verrai !

[etienne lorant]

"Reste avec nous, car le soir approche, le jour est sur son déclin. Et il entra, pour rester avec eux."

J'ai trouvé ce "petit pain biblique" et, l'heure avançant, le soir commence à descendre déjà plus tôt... Ce mois de septembre a toujours été difficile à passer, mais il l'est plus encore cette année du fait des "mauvais signaux" que je perçois de manière plus aigüe, me semble-t'il... C'est bien sûr un extrait de l'Evangile des disciples d'Emmaüs. Et puisque j'ai foi que rien n'arrive où Dieu ne serait pas, je vais rentrer chez moi confiant que le Seigneur m'y accompagne. Je remarque que le verbe "rester" est cité deux fois dans le passage. A la demande: "Reste avec nous", la réponse est qu'Il entra pour "rester avec eux". Je n'avais jamais songé que cette répétition se retrouve dans l'Apocalypse: "Je prendrai mon repas avec lui, et il prendra son repas avec moi". Je rends donc grâce par avance pour cette soirée - que je m'efforcerai de vivre dans la douceur. Mais est-il possible de se forcer à ressentir de la douceur ? Je vais tout faire pour çà et d'abord prendre une bonne douche chaude et me passer un peu de Mozart..

Bonne soirée à tous et à toutes.

[coeurderoy]

Merci Etienne : bonne, douce et paisible nuit à vous !

[christiane]

Tu sais, Etienne, je vais faire mes courses chaque jour avec "de la musique dans les oreilles" comme tu dis. Je marche ainsi en écoutant les informations, les chansons et je ne suis pas pour autant une zombie car j'entends tout de même tous les bruits extérieurs, heureusement pour ma sécurité. D'autre part, je ne suis pas isolée car le sens de la vue est multiplié. J'aime beaucoup ce contact - radio car je vais en courses très tôt et je rencontre très peu de monde.

Je te souhaite une magnifique journée.

Christiane