L'Office traditionnel pour un laïc ?

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Olivier JC
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L'Office traditionnel pour un laïc ?

Message non lu par Olivier JC » ven. 31 mars 2023, 9:36

Bonjour,

L'utilisation du Bréviaire Romain promulgué par le Bienheureux Jean XXIII en 1962 par un laïc constitue-t-il une participation à la Liturgie de l'Eglise, ou doit-elle être regardée comme une prière privée ?

La Constitution Sacrosanctum Concilium indique que "lorsque cet admirable cantique de louange est accompli selon la règle par les prêtres ou par d’autres, délégués à cela par l’institution de l’Église, ou par les fidèles priant avec le prêtre selon la forme approuvée, alors c’est vraiment la voix de l’Épouse elle-même qui s’adresse à l’Époux", ce qui tendrait à indiquer qu'un laïc récitant individuellement l'Office Divin ne ferait pas une prière liturgique.

Cependant, de manière quelque peu contradictoire, la même Constitution indique : "On recommande aux laïcs eux-mêmes la récitation de l’office divin, soit avec les prêtres, soit lorsqu’ils sont réunis entre eux, voire individuellement".

La contradiction ne peut être levée qu'en considérant que la récitation de l'Office Divin avec les prêtres est une prière liturgique, et que cette même récitation par des laïcs réunis entre eux ou individuellement n'est pas une prière liturgique.

La canon 1174 du Code de Droit Canonique de 1983 semble aller dans ce sens puisqu'il indique : "Les autres fidèles aussi sont vivement invités, selon les circonstances, à participer à la liturgie des heures en tant qu'elle est une action de l'Église".

Concernant le Bréviaire romain de 1962, la Constitution Laudis Canticum en exclut l'utilisation, sauf autorisation de l'Ordinaire, dans un contexte cependant qui ne vise que les clercs, seuls astreints à la récitation de l'Office divin par application du canon 135 du Code de Droit Canonique de 1917 alors applicable.

Quant au Motu Proprio Summorum Pontificum, il ne confère le droit d'utiliser ce Bréviaire qu'aux clercs dans les ordres sacrés. Il convient de noter que cette disposition reste d'actualité puisque le Motu Proprio Traditionis Custodes, contrairement à ce que l'on peut parfois lire, n'abroge pas le texte de Benoît XVI, mais uniquement les normes, instructions, concessions et usages précédents qui lui sont contraires. Or, le texte de François n'évoque pas l'Office Divin.

Il y a donc un parallélisme logique d'un point de vue juridique : Paul VI avait interdit l'utilisation du Bréviaire Romain aux clercs, Benoît XVI revient sur cette interdiction. L'objet est le même : quel livre liturgique un clerc peut-il utiliser pour s'acquitter de son obligation canonique ?

Cela ne dit donc rien s'agissant des laïcs. Si des clercs ont librement le droit d'utiliser le Bréviaire Romain, il faut donc en conclure que celui-ci reste et demeure un livre liturgique approuvé et qu'il est donc permis à un laïc de le réciter.

Pour autant, j'en arrive à la conclusion que la récitation individuelle de l'Office divin par un laïc selon le Bréviaire Romain promulgué par le Bienheureux Jean XXIII en 1962 ne peut être regardée comme expression de la liturgie de l'Eglise. La même conclusion me semble devoir être d'ailleurs retenue s'agissant de Liturgia Horarum...

Il se trouve cependant que j'aimerai arriver à la conclusion inverse... Avez-vous des sources magistérielles indiquant que la récitation individuelle de l'Office divin selon un livre liturgique approuvé est bien une expression de la Liturgie de l'Eglise ?

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Re: L'Office traditionnel pour un laïc ?

Message non lu par Bibracte » ven. 31 mars 2023, 12:20

Bonjour,

Merci pour votre question.

Il apparaît en effet que la question se pose dans les mêmes termes pour l'ancien Bréviaire romain et pour Liturgia Horarum.

A la lecture de Mediator Dei et de Sacrosanctum Concilium, il apparaît que le cas des laïcs se réunissant sans prêtre pour chanter l'Office Divin, voire d'un laïc seul, n'est pas abordé. La citation que vous donnez peut faire penser que les laïcs sans prêtre ni religieux ne sauraient accomplir la prière publique de l'Eglise, mais cela n'est pas dit expressément ; l'inverse demeure possible.

A ce sujet, la Présentation Générale de la Liturgie des Heures, au n° 27, indique que :
Les groupes de laïcs, partout où ils se réunissent, sont également invités à accomplir l'office de l'Église en célébrant une partie de la Liturgie des Heures, quel que soit le motif de leur réunion, prière, apostolat ou autre. Il faut en effet, qu'ils apprennent avant tout à adorer Dieu le Père en esprit et en vérité dans l'action liturgique, et qu'ils se rappellent que, par le culte public et la prière, ils peuvent atteindre tous les hommes et contribuer grandement au salut du monde entier. Il convient enfin que la famille, en tant que sanctuaire domestique de l'Église, ne se contente pas de pratiquer la prière en commun mais aussi qu'elle s'unisse plus étroitement à l'Église en utilisant, suivant ses possibilités, l'une ou l'autre partie de la Liturgie des Heures.
Ceci semble fortement indiquer que la célébration d'un groupe de laïcs (c'est-à-dire au moins deux) est une participation à la liturgie de l'Eglise.
Rien n'est indiqué, en revanche, concernant la récitation de l'office en privé.
Veritas liberabit vos (Jn 8, 32)

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Re: L'Office traditionnel pour un laïc ?

Message non lu par Olivier JC » ven. 31 mars 2023, 14:35

Bonjour,

Je n'avais pas pensé aller voir dans l'IGLH. Il est également indiqué au n° 32 :
"Les autres communautés religieuses, et chacun de leurs sujets, sont invités, selon les conditions de leur vie, à célébrer quelques parties de la Liturgie des heures, qui est la prière de l'Église, et qui donne un seul cœur et une seule âme à ceux qui sont dispersés. On adresse la même exhortation aux laïcs."
Un détour par le latin n'est pas superflu :
"Ceteræ religiosæ Communitates, earumque singuli sodales, monentur ut, pro adiunctis, in quibus versantur, aliquas partes celebrent Liturgiæ Horarum, quæ est Ecclesiæ oratio, omnes ubique dispersos efficiens cor unum et animam unam. Eadem hortatio etiam laicis adhibetur."
Sont donc visés les "membres individuels", étant souligné que ce paragraphe s'inscrit dans la partie de l'IGLH relatif au "mandat de célébrer la Liturgie des heures". Dès lors que c'est la même exhortation qui est faite aux laïcs, cela vise tant les groupes que les individus.

Or, pour que la prière soit liturgique, deux conditions doivent être remplies :
1. Que soient utilisées des formules sanctionnées comme liturgiques par l'Eglise, soit des livres liturgiques approuvés par une autorité légitime à le faire selon le droit ;
2. Que l'Eglise reconnaisse que celui ou ceux qui célèbrent sont habilité à prier en son nom.

Il semble donc, pour ce qui concerne Liturgia Horarum, qu'il s'agisse bien d'une prière liturgique y compris dans le cadre de la récitation individuelle.

Dès lors que ce paragraphe se réfère explicitement à la Constitution Sacrosanctum Concilium (n° 100 : '"On recommande aux laïcs eux-mêmes la récitation de l’office divin, soit avec les prêtres, soit lorsqu’ils sont réunis entre eux, voire individuellement"), il est loisible d'y lire une explicitation autorisée (il ne s'agit plus seulement de participer, mais bien de célébrer) dont il n'y a pas lieu de réduire la portée à la seule Liturgia Horarum : l'invitation qui est faite vaut à mon sens pour l'office divin quel que soit le livre liturgique utilisé, pour autant naturellement qu'il soit approuvé par l'Eglise.

Pour en revenir ensuite à la question du Bréviaire Romain (1962), la Constitution Laudis Canticum oblige à l'utilisation de Liturgia Horarum ainsi qu'il a été dit, l'utilisation du Bréviaire Romain étant réservée à la récitation solitaire et soumise au consentement de l'Ordinaire. Une lecture serrée en regard du latin fait ressortir qu'il s'agit d'une prescription générale et non réservée aux clercs comme il m'avait semblé.
Summorum Pontificum ne concerne pour sa part que les clercs.

Il semble donc, en conclusion, que l'usage du Bréviaire Romain comme livre liturgique soit légitime pour un laïc dès lors qu'il le fait en privé et avec autorisation de l'Evêque.

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