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par LumendeLumine » ven. 06 juil. 2007, 18:40
Cher Veritatis Splendor,
Je ne connais pas bien les idées de Socrates sur la connaissance, mais je suis plutôt d'avis, avec Aristote, qu'on vient au monde tel une table rase, tabula rasa, et que c'est au contact des êtres de l'expérience qu'on acquiert toutes ses notions.
Il me semble en tout cas que Socrate se complique bien trop la vie dans l'argumentaire que vous avez reproduit ici. Pour ce qui est des notions premières, on ne les cherche pas; on les constate immédiatement, dès qu'on ouvre les yeux sur le monde et qu'on fait le moindre effort d'abstraction. La connaissance n'est pas forcément précédée d'une recherche consciente d'un objet précis. On se retrouve placé dans ce monde avec des sens et une intelligence, et entouré d'objets qu'on n'a qu'à voir, toucher, entendre, etc., pour connaître, et en eux les notions premières (être, causalité, finalité). La curiosité naturelle se porte sur tout ce qui s'offre à son regard.
Quant à Dieu, et aux autres objets non expérimentaux mais que l'on peut tout de même connaître, bien sûr il faut les chercher afin de les trouver. Mais peut-on chercher ce qu'on ne connaît pas? Distinguo: avant de connaître Dieu, on ne le connaît pas, en ce qu'il est proprement, en son essence; mais déjà on le connaît vaguement en tant que raison d'être des choses. Si on s'interroge sur Dieu, c'est que les choses crient leur dépendance d'une cause extrinsèque; en entendant les choses crier, on se demande quelle peut bien être cette cause. On sait donc ce qu'on cherche: une cause; mais on ne sait pas de quelle cause il s'agit: Dieu.
Nul besoin donc, de faire appel à un vestige de la notion de Dieu caché quelque part dans notre esprit. Ce sont les choses qui nous y conduisent.
Pour terminer avec Dieu et l'être: supposons qu'un homme naisse enfermé dans une pièce avec seulement de la lumière électrique. Toute la lumière, sur terre, provient ultimement du Soleil, même la lumière électrique (qui n'est que l'énergie du soleil convertie en autre chose puis en lumière encore). Cet homme ne pourra jamais connaître le Soleil, sinon abstraitement; mais peut-on dire pour cela qu'il ne sait pas ce quue c'est que la lumière? Tout ce qu'il a, c'est de la lumière secondaire, mais de la lumière quand même. Il supposera qu'il doit y avoir une lumière première, sans pouvoir voir à quoi elle ressemble, mais il n'en ignore pas pour autant ce que c'est que de la lumière.
Ainsi les Grecs, qui n'ont pas connu Dieu, mais ont tout de même fini par le poser, abstraitement; voudriez-vous dire que l'être qu'ils ont connu à partir de l'expérience, ce n'est pas vraiment de l'être? Bien sûr, c'est de l'être imparfait, mêlé de devenir, de puissance.
De toute manière, si Dieu était essentiel à la notion d'être, jamais on n'aurait su ce qu'est l'être, à partir des seules créatures; mais comme c'est là notre unique source d'information (naturelle), alors il n'y aurait aucune connaissance naturelle de Dieu, ni de quoi que ce soit d'ailleurs, puisque sans notion d'être on ne peut même pas prononcer un mot. Il faudrait supposer une autre source de connaissance que les créatures, comme les vestiges de Socrates, par exemple. Mais on voit bien qu'on peut s'en passer.