Philippe Pétain

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Message non lu par coeurderoy » mer. 06 oct. 2010, 7:58

L'ex-maréchal, toujours admiré et défendu dans les écoles de la FSSPX par une frange maurrassienne pure et dure, porte effectivement une très lourde responsabilité dans le sort des Juifs français ou d'origine étrangère.
Serge Klarsfeld a eu le mérite de reconnaître tout récemment qu'il était particulièrement à l'honneur des Français d'avoir réussi à sauver un tel contingent de Juifs (par refus d'application de la loi, infos transmises aux intéressés par des fonctionnaires courageux, caches et filières organisées) en dépit des lois gouvernementales.
Dernière modification par coeurderoy le mar. 26 mars 2013, 20:36, modifié 4 fois.
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Re: Pétain et les Juifs

Message non lu par Bisdent » mer. 06 oct. 2010, 9:46

L'émission de France 5 "C dans l'air" d'hier soir était consacrée à cette thématique de "Pétain et les Juifs".

Une remarque inconsciemment chauvine d'un intervenant m'a fait quelque peu sursauté : "La France un des pays d'Europe continentale qui a envoyé le plus faible pourcentage de ses Juifs dans les camps !". Le même intervenant a tout de même eu la décence de préciser que c'était peut-être du au fait qu'il existait une zone libre dans le pays... Que signifient ces comparaisons à 5 sous ? Surtout quand l'intervenant dit lui-même qu'il compare des choses qu'il n'y a pas lieu de comparer. Évidemment un pays à moitié occupé, à moitié libre enverra moins de Juifs aux camps qu'un pays 100 % occupé (ce qui était tout de même le cas de la plupart des pays européens...).
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Je maintiendrai l'honneur, la foy, la loi de Dieu, du Roy, de mes amis et moy.

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Message non lu par coeurderoy » mer. 06 oct. 2010, 10:08

La zone "nono" n'a pas existé pendant toute la guerre ! En tout cas l'antisémitisme qu'on a tellement reproché à "l'ensemble des Français pétainistes" je ne l'ai jamais rencontré dans mes relations ni dans ma famille (sauf lors de mes années FSSPX où effectivement j'ai découvert cette réalité). Mon grand-père (1890-1962) appelait Pétain "le boucher de Verdun" et, même s'il s'était battu là-bas en 1916, il ne l'aimait guère...Le maréchal demeure cependant une icône pour ceux qui regrettent la "divine surprise" de l'épisode de l'Etat français...si mal nommé.
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Message non lu par ti'hamo » mer. 06 oct. 2010, 12:53

(hmmm... il me semblait que le surnom "boucher de Verdun" était déjà attribué à un autre général de l'époque... et que Pétain était plutôt connu pour se soucier de l'état de ses hommes (moral et physique) et l'économie des vies humaines)

(juste comme ça, hein, surtout que, bon, de nos jours, faire la liste des erreurs et fautes du maréchal Pétain...)
“Il serait présomptueux de penser que ce que l'on sait soi-même n'est pas accessible à la majorité des autres hommes.”
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Celui qui connaît vraiment les animaux est par là même capable de comprendre pleinement le caractère unique de l'homme.
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Message non lu par coeurderoy » mer. 06 oct. 2010, 14:12

ti'hamo a écrit :(hmmm... il me semblait que le surnom "boucher de Verdun" était déjà attribué à un autre général de l'époque... et que Pétain était plutôt connu pour se soucier de l'état de ses hommes (moral et physique) et l'économie des vies humaines)

(juste comme ça, hein, surtout que, bon, de nos jours, faire la liste des erreurs et fautes du maréchal Pétain...)
Oui je sais (c'est ce que j'ai lu dans tous les manuels, à propos de Nivelle peut-être ?) mais ma mère est formelle quant-à ce souvenir concernant Pétain - ce qui m'a étonné aussi car on voit toujours le Maréchal réconfortant les troupes dans les tranchées : propagande ?
A vrai dire je pense que, comme pas mal de Poilus, mon grand-père (mort lorsque j'avais 5 ans) devait garder un atroce souvenir de Verdun.

Quant aux "erreurs" du Maréchal...savoir qu'il est intervenu personnellement en aggravant le texte du statut, si, cela prouve vraiment une volonté de se débarrasser non seulement des "apatrides" mais de Juifs assimilés depuis des siècles qui attendaient protection de la République française et de ses lois : "Tous les Français fiers de la France, la France fière de chaque Français, tel est l'ordre que nous voulons instaurer...etc" Pétain, 11 juillet 1940.
Dernière modification par coeurderoy le jeu. 14 oct. 2010, 19:36, modifié 7 fois.
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Message non lu par coeurderoy » mer. 06 oct. 2010, 14:31

Oui, gyrovague alors mon grand-père a dû mettre maréchal et général dans le même panier...Ma maman m'a toujours dit que son père "se mettait en pétard" dès qu'on parlait de Pétain et de Verdun...Quant à l'offensive terriblement meurtrière du printemps 17 sur le Chemin des Dames, là je sais la responsabilité de Nivelle dans la quantité des pertes et ce qui est surprenant c'est que mon autre grand-père (plus "patriotard"...) parlait souvent du moulin de Laffaux, où il avait combattu, sans s'épancher beaucoup sur le carnage...
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Message non lu par Pati » jeu. 14 oct. 2010, 17:30

Mes deux grand-pères ont également participé à la bataille du chemin des Dames.. je ne les ai pas connu... je n'ai que le livre de voyage de mon grand père paternel.. celui où il écrivait tout ce qu'il vivait...... (je ferme la parenthèse.)
je ne savais pas ce qu'était le FSSPX aussi, j'ai été regardé sur wikipedia.. on me dit qu'il s'agit d'une école qui forme des prêtres.. et on rajoute, je cite :" Toutefois, la Fraternité Saint-Pie-X n'est pas en communion parfaite avec l'Église et le pape." un peu plus loin : je cite encore : "Ce même décret ajoute que « On espère que ce pas sera suivi de la réalisation rapide de la pleine communion avec l'Église, de toute la Fraternité de Saint Pie X », juste parès avoir parlé de la levée de l'excommunication des prètres...
Je ne connais pas le nombre de curés sortant d'une telle école, et par an, mais si celle ci vénère Pétain, (sans le monsieur et sans le général), en plus de faire du négationnisme, et aux vues de ce que viennent de découvrir les Klarsfield, nous sommes en droit d'avoir quelques inquiétudes..
(avis d'une fille d'Israel.. de moi, quoi !!).

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Message non lu par Griffon » jeu. 14 oct. 2010, 19:17

D'accord avec vous !
(avis d'un fils de Dieu... De moi, quoi !!)

Griffon.
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Jésus, je m'abandonne à Toi.
Mon bonheur est de vivre,
O Jésus, pour Te suivre.

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Message non lu par coeurderoy » jeu. 14 oct. 2010, 19:47

pour Pati, en souvenir de vos grands-pères : ce lieu tragique dont la visite est vraiment assez impressionnante, la Caverne du Dragon :

http://www.caverne-du-dragon.com/fr/default.aspx


et l'Historial de Péronne, site particulièrement riche, aux liens nombreux : http://www.historial.org/

Pati : concernant Pétain, je ne parlais pas du séminaire d'Ecône (que je ne connais que de loin via un cousin de mon épouse qui en est sorti) mais d'écoles privées assurant des études secondaires, en France, de la 6 ème à la Terminale et d'un camp d'été qu'a effectué l'un de mes enfants ; j'ai eu des échos (via plaisanteries anti-sémites plus que douteuses sur les camps) et ai moi-même été confronté aux "prises de bec" de parvis, notamment lorsque le pape Jean-Paul II a canonisé Edith Stein devenue soeur Bénédicte de la Croix.
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Message non lu par Pati » dim. 24 oct. 2010, 23:14

Je voudrais juste rajouter une petite reflexion.. une simple petite pensée...
on connait tous l'adage : "on trouve toujours pire"... et bien je pensais que pour a.h., cela était impossible.... je croyais naïvement que Pétain avait agi ainsi pour protéger la France, ou par faiblesse.. bref, j'ai toujours essayé de lui trouver des circonstances atténuantes..
et bien, je crois que a.h. est au niveau le plus bas du shéol, mais je crois aussi que s'il reste juste une petite place juste en dessous de lui, elle est pour pétain.. sans sigle, et sans majuscule..

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La thèse de Guillemin à propos du maréchal

Message non lu par Cinci » jeu. 24 mai 2012, 1:43

On a une illustration ici de ce qui pouvait faire goûter la télévision publique jadis. Donné en partie sur le ton de la confidence : des épisodes «au-delà du réel» avec un professeur Guillemin qui nous raconte Vichy. Passionnant.


La montée du fascisme en France

Épisode 01
http://www.youtube.com/watch?v=xex9WU4h ... ure=relmfu

Épisode 02
http://www.youtube.com/watch?v=weBHNvrH ... ure=relmfu

Le politicien Pétain

01
http://www.youtube.com/watch?v=5UL_DU0o ... creen&NR=1
02
http://www.youtube.com/watch?v=lpY624f8 ... ure=relmfu


Politique intérieure et défense nationale

01
http://www.youtube.com/watch?v=WV2UL50k ... creen&NR=1
02
http://www.youtube.com/watch?v=6NT7G8vr ... ure=relmfu

Un étrange maréchal

01
http://www.youtube.com/watch?v=32DAubXt ... =endscreen
02
http://www.youtube.com/watch?v=YHwubUQ0 ... ure=relmfu


1940 - le but est atteint

01
http://www.youtube.com/watch?v=mZQecuSE ... ure=relmfu
02
http://www.youtube.com/watch?v=YHwubUQ0 ... ure=relmfu


Débat à la télévision suisse

1
http://www.youtube.com/watch?v=UBo-4SZo ... ure=relmfu
2
http://www.youtube.com/watch?v=-TOGOV23 ... ure=relmfu
3
http://www.youtube.com/watch?v=X1w1gDGS ... ure=relmfu
4
http://www.youtube.com/watch?v=mcAhWqxy ... ure=relmfu


VICHY

L'an 40
01
http://www.youtube.com/watch?v=bPh4BGMW ... =endscreen
02
http://www.youtube.com/watch?v=88XGejeq ... ure=relmfu

Avec Darlan

01
http://www.youtube.com/watch?v=4pFHRbMB ... =endscreen
02
http://www.youtube.com/watch?v=vZbTZmcz ... ure=relmfu

Laval réapparait

01
http://www.youtube.com/watch?v=UN9eEOEn ... =endscreen
02
http://www.youtube.com/watch?v=9q2C61ds ... ure=relmfu


L'asservissement consenti

01
http://www.youtube.com/watch?v=j-hxeuJE ... ure=relmfu
02
http://www.youtube.com/watch?v=Yfh4SxPZ ... ure=relmfu

La fin

01
http://www.youtube.com/watch?v=KqlqXroO ... ure=relmfu
02
http://www.youtube.com/watch?v=qyGPw2sZ ... ure=relmfu


Constats

01
http://www.youtube.com/watch?v=B7iC9uzq ... ure=relmfu
02
http://www.youtube.com/watch?v=8XnKPw3c ... ure=relmfu

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Re: La thèse de Guillemin à propos du maréchal

Message non lu par Cinci » sam. 26 mai 2012, 3:24

Le politicien Pétain,
première partie


4 :50 à 7:45

Personnellement, je n'étais pas au courant de cette campagne de 1935 en faveur du maréchal de la part d'un Gustav Hervé. Quel programme !


Puis l'article de Pétain du 1er mars 1935 dans la Revue des Deux Mondes versus sa propre allocution en préparation pour le 21 juin 1936, devant être délivrée le jour de la célébration de la victoire de Verdun. C'est vers les 10-12e minutes de la bande. Je ne connaissais pas non plus cette préparation de discours du maréchal.

L'occupation de la rive gauche du Rhin par l'armée allemande intervient le 7 mars 1936 pour donner un point d'ancrage, un repère de politique international.





1940 - le but est atteint
La partie 1

Je recommande vivement le tout. Très très intéressant.
Dernière modification par Cinci le sam. 26 mai 2012, 6:19, modifié 1 fois.

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Re: La thèse de Guillemin à propos du maréchal

Message non lu par Cinci » sam. 26 mai 2012, 6:16

L'an 40
Première partie



12 juillet 1940

... sont abrogés toutes les dispositions des actes constitutionnels de 24 et 25 février 1875. C'est tout. Interdiction est faite à la presse de ne pas reproduire ces articles. Pourquoi ? Parce que c'était les articles par lesquels la république fut installée en France. Donc la république est détruite sournoisement. On n'en parlera pas, sauf la mention du mot République française disparaitra de la mention des actes officiels. Ça deviendra l'État français.

22 juillet 1940

C'est le 22 juillet qu'il décide - Pétain est au pouvoir depuis le 10 juillet - de réviser les naturalisations de juifs étrangers qui s'étaient produites depuis 1827 en France. Très rapidement il y aura 6 000 de ces juifs qui cesseront d'être français. Ils deviennent donc des apatrides. Le 27 août sera aboli l'article d'avril 1939 qui interdisait les outrances antisémites dans la presse. Non. maintenant toutes les outrances seront permises. Ce même mois d'août sera aboli le décret Crémieux. Un décret qui avait été adopté par le gouvernement transitoire de 1870. Crémieux était un juif, et alors le décret avait accordé le droit de vote aux juifs algériens. Suppression !

Maintenant, ce qui est intéressant est le statut des juifs que le maréchal va publier au journal officiel du 17 octobre, l'ayant signé le 5 octobre. Et les juifs sont considérés comme des gens qui sont mis au ban de la nation. Interdiction est faite à l'armée, à la magistrature et à l'enseignement d'avoir un seul représentant de la classe juive. Et, là, nous avons un détail très intéressant qui est fourni par un monsieur Baudouin. Baudouin a été pendant neuf mois ministre des affaires étrangères de Pétain. Il a publié ses notes, ses souvenirs. Et à la date du 1er octobre 1940, il a noté : «... un long conseil des ministres de 17h à 19h 45. C'est le maréchal qui est le plus sévère pour l'exclusion des juifs.» Ça fait un grand plaisir à l'Action française, quoique ça lui semble encore insuffisant. Puisque Maurras dans l'Action française du 21 octobre écrira : «il importe qu'il y ait au plus tôt un recensement de tous les juifs habitant la France.»

[...] en moins de six mois 1300 instituteurs seront révoqués.

Tous les fonctionnaires seront maintenant astreint à un serment qu'ils prêtent au maréchal. [...] Il va dire : « il convient d'en finir avec l'esprit revendicatif. Nous supprimerons les discussions dans la cité, nous ne les admettrons pas à l'intérieur de l'usine.» D'où la destruction de la CGT. Ça se passe au début d'août 1940. Et, parallèlement, comme pour faire compensation, le maréchal dissout également la CNPF, c'est à dire la centrale nationale du patronat français.

Ça paraît un équilibre comme ça, car enfin il n'y aura pas de groupements ouvriers, pas de rassemblements de patrons non plus. Avec cette différence considérable sur laquelle je me permets d'insister, que Jouhaut qui était le patron de la CGT va être mis en prison, tandis que les grands dirigeants du patronat français vont tous (tous !) se retrouver à la tête de ces comités d'organisation et que le maréchal a prévu pour chaque branche industrielle. Vous voyez, les grèves sont interdites. On peut dire que la politique du maréchal est précise : asservissement de la classe ouvrière.


Comprenons bien ceci, le maréchal est quelqu'un qui se venge (qui se venge) de ce qui s'était passé durant le Front populaire.

Le Front populaire était une chose horrible pour un René Benjamin, un maurrassien, et lequel René Benjamin osera écrire : «la défaite était moins grave que le régime des successions.» Et vous avez un évêque, l'évêque de Dax, qui, dans son mandement de carême de 1941, dira ce que personne n'ose dire mais que lui dira carrément : «l'année maudite n'a pas été pour nous l'année de notre défaite extérieure de 1940. L'année maudite ce fut celle de notre défaite intérieure soit l'année 1936.» Alors c'est donc clair.


[...]

Est-ce que vous savez l'extraordinnaire jubilation qu'a éprouvé Hitler lorsque le 17 juin il a apprit que le maréchal demandait un armistice ? Il y avait eu de la plume d'Hitler en 1924, dans son livre Mein Kampf, une phrase très intéressante : « il faut faire gouverner les vaincus par les vaincus eux-mêmes, afin qu'ils s'enfoncent ainsi dans l'esclavage et que la servitude leur devienne naturelle.» Faire gouverner les vaincus par les vaincus, il a bien essayé dans tous les pays où il avait triomphé, par exemple, en Tchécoslovaquie, Pologne bien sûr, Danemark, Norvège, Hollande, Belgique. Nulle part, vous m'entendez bien, nulle part Hitler n'avait trouvé un homme du pays pour être son représentant. Il avait fallu faire appel à des étrangers. C'est pourquoi la reine Whillelmine qui s'était réfugiée au Canada, je crois, avait dit à ses sujets : «Vous avez vu. Quelle joie ! Hitler n'a trouvé personne chez nous pour être son Gauleiter.» Il a fallu qu'il fasse appel à un Autrichien du nom de Seyss-Inquart. Il avait raté partout, Hitler, sauf en France. En France, il a eu cette chance incroyable pour faire sa besogne politique, un Français et quel Français : le maréchal de France !




L'an 40
Deuxième partie


Vers 7:10 ... au sujet de Laval ... répudié en décembre 1940 ... Guillemin signale que la révolution nationale du maréchal n'intéressait pas du tout Laval et qu'il s'opposait même aux mesures antisémites par surcroît. La formule en raccourci pour signifier la différence de point de vue entre les deux hommes : la défaite eût été une bonne occasion à saisir pour Pétain, tandis que la situation de 40 représentait plutôt un merdier d'où il fallait extraire la France pour Laval.

[...]

René Rémond qui a écrit un livre La droite française de 1815 à nos jours conteste l'application du mot «fasciste» au régime de Vichy. Il dit : «Non, ce n'est pas exactement un régime fasciste.» Et il a raison sur un point. C'est vrai. Les régimes fascistes et nazi avaient une base populaire qui manquait complètement au maréchal*.

L'amiral Leahy qui sera ambassadeur officiel de Roosevelt à Vichy dira, dans une dépêche : «C'est un régime voisin de celui de l'Italie fasciste. Je dirais plutôt une espèce de fascisme français qui est une combinaison de Maurras et de Salazar.» Et il faut penser que dès juillet 1940, le maréchal a demandé aux Allemands de libérer Brasillach; Brasillach qui était l'homme de Je suis partout, et qui de la manière la plus positive, la plus claire, disait : je suis un fasciste.

Définition de Robert Paxton : «... des mesures draconiennes prises par une bourgeoisie effrayée et alors voilà qui pourrait être une bonne définition du fascisme. En ce sens, le régime de Vichy était bien un régime fasciste

__

* Bernanos dira au sujet de Vichy : «C'est le triomphe d'une minorité impopulaire qui depuis 20 ans cherchait en vain électoralement sa chance et qui l'a trouvée dans le désastre de la patrie.»

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Re: La thèse de Guillemin à propos du maréchal

Message non lu par Cinci » sam. 26 mai 2012, 20:22

Celle-là ne se trouve pas dans le récit de Guillemin mais dans l'ouvrage de Tournoux, présent dans le débat télévisé de 1980


  • «... a Burgos, ce 27 septembre 1939, le maréchal de France - quatre-vingt-trois ans - arrive, droit comme un sous-lieutenant, la taille bien prise dans son uniforme kaki. L'allure superbe du beau Nordique en impose aux Espagnols. La majesté naturelle escorte ce paysan de l'Artois, d'origine flamande, dont le nom Pétain semble être le produit de la romanisation de Pethem. Sous le regard d'azur, le maréchal s'exprime d'une voix un peu sourde. Il représente tout à fait «l'homme de marbre aux yeux bleus» décrit par Paul Valéry. Ce jour-là, à Burgos, un curieux incident se produit, sur lequel les Français de l'ambassade, choqués et peinés, s'efforcent de jeter un voile pudique.

    A la cérémonie de la Phalange, tous les chefs de mission diplomatique sont conviés. On attend le Caudillo, escorté de sa magnifique garde maure, devant le chapitre de l'église où il sera accueilli sous le dais. Une Bible enluminée et un Christ de haute époque recevront le serment des phalangistes. L'ordre du protocole place côte à côte ambassadeurs de France et d'Allemagne. Le maréchal peut soit ignorer son voisin, soit se borner à un signe de tête.

    Les ambassadeurs prennent place.

    L'Allemand, un colosse germanique, presque un géant, le baron von Stohrer, a choisi de saluer, le premier, le maréchal en sa qualité de valeureux soldat. Stupéfaction ! Le maréchal, en retour, lui tend la main.

    Pendant ce temps, la Wermacht et nos troupes de couverturent se mitraillent dans la Sarre et en Lorraine.»

    - Raymond Tournoux, Pétain et la France, Paris, Librairie Plon, 1980, p. 28
[/color]

L'état de belligérance se trouve déjà officiellement enclenché entre la France et l'Allemagne, et le maréchal de France, comme ambassadeur de France en Espagne, va serrer lui-même la main du représentant officiel de la puissance ennemie. Le tout : sous les yeux de Franco.

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Re: La thèse de Guillemin à propos du maréchal

Message non lu par Cinci » sam. 02 juin 2012, 3:40

  • «... la prochaine paix n'appartiendra pas à un nouveau Lénine, mais à un petit cireur de bottes yankee, un marmot à tête de rat demi-saxon, demi-juif, avec on ne sait quoi de l'ancêtre nègre au fond de sa moëlle enragée , le futur roi de l'Acier, du Caoutchouc, du Pétrole, le Trusteur des Trusts, le futur maître d'une planète standardisée, ce dieu que l'univers attend, le dieu d'un univers sans Dieu» - Georges Bernanos, 1931





«... les catholiques traditionnels et le petit groupe des chrétiens de gauche, qui s'étaient violemment combattus avant la guerre, s'accordent à vitupérer la IIIe République laïque et à se réjouir des possibilités de changement. La plupart des catholiques espèrent ardemment que le gouvernement va souscrire aux valeurs religieuses et réparer les vieilles injustices encore cuisantes : laïcisation de l'enseignement public des années 1880, querelle des inventaires consécutive à la séparation des Églises et de l'État en 1905, lois discriminatoires contre les ordres religieux. La nouvelle gauche catholique, qui scandalise les traditionnalistes en dénonçant le capitalisme du laissez-faire, est encore plus hostile qu'eux à une république séculière. Mgr Delay parle donc au nom de la très grande majorité des fidèles lorsqu'il dit à la fin de 1940 à Pétain, au cours d'une tournée triomphale : «Dieu, par votre intercession, Monsieur le Maréchal, travaille à sauver la France

Les ministères de Vichy, tout au moins les premiers, désirent ardemment répondre aux espoir des catholiques.

Maurras avait habitué la droite, croyante ou non, à voir dans l'Église un instrument de l'ordre social. La religion semble promettre aussi de faire sortir le pays de la longue décadence des années impies. Seul un retour aux valeurs catholiques traditionnelles, dit l'un des témoins au procès de Pétain, pouvait rétablir une grandeur perdue non pas en 1940, mais longtemps avant. Tous ces gens étaient reconnaissants au maréchal de permettre le retour des valeurs spirituelles.

Ces désirs conjugués se traduisent par l'entente Église-État la plus étroite qu'ait connu la France depuis «l'ordre moral» du duc de Broglie et de Mac-Mahon en 1873-74, quand le Sacré-Coeur fut construit à Montmartre et que les pélerinages de Lourdes devinrent une grosse entreprise commerciale.

Pétain aurait «écrasé l'Église sous le poids de ses bienfaits s'il en avait eu le temps», écrit Jérôme Carcopino, ministre de l'éducation nationale. Les auteurs bien disposés envers l'Église disent en général qu'elle a obéi, comme elle le fait toujours, à un gouvernement légitime. Mais on peut sans peine faire le départ entre son obéissance enthousiaste à ce régime qui lui est favorable et son comportement envers la République. La politique de Vichy à l'égard du catholicisme est dictée par une réaction contre la IIIe République. Jules Ferry et Émile Combes avaient continué une bataille commencé par la Révolution. Vichy rétablit l'Église dans ses privilèges; il n'innove pas.

La République ayant renoncé à imposer le monopole absolu de l'État sur l'enseignement, il suffit à Vichy d'apporter des modifications aux deux systèmes.

La plus frappante est la fin de «l'école sans Dieu». Jacques Chevalier, ministre de l'Éducation, professeur de philosophie à l'université de Grenoble et filleul de Pétain (son père avait été général), rétablit les devoirs envers Dieu le 6 décembre 1940, et, le 6 janvier 1941, un enseignement religieux facultatif dans les établissements d'enseignement public. [...] Jérôme Carcopino, le grand spécialiste de l'histoire romaine de la Sorbonne, prévoit simplement dans l'emploi du temps des heures de liberté permettant à ceux qui le désirent de recevoir une instruction religieuse hors des locaux scolaires; il se flatte d'avoir gagné la paix religieuse par la neutralité de l'enseignement public. L'école laïque n'en est pas moins éprouvée.

Les catholiques ont plus de chance avec les subventions aux écoles libres, que le haut clergé demandait avec insistance depuis de nombreuses années. Il a fait de très pressantes démarches en ce sens au cours des années 20 et revient [le haut-clergé] à la charge aussitôt après juin 1940. Il propose un système de bons qui seraient accordés à chaque chef de famille pour lui permettre d'envoyer ses enfants dans l'école de son choix. Le maréchal Pétain insiste pour que le gouvernement agisse rapidement.

La loi de Carcopino qui sort enfin le 2 décembre 1941 ne répond pas tout à fait à ces espérances. L'État octroie directement à l'évêché des subventions pour l'éducation, mais précise qu'il s'agit d'un secours d'urgence, et non d'une aide permanente aux écoles confessionnelles. Il n'en reste pas moins qu'un autre des principes sacrés de la République est violé irrémédiablement.

Aux termes de la loi Combes de 1904, les membres des congrégations catholiques n'avaient pas le droit d'être enseignants, et selon la loi de 1901 les congrégations en tant que telles devaient obtenir l'autoritsation du Parlement. Par la loi du 3 septembre 1940, Raphaël Alibert, ministre de la Justice, «un converti qui brûle de l'ardeur du néophyte», permet aux religieux d'enseigner. [...] Ce qui change surtout c'est le ton. Le régime cultive les hommes d'Église, sollicite leur avis et fait siens les enseignements du catholicisme sur la famille, la décadence morale et les valeurs spirituelles.»

Source : Robert Paxton, La France de Vichy, p.152

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