Cinci a écrit :Ce sont des synonymes à mon avis. C'est juste vous qui voudrez revêtir tel ou tel mot d'une puissance représentative particulière. Ce coupage de cheveux en quatre sémantique ne veut rien dire.
Les situations sont multiples et l'Église, le nationalisme et la démocratie sont des éléments ayant joué suffisamment à la chaise musicale ensemble, quand l'un et l'autre se retrouvent tantôt alliés l'un avec l'autre ou en opposition. La foi peut nourrir le nationalisme, tout comme les sentiments nationalistes peuvent fichtrement servir les intérêts de l'Église. cf Irlande, Pologne, Espagne de Franco, Québec, etc. Au Mexique ce fut le contraire : le nationalisme révolutionnaire voulait voir fusiller les évêques quinze à la douzaine. Il dépend du lieu, de la date, du siècle.
Bonjour,
ce que pense Jean-Paul II du concept de patrie :
"Le développement du concept de "patrie" est étroitement lié à celui du concept de "famille" et, en un sens, chacun en fonction de la nature de l’autre. Et vous, peu à peu, en faisant l’expérience de ces liens sociaux plus larges que les liens familiaux, vous commencez aussi à participer à la responsabilité du bien commun de cette famille plus vaste qu’est la "patrie" terrestre de chacun et de chacune d’entre vous. Les grandes figures de l’histoire, passée ou contemporaine, d’une nation sont aussi les guides de votre jeunesse et elles favorisent le développement de cet amour social qu’on appelle le plus souvent "amour de la patrie"".
Jean-Paul II, Lettre apostolique à l’occasion de l’année internationale de la jeunesse, 31 mai 1985.
Ce qu'il explique au sujet de l’influence de la patrie sur l’homme :
"La plupart du temps, les cultures se développent sur des territoires déterminés, dont les éléments géographiques, historiques et ethniques s’entrecroisent de façon originale et unique. Cette "spécificité" de chaque culture se reflète de manière plus ou moins intense chez les personnes qui la possèdent, selon un dynamisme continuel d’influences exercées sur les individus et de contributions que ces derniers, à la mesure de leurs capacités et leur génie, apportent à leur culture. En tout cas, être homme signifie nécessairement exister dans une culture déterminée. Chaque personne est marquée par la culture qu’elle reçoit de sa famille et des groupes humains avec lesquels elle est en relation, à travers son parcours éducatif et les influences les plus diverses de son milieu, à travers la relation fondamentale qu’elle entretient avec le territoire dans lequel elle vit. Dans tout cela, il n’y a aucun déterminisme mais une constante dialectique entre la force des conditionnements et le dynamisme de la liberté."
"C’est en fonction de ce rapport fondamental avec ses propres origines -au niveau familial, mais aussi territorial, social et culturel- que se développe chez les personnes le sens de la patrie, et la culture tend à assumer, plus ou moins selon le lieu, une configuration nationale."
Jean-Paul II, Message pour la paix sur "le dialogue entre les cultures", 1er janvier 2001.
Comme tous les mots de la langue française, le mot
Nation possède un sens précis : il désigne une communauté de langue, de territoire et de culture - la nation est avant tout une communauté ethnique et elle n'est en aucun cas une société politique. Il n'existe pas à proprement parler de "nationalisme", mais
des nationalismes : soit la tentative de légitimer l'existence de l'Etat-nation (la Nation française); soit le sentiment politique qui promeut l'exaltation de la culture, de la langue, etc. de la Nation; soit encore un sentiment populaire qui peut s'accommoder des idéologies, voire des religions. Si le mot "nation" a un sens précis, il faut en conclure que le nationalisme est une notion ambiguë, surtout en France.
Il convient de ne pas confondre le nationalisme révolutionnaire avec le nationalisme républicain; le nationalisme intégral de Maurras avec celui de Barrès; et encore moins le nationalisme du Front national avec tout ce qui précède.
En ce qui concerne la démocratie, je rappelle que la démocratie telle que l'envisage la doctrine sociale de l'Eglise ne constitue en aucun cas un "mouvement politique", mais bien plutôt un "mouvement social" (et je ne parle pas ici, bien entendu, de ce que l'on appelle la démocratie chrétienne, qui est un modèle politique démo-libéral).
Dans le Compendium de la doctrine sociale de l'Eglise, au numéro 406 et au numéro 407 :
406 L'encyclique « Centesimus annus » renferme un jugement explicite et structuré sur la démocratie: « L'Église apprécie le système démocratique, comme système qui assure la participation des citoyens aux choix politiques et garantit aux gouvernés la possibilité de choisir et de contrôler leurs gouvernants, ou de les remplacer de manière pacifique lorsque cela s'avère opportun. Cependant, l'Église ne peut approuver la constitution de groupes dirigeants restreints qui usurpent le pouvoir de l'État au profit de leurs intérêts particuliers ou à des fins idéologiques. Une démocratie authentique n'est possible que dans un État de droit et sur la base d'une conception correcte de la personne humaine. Elle requiert la réalisation des conditions nécessaires pour la promotion des personnes, par l'éducation et la formation à un vrai idéal, et aussi l'épanouissement de la “personnalité” de la société, par la création de structures de participation et de coresponsabilité ».
407 Une démocratie authentique n'est pas seulement le résultat d'un respect formel de règles, mais le fruit de l'acceptation convaincue des valeurs qui inspirent les procédures démocratiques: la dignité de chaque personne humaine, le respect des droits de l'homme, le « bien commun » comme fin et critère de régulation de la vie politique. S'il n'existe pas de consensus général sur de telles valeurs, la signification de la démocratie se perd et sa stabilité est compromise.
Si cela peut servir à clarifier le débat.
Amicalement.
Virgile.