La peine capitale en question

« Par moi les rois règnent, et les souverains décrètent la justice ! » (Pr 8.15)

Êtes-vous favorable à la peine capitale ?

Oui
12
13%
Oui mais seulement dans certains cas exceptionnels
15
16%
Non
67
71%
 
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Cinci
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Re: La peine capitale en question

Message non lu par Cinci » lun. 08 juil. 2019, 14:28

Et ...
"Les juges ne pèchent donc pas en punissant les méchants. Les hommes qui sur terre sont constitués en dignité au-dessus des autres, sont les exécuteurs de la divine Providence : Dieu en effet, d'après l'ordre de sa Providence, dirige les êtres inférieurs par les êtres supérieurs. Or personne ne pèche en obéissant à l'ordre de la Providence divine, et cet ordre comporte que les bons soient récompensés et les méchants punis. Les hommes qui ont autorité sur les autres, ne pèchent donc pas en récompensant les bons et en punissant les méchants. Le bien n'a pas besoin du mal, c'est le contraire qui est vrai. Ce qui est nécessaire au maintien du bien, ne peut donc être mauvais de soi. Or, pour assurer la paix parmi les hommes, il faut que des peines soient infligées aux mauvais. Ce n'est donc pas un mal de soi que de punir ceux-ci. Le bien commun l'emporte sur le bien particulier, aussi convient-il de sacrifier celui-ci à celui-là. Puis que la paix entre les hommes est compromise par quelques hommes dangereux, il faut les retirer de la société des hommes. La santé qui consiste en un certain équilibre des humeurs, est le but de l'activité du médecin, de même la paix, qui réside dans la concorde entre les hommes, appuyée sur l'ordre, est-elle le but poursuivi par le chef de la cité. Or le médecin ampute sagement et utilement un membre gangrené si, à cause de ce membre, tout le corps court le risque de gangrène. Le chef de la cité met donc à mort justement et sans péché les hommes dangereux afin que la paix de la cité ne soit pas troublée. C'est pourquoi l'Apôtre dit : « Ne savez-vous pas qu'un peu de levain fait lever toute la masse? » Et peu après :« Retranchez le méchant du milieu de vous ». Et il est dit au sujet du pouvoir terrestre : « Ce n'est pas en vain qu'il porte l'épée, étant ministre de Dieu pour tirer vengeance de celui qui fait le mal ». Et : « Soyez donc soumis à toute institution humaine à cause du Seigneur, soit au roi, comme souverain, soit aux gouverneurs comme délégués par lui pour faire justice [...]"

(Saint Augustin, cité par Suliko)
Nul doute que c'est bien ainsi que les magistrats à Nuremberg auront compris leur propre mission. Les nazis étant naguère des hommes dangereux. Dans une société civile bien ordonnée, il y a une nécessité que le crime soit puni.

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Valentin
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Re: La peine capitale en question

Message non lu par Valentin » lun. 08 juil. 2019, 21:44

Cinci a écrit :
lun. 08 juil. 2019, 13:53
Non, la peine capitale n'exclut nullement le repentir.
Disons plutôt qu'en écourtant la vie terrestre, qui est le lieu où se joue le destin spirituel de chaque homme (par le péché et éventuellement, le repentir), elle défavorise les condamnés à mort par rapport aux autres. Vous n'ignorez pas, Cinci, que pour certains, la repentance et le regret n'arrivent que très tard ; parfois seulement sur le lit de mort. Si on tue un criminel impénitent à 40 ans, on empêche sa possible rédemption à 50. C'est pour cela que je dis qu'on anticipe un jugement qui n'appartient qu'à Dieu.
Cinci a écrit :
lun. 08 juil. 2019, 14:28
Dans une société civile bien ordonnée, il y a une nécessité que le crime soit puni.
Bien entendu, c'est une évidence. Mais pourquoi vouloir à tout prix infliger la peine de mort ? Comme le disait un autre intervenant, quelle différence entre quelqu'un qui est enfermé à vie et quelqu'un qui est mort ? Dans les deux cas, le criminel est hors d'état de nuire ; mais en prison, il lui reste au moins la possibilité de se repentir.
(Encore faudrait-il que la peine de prison soit réellement appliquée, et qu'on ne libère pas les détenus avant qu'ils aient purgé leur peine... mais c'est un autre débat)

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Suliko
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Re: La peine capitale en question

Message non lu par Suliko » lun. 08 juil. 2019, 23:05

Bonsoir Valentin,

La peine capitale n'exclut pas le repentir. Je ne pense honnêtement pas qu'un criminel du Moyen-Age que l'on condamnait à mort, mais à qui l'on accordait tous les secours de la religion (confession, communion) avait moins de probabilités d'avoir une véritable contrition de ses péchés que le criminel moderne que l'on met 25 ans ou perpétuellement en prison, dans une atmosphère hélas peu propice à la conversion. Je serais même très tentée de croire qu'un homme aura plus tendance à se tourner vers Dieu s'il est condamné à mort tel jour précis que si on le laisse tout simplement moisir en prison.
Et que dire des lois de l'époque ? Étaient-elles aussi justes et aussi raisonnables que le croit saint Augustin ? Les juges n'ont-ils jamais enfreint cette loi qu'ils étaient chargés d'appliquer ? Il serait juste et raisonnable, en tout cas, de douter de leur infaillibilité.
Se soumettre à la justice des hommes, oui ; se soumettre aveuglément, non.
Certes, et saint Augustin a d'ailleurs à plusieurs reprises dans ses lettres plaidé pour que l'on ne condamne pas à mort telle ou telle personne coupable de grands crimes. Et d'une manière générale, l'Eglise a toujours penché vers la miséricorde à ce sujet. Mais ce n'est pas vraiment la question qui nous intéresse, à savoir : l'Eglise considère-t-elle traditionnellement la peine de mort comme intrinsèquement immorale ? Et le fait est que la réponse à cette question est clairement négative, que l'on cherche du côté des Saintes Ecritures, des Pères de l'Eglise, des écrits des papes et des théologiens.
Je tiens à préciser que si l'on devait attendre que la justice humaine soit parfaite pour qu'elle ait la légitimité d'être appliquée, autant dire qu'aucune punition ne pourrait plus se faire...
Il faudrait également à mon sens éviter de ne voir les peines (capitales ou non) que sous l'angle de la protection de la société par la séparation des criminels de son sein. La justice a aussi pour but d'infliger une peine punitive et traditionnellement, la société chrétienne considérait que pour certains crimes graves, le principe de proportionnalité de la peine exigeait la mort du criminel.

Pour finir, je me permets de citer encore une fois Saint Augustin :
Or de grands hommes, des saints, quoique convaincus que la mort qui sépare l'âme du corps n'est point à redouter, mais se conformant aux dispositions de ceux qui la craignent, ont puni certaines fautes de mort, tant, pour imprimer la terreur aux vivants que dans l'intérêt même des coupables, à qui la mort était moins sensible que leur péché qui aurait pu s'aggraver s'ils avaient vécu. Et ce jugement, inspiré de Dieu, n'était pas sans fondement. C'est ainsi qu'Elie fit mourir beaucoup d'hommes soit de sa propre main, soit en attirant sur eux le feu du ciel : et beaucoup de grands hommes, d'hommes divins, ont agi de la sorte, non inconsidérément, mais dans le même esprit et pour le bien de l'humanité. Les disciples ayant un jour rappelé au Seigneur cet exemple d'Elie, pour lui demander ainsi le pouvoir d'attirer le feu du ciel sur ceux qui leur avaient refusé l'hospitalité, le Seigneur blâma, non l'action du saint prophète, mais le désir de se venger, inspiré par l'ignorance, en leur faisant remarquer que c'était la haine, et non le désir de corriger les coupables, qui les animait. Plus tard, quand il leur eut appris ce que c'est qu'aimer le prochain comme soi-même ; quand il leur eut, selon sa promesse, envoyé le Saint-Esprit, dix jours après son ascension, les exemples de pareilles vengeances ne manquèrent pas, quoique beaucoup plus rares que sous l'ancienne loi. Alors, en effet, on agissait le plus souvent sous l'empire de la crainte.: et maintenant, devenus libres, les chrétiens trouvaient leur principal aliment dans la charité. Nous lisons dans les Actes dès Apôtres, qu'Ananie et sa femme tombèrent morts à la parole de l'Apôtre Pierre, qu'ils ne ressuscitèrent pas et furent ensevelis. Que si certains hérétiques, ennemis de l'ancien Testament, rejettent l'autorité de ce livre, qu'ils écoutent l'Apôtre Paul (ils le lisent comme nous) parler d'un pécheur qu'il a livré à Satan pour la mort de sa chair, « afin que son âme soit sauvée. » S'ils ne veulent pas voir ici une mort réelle, ce qui ne peut-être douteux, qu'ils conviennent du moins que l'Apôtre a exercé une vengeance quelconque au moyen de Satan, non par esprit de haine, mais par charité, comme l'indiquent ces paroles : « Afin que son âme soit sauvée.» Ou encore, ils trouveront une preuve de ce que nous, avançons dans des livres auxquels ils attribuent une grande autorité ; car ils y liront que l'apôtre Thomas, ayant demandé le genre de mort le plus affreux pour un homme qui l'avait frappé de sa main, tout en priant Dieu d'épargner son âme dans l'autre vie, celui-ci fut tué par un lion ; et un chien, ayant séparé sa main du reste du corps, l'apporta sur la table, où l'apôtre prenait son repas. Nous ne sommes pas obligés de croire à ce livre, qui n'est pas dans le canon de l'Eglise catholique : mais il est lu et considéré comme l'exposition de la plus pure vérité par nos adversaires ; et ces adversaires, frappés de je ne sais quel aveuglement, s'insurgent contre tous les actes de vengeance corporelle mentionnés dans l'ancien Testament, ne comprenant absolument rien à l'esprit ni aux temps dans lesquels ces faits ont eu lieu. (Saint Augustin, "Commentaire du Sermon sur la Montagne")
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

cmoi
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Re: La peine capitale en question

Message non lu par cmoi » mar. 09 juil. 2019, 9:40

Emilio45,
je vous réponds tardivement, mais je suis tout à fait opposé à l'idée qu'un adulte (fut-il un criminel) ne puisse pas changer, et soit moins malléable qu'un enfant ou adolescent, même si la comparaison n'est traditionnellement pas en faveur de cette idée, un adulte est en tout cas plus libre et c'est une condition importante du changement..
J'y suis opposé car elle conduit à la médiocrité, à la vanité de tout échange, au rejet de la vérité. et ce qui doit vous indifférer: sans s'opposer à la grâce, elle la paralyse.
Je vous concède néanmoins qu'elle est statistiquement fondée si l'on veut être réaliste, et c'est bien là "l'esprit" de ce qu'il faut changer.
Ce qui est vrai c'est qu'on ne peut se développer que sur la base de ses propres talents, ce qui suppose à la base un resserrement des possibles et des sacrifices, mais pour une flamme plus haute. Le travail d'une vie est aussi un travail d'épuration et de dépouillement. Or comme et quand il s'opère en vue du bien de la personne, il ne cesse de changer et de la modifier.
Par compte, la caricature de cela et qui arrive chez tous ceux qui refusent cet effort, oblige au mensonge (reçu ou donné), à la duplicité, et se renforce et se fige dans une dureté pour paraître "cohérent", solide, fort
Mais il n'est pas de carapace qui ne puisse se fendre et se rompre, une fois que l'enjeu en est perçu tel qu'il est. La foi, la spiritualité, n'est pas une greffe qui prend sur du superficiel, mais sur ce qu'il y a de plus humain dans notre désir de réussite.

Quand une personne refuse avec constance les occasions qui lui sont offertes de s'amender, même s'il y a toujours une perspective ouverte de la faire changer non plus d'avis ni de comportement, ni de caractère ou de sentiment, mais de choix (qui va malgré tout en s'amoindrissant), compte tenu des dégâts qu'elle peut poser pour les autres, quand cela devient un moindre mal que ce soit sa propre mort qui soit le dégât...
(Et je ne parle même pas là d'économie ni du coût que représenterait la solution contraire.)

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Carhaix
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Re: La peine capitale en question

Message non lu par Carhaix » mar. 09 juil. 2019, 11:09

Valentin a écrit :
lun. 08 juil. 2019, 21:44
Cinci a écrit :
lun. 08 juil. 2019, 13:53
Non, la peine capitale n'exclut nullement le repentir.
Disons plutôt qu'en écourtant la vie terrestre, qui est le lieu où se joue le destin spirituel de chaque homme (par le péché et éventuellement, le repentir), elle défavorise les condamnés à mort par rapport aux autres. Vous n'ignorez pas, Cinci, que pour certains, la repentance et le regret n'arrivent que très tard ; parfois seulement sur le lit de mort. Si on tue un criminel impénitent à 40 ans, on empêche sa possible rédemption à 50. C'est pour cela que je dis qu'on anticipe un jugement qui n'appartient qu'à Dieu.
Cinci a écrit :
lun. 08 juil. 2019, 14:28
Dans une société civile bien ordonnée, il y a une nécessité que le crime soit puni.
Bien entendu, c'est une évidence. Mais pourquoi vouloir à tout prix infliger la peine de mort ? Comme le disait un autre intervenant, quelle différence entre quelqu'un qui est enfermé à vie et quelqu'un qui est mort ? Dans les deux cas, le criminel est hors d'état de nuire ; mais en prison, il lui reste au moins la possibilité de se repentir.
(Encore faudrait-il que la peine de prison soit réellement appliquée, et qu'on ne libère pas les détenus avant qu'ils aient purgé leur peine... mais c'est un autre débat)
"Si on tue un criminel impénitent à 40 ans, on empêche sa possible rédemption à 50. "
Cette réflexion me semble absurde et fausse. D'abord, Dieu agit en vue de la conversion de tout homme, et en fonction de la durée et des péripéties de son existence. Il serait absurde d'imaginer que Dieu puisse être contrarié ou surpris dans ses plans par une mort inopportune qu'il n'aurait pas prévue. Donc si quelqu'un meurt à 40, il était écrit qu'il mourrait à 40, et ce qu'il aurait pu faire entre 40 et 50 est purement fictif. Ensuite, la rédemption, la conversion, sont parfois favorisées par l'annonce d'une mort prochaine. Celui qui sait qu'il va mourir se pose nécessairement la question de comparaître devant Dieu, bien plus que celui qui ne voit pas la mort arriver. Un condamné sait qu'il va mourir. Il a largement le temps de se préparer. Paradoxalement, un condamné à mort de 40 ans est bien mieux préparé à mourir qu'un quinquagénaire qui périt d'un accident de voiture.

Pour la seconde partie de votre réflexion, on peut se poser aussi la question de l'humanité d'une peine de prison perpétuelle, jusqu'à ce que mort s'ensuive. Surtout si l'on prend en compte les conditions d'incarcération.

Mais le problème n'est pas là, à mon avis. Il est plutôt dans l'échelle des peines. En supprimant la peine de mort, on a nécessairement réduit cette échelle, et logiquement moins puni le crime en général. Tout le monde est d'accord pour dire que le crime, aujourd'hui, est quasiment toléré. On criminalise plus volontiers le citoyen lambda. Et on a inversé l'échelle des valeurs. Le cambriolé qui tue son cambrioleur est considéré comme un assassin, et on l'expédie en prison. La victime du crime est bien souvent culpabilisée. Etc. Pendant ce temps, le vrai criminel est quasiment absous et excusé. Le résultat de tout ceci, à terme, ce sera la barbarie et l'effondrement de la société. Punir le malfaisant est un symbole nécessaire pour que vive la société.

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Re: La peine capitale en question

Message non lu par Archidiacre » mar. 09 juil. 2019, 13:58

S'il n'y avait aucune possibilité de détourner une âme à laquelle Dieu préparait d'autres grâces, on ne se poserait probablement jamais la question de savoir ce qui arrive aux nouveaux nés morts avant le baptême ou aux embryons avortés. Ça paraît donc faux de supposer que ça n'est pas possible de s'opposer à la volonté divine en tuant un individu en voie de conversion, même si celui-ci pourrait "compenser" nos mauvaises actions. Vous concédez d'ailleurs que votre scénario n'arrive que "parfois". Il n'y a aucune garantie qu'il est systématiquement vrai (et il faudrait pouvoir le démontrer, sinon on tomberait dans le pari risqué). Le raisonnement de Valentin se tient ici dans le sens où une peine de mort rend impossible définitivement le repentir (ainsi que tous les moyens qu'on peut mettre en place pour évangéliser) excepté pour une courte durée. C'est ce qui la dissocie des autres peines punitives. C'est indéniable que la peine de mort a au moins restreint les autres possibilités, par ailleurs les conversions à l'approche de la mort arrivent aussi à des mourants qui n'ont pas été exécutés, et c'est là qu'on pourrait parler d'une conformité avec le plan de Dieu avec plus de certitude. C'est aussi cet aspect définitif qui justifie l'argument de la possibilité des abus: Les abus sont certes inévitables pour n'importe quelle peine, mais pour les autres peines cela est réparable (on peut dédommager les personnes emprisonnées à tort, mais pas les morts).

Il faut aussi éviter les faux arguments d'autorité pour se dédouaner orgueilleusement de toute obéissance. Il y a une seule autorité ultime pour les catholiques et c'est le magistère vivant de l'Eglise. On ne peut pas choisir des saints ou des théologiens selon nos propres envies pour prétendre renverser sa décision. Pie XII a me semble-t-il été clair sur cette question:
"Et l'on ne doit pas penser que ce qui est proposé dans les lettres Encycliques n'exige pas de soi l'assentiment, sous le prétexte que les Papes n'y exerceraient pas le pouvoir suprême de leur magistère. C'est bien, en effet, du magistère ordinaire que relève cet enseignement et pour ce magistère vaut aussi la parole : "Qui vous écoute, m'écoute... " (3), et le plus souvent ce qui est proposé et imposé dans les Encycliques appartient depuis longtemps d'ailleurs à la doctrine catholique. Que si dans leurs Actes, les Souverains Pontifes portent à dessein un jugement sur une question jusqu'alors disputée, il apparaît donc à tous que, conformément à l'esprit et à la volonté de ces mêmes Pontifes, cette question ne peut plus être tenue pour une question libre entre théologiens.
[...]
Car Dieu a donné à son Eglise, en même temps que les sources sacrées, un magistère vivant pour éclairer et pour dégager ce qui n’est contenu qu’obscurément et comme implicitement dans le dépôt de la foi. Et ce dépôt, ce n’est ni à chaque fidèle, ni même aux théologiens que le Christ l’a confié pour en assurer l’interprétation authentique, mais au seul magistère de l’Eglise. Or si l’Eglise exerce sa charge, comme cela est arrivé tant de fois au cours des siècles, par la voie ordinaire ou par la voie extraordinaire, il est évident qu’il est d’une méthode absolument fausse d’expliquer le clair par l’obscur, disons bien qu’il est nécessaire que tous s’astreignent à suivre l’ordre inverse. Aussi notre Prédécesseur, d’immortelle mémoire, Pie IX, lorsqu’il enseigne que la théologie a la si noble tâche de démontrer comment une doctrine définie par l’Eglise est contenue dans les sources, ajoute ces mots, non sans de graves raisons: « dans le sens même où l’Eglise l’a définie »"
http://w2.vatican.va/content/pius-xii/f ... neris.html
Si comme théologiens ils sont activement intéressés à l’ « orientation » et utilisent des arguments théologiques scientifiques, on aurait pu se demander si c’est la parole des théologiens ou celle du magistère de l’Eglise qui a le plus de poids et offre une meilleure garantie de vérité. A ce propos, on lit dans l’encyclique Humani generis : Quod quidem depositum (fidei)… nec ipsis theologis divinus Redemptor concredidit authentice interpretandum, sed soli Ecclesiae Magisterio… Quare Decessor Noster imm. mem. Pius IX, docens nobilissimum theologiae munus illud esse, quod ostendat quomodo ab Ecclesia definita doctrina contineatur in fontibus, non absque gravi causa illa addidit verba : eo ipso sensu, quo ab Ecclesia definita est6. Donc pour la connaissance de la vérité, ce qui est décisif ce n’est pas l’opinio theologorum [l’opinion des théologiens] mais le sensu Ecclesiae [le sens de l’Eglise]. Sinon ce serait faire des théologiens presque des magistri Magisterii [timoniers du Magistère] ; ce qui est une erreur évidente.
http://www.clerus.org/bibliaclerusonline/es/cl5.htm

Même "traditionnellement" (quoique l'étiquette paraît gratuite et superficielle), la peine de mort a été jugée comme conditionnée par les circonstances et les nécessités. Il n'est donc pas moralement acceptable d'appliquer la peine de mort simplement par mesure du poids de la faute quand il est possible de faire preuve de miséricorde (raison pour laquelle elle n'est effectivement pas intrinsèquement mauvaise non plus). Cela vaut aussi pour la guerre juste qui est un dernier recours défensif. Comme le Pape Saint Nicolas Ier l'écrivait aux princes Bulgares:
Loin de votre esprit l’idée que vous, qui avez reconnu un Dieu et Seigneur si saint, jugiez aussi durement, surtout quand il est plus convenable qu’après avoir jusqu’ici mis les gens à mort avec aisance, vous meniez maintenant ceux que vous pouvez mener non pas à la mort mais à la vie. [...] De la même manière, après que vous ayez été choisi par Dieu et illuminé par sa lumière, vous ne devriez non plus désirer la mort mais rappeler sans hésitation quiconque à la vie du corps et de l’âme, dès que l’opportunité s’y offre. Tout comme le Christ vous a pris de la mort éternelle à laquelle vous étiez attaché pour la vie éternelle, vous-même devriez tenter de sauver non seulement l’innocent mais aussi le coupable de la mort.
The Responses of Pope Nicholas I to the Questions of the Bulgars, A.D.866 (Letter 99). Translated by W. L. North from the edition of Ernest Perels, in MGH Epistolae VI, Berlin, 1925, pp.568-600.
https://d31kydh6n6r5j5.cloudfront.net/u ... ebsite.pdf

L'historien Jean-Pierre Dedieu écrit que la peine de mort pour l'inquisition est un échec:
"Dans la logique de l’Inquisition, la condamnation à mort est un échec. Une fois identifié, l’hérétique doit avouer son crime, puis se convertir."
https://questions.aleteia.org/articles/ ... e-leglise/

Dans un manuel de théologie de 1920, on rappelait la même pensée:
If the time should ever come when the infliction of less severe penalties will suffice to punish crime and safeguard life and property, then capital punishment should be abolished, but that time does not seem to be at hand yet.
[Si le temps devait venir où l'application d'une peine moins sévère suffira à punir let crime et à protéger la vie et la propriété, ainsi la peine de mort devrait être abolie, mais ce temps ne semble pas à notre portée pour le moment]
https://archive.org/details/MN5034ucmf_1/page/n209
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Re: La peine capitale en question

Message non lu par Suliko » mar. 09 juil. 2019, 14:37

Il faut aussi éviter les faux arguments d'autorité pour se dédouaner orgueilleusement de toute obéissance. Il y a une seule autorité ultime pour les catholiques et c'est le magistère vivant de l'Eglise. On ne peut pas choisir des saints ou des théologiens selon nos propres envies pour prétendre renverser sa décision.
Mais obéissance à quoi ? La question, je le répète, est de savoir si la peine de mort est intrinsèquement immorale, comme le suggère le pape François, et la réponse traditionnelle est négative. C'est tout. Nous ne sommes même pas en train de discuter des cas pratiques dans lesquels il peut être légitime d'appliquer cette peine. Et personne n'a jamais suggéré que l'Eglise ne penchait pas généralement pour la miséricorde envers les condamnés. Ce n'est tout simplement pas la question...
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: La peine capitale en question

Message non lu par Cinci » mar. 09 juil. 2019, 17:09

"Si on tue un criminel impénitent à 40 ans, on empêche sa possible rédemption à 50. " (Valentin)

Cette réflexion me semble absurde et fausse. D'abord, Dieu agit en vue de la conversion de tout homme, et en fonction de la durée et des péripéties de son existence. Il serait absurde d'imaginer que Dieu puisse être contrarié ou surpris dans ses plans par une mort inopportune qu'il n'aurait pas prévue. Donc si quelqu'un meurt à 40, il était écrit qu'il mourrait à 40, et ce qu'il aurait pu faire entre 40 et 50 est purement fictif. (Carhaix)
Oui.

Et puis, de toute façon, le système judiciaire ne peut ni fonctionner ni s'appuyer sur des "si" et des "peut-être". Ce sont des actes antécédents de nature criminelle qui seront jugés et pour lesquels une peine est requise.

On ne va pas s'empêcher d'emprisonner, par exemple, un assassin qui serait également un savant, au motif que l'on risquerait ainsi d'empêcher (dans vingt ou trente ans allez savoir ?) la découverte d'un médicament miracle contre le cancer.

Non, s'il subsiste une chance infinitésimale que le condamné puisse avoir conservé intact son potentiel à devenir éventuellement un enfant de Dieu, il va normalement accepté sa sentence et l'offrir lui-même (en même temps que sa vie) pour sa propre rédemption ainsi que celle des autres. C'est exactement cela, d'ailleurs, que l'on trouve dans le film américain que j'ai déjà mentionné plus haut; film extraordinairement intelligent et catholique d'esprit au demeurant. Aussi bien dire une rareté de nos jours.

:)

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Re: La peine capitale en question

Message non lu par Cinci » mar. 09 juil. 2019, 17:13

Carhaix :

Mais le problème n'est pas là, à mon avis. Il est plutôt dans l'échelle des peines. En supprimant la peine de mort, on a nécessairement réduit cette échelle, et logiquement moins puni le crime en général. Tout le monde est d'accord pour dire que le crime, aujourd'hui, est quasiment toléré. On criminalise plus volontiers le citoyen lambda
Re-oui.

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Re: La peine capitale en question

Message non lu par Carhaix » mar. 09 juil. 2019, 19:04

.
Dernière modification par Carhaix le dim. 14 juil. 2019, 2:33, modifié 1 fois.

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Re: La peine capitale en question

Message non lu par Carhaix » mar. 09 juil. 2019, 19:08

.
Dernière modification par Carhaix le dim. 14 juil. 2019, 2:33, modifié 1 fois.

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Re: La peine capitale en question

Message non lu par Cinci » mer. 10 juil. 2019, 1:33

Il faut aussi éviter les faux arguments d'autorité pour se dédouaner orgueilleusement de toute obéissance. Il y a une seule autorité ultime pour les catholiques et c'est le magistère vivant de l'Eglise. On ne peut pas choisir des saints ou des théologiens selon nos propres envies pour prétendre renverser sa décision. (archidiacre)

-----


archidiacre,

Vous avez déjà lu le numéro 2266 du catéchisme de l'Église, je présume.

Rappel :
"Préserver le bien commun de la société exige la mise hors d'état de nuire de l'agresseur. A ce titre, l'enseignement traditionnel de l'Église a reconnu le bien fondé du droit et du devoir de l'autorité publique légitime de sévir par des peines proportionnées à la gravité du délit, sans exclure dans les cas d'une extrême gravité la peine de mort." (Catéchisme, numéro 2266)
Quand un pape Jean-Paul II et un Monseigneur Ratzinger à la Congrégation pour la doctrine et la foi, en 1992, vont signer ensemble ce petit mot à l'effet que "l'enseignement traditionnel de l'Église a reconnu le bien fondé du droit ... sans exclure dans les cas d'une extrême gravité ... la peine de mort" , vous savez bien qu'eux-mêmes se référaient, entre autres choses, à saint Augustin, saint Thomas et al.

Je ne crois pas que vous auriez dit qu'ils se choisissaient des saints ou des théologiens selon leurs caprices du moment. Quand ils se réfèrent à l'enseignement traditionnel de l'Église, ils se réfèrent bien sûr à rien d'autre que ce qui fut toujours enseigné dans l'Église, et ce, depuis très très longtemps, remontant jusqu'à l'Apôtre Paul à vrai dire.

On chercherait donc en vain, là-dedans, les faux arguments d'autorité. Parce que je suppose bien que pour vous, qui êtes catholique, les signataires en chef du document de 1992 ne sont pas des "fausses autorités", ni saint Thomas (lorsque repris et endossé), etc.
Pie XII a me semble-t-il été clair sur cette question:
Pie XII a été clair sur cette question ... laquelle ? la peine capitale ? ... oui, en pensant de la même manière que les autres en effet; et lui, en 1940 ou 1950, comme Jean-Paul II en 1992.

Mais la "clarté" que vous me proposez et comme exfiltrable des mots de Pie XII que vous avez choisi : ce n'est pas une clarification de Pie XII sur la peine de mort mais plutôt sur l'autorité de l'Église en elle-même. Il n'y a rien là de nouveau. Ce n'est rien qui ne soit contesté par personne dans ce forum. Votre appel à Pie XII est ici non pertinent.

Sauf bien sûr à vouloir nous passer cette idée étrange selon laquelle un pape serait infaillible **personnellement** et peu importe ce qu'il pourrait écrire, faire dicter et peu importe dans quel document et dans quelle occasion. La force de l'enseignement traditionnel de l'Église réside justement dans le fait qu'il aura été repris, transmis et re-transmis, re-re-transmis par des saints. Ce n'est pas le cas de ce que vient de faire le pape François avec sa correction. Cette dernière n'est que le fruit de son initiative personnelle, non pas le fruit résultant d'un vaste débat entre théologiens ayant dû perdurer des siècles et où, à la fin, les fidèles (des centaines d'évêques aussi) auraient dû demander à l'Église quelle serait la véritable position de l'Église parce que tout le monde aurait été dans le vague jusque-là.

Dans votre manuel de théologie de 1920 :
If the time should ever come when the infliction of less severe penalties will suffice to punish crime and safeguard life and property, then capital punishment should be abolished, but that time does not seem to be at hand yet.
Il est dit qu'en 1920 le temps ne semblait pas arrivé pour que l'on puisse "absolument" se passer de la peine capitale. Ce temps n'était pas encore arrivé en 1920, ni au temps de Pie XII en 1946 ou 1950 manifestement. Ce temps n'était pas encore en vue non plus au temps de Jean Paul II en 1992.

Malgré l'ensemble du développement de la société moderne, entre 1920 et 1992 : rien ne serait survenu pour faire en sorte que les signataires du catéchisme de l'Église, au Vatican, sentent le besoin de corriger l'enseignement traditionnel de l'Église.

Et voici maintenant qu'entre la mort de Jean-Paul II et l'élévation de François - quoi ? en dix ou quinze ans à peine ? - voici qu'un bon fabuleux en avant pourrait enfin être réalisé. Quel progrès ! Quelques années suffisent à faire progresser la doctrine comme jamais en quinze ou vingt siècles ! Et qu'est-ce qui justifierait cela ? Quelle fantastique renouvellement et changement de société auraient dû survenir en quelques années pour expliquer la chose ?

Mais ...

En quoi le système policier ou carcéral serait-il tellement meilleur aujourd'hui qu'en 1950 ou 1920 ? C'est tellement "évident" que les prisons du Mexique sont plus idéales maintenant que celles de 1930 ? Les systèmes policier du Pérou ou de la Colombie sont bien meilleurs qu'il y a soixante dix ans ? Pareil en Haïti ? Tout est tellement sous contrôle en l'an 2000 qu'il n'y a plus de danger de voir des maniaques dangereux sévir (ou récidiver) comme on l'aura vu avec nos djihadistes en Syrie; des gaillards fort capables aussi d'opérer sur la rive occidentale comme en plein Paris et en plein jour.

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Archidiacre
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Re: La peine capitale en question

Message non lu par Archidiacre » mer. 10 juil. 2019, 13:16

Etant donné que je fais face à des habitués du forum et que je les connais assez pour savoir que la conversation est sans issue, c'est mon dernier post et j'invite les intéressés à m'envoyer des messages privés si vous voulez connaître mes réponses aux contradictions interminables à venir. Que Dieu vous bénisse. :ciao:

:arrow: Suliko: Je faisais avant tout référence aux posts qui prêchent la peine capitale actuellement sans aucune condition morale comme si l'enseignement actuel de l'Eglise ne comptait pas. Et en rejetant la position de l'Eglise, Cinci montre que mon post était au contraire tout à fait pertinent. Corrigez moi si je me trompe mais en disant "penchait généralement vers la miséricorde", vous semblez minimiser mes citations qui disent qu'elle s'impose moralement la miséricorde quand c'est possible, ce n'est pas simplement une miséricorde selon nos envies.

:arrow: Carhaix: Vous pouvez vous opposer à la conversion charitable si Dieu l'avait désirée, tout comme vous pouvez pécher si Dieu avait désiré le contraire, la conversion dans l'urgence/sous la pression n'est donc pas un argument qui justifie la peine de mort en cas d'alternatives possibles. Quant à la loi civile, l'Eglise a tout à fait le droit de se prononcer sur la question car il s'agit de morale, tout comme elle a tout à fait le droit d'appeler à l'abolition de l'avortement. Si c'était aussi simple alors n'importe quel gouvernement pourrait imposer des lois contraires à la morale sous prétexte que l'Eglise n'a pas son mot à dire.

:arrow: Cinci On a l'impression que vous feriez tout pour plier le magistère de l'Eglise à vos opinions politiques. Je doute que ce soit utile de vous répondre car vous ne semblez pas bien intentionné, je relèverai quand même des malhonnêtetés flagrantes de votre part:

Vous ne citez qu'un bout de ce catéchisme dont la suite est que s'il est possible de faire autrement, alors on ne doit pas appliquer la peine de mort:
Mais si des moyens non sanglants suffisent à défendre et à protéger la sécurité des personnes contre l’agresseur, l’autorité s’en tiendra à ces moyens, parce que ceux-ci correspondent mieux aux conditions concrètes du bien commun et sont plus conformes à la dignité de la personne humaine.
Aujourd’hui, en effet, étant données les possibilités dont l’Etat dispose pour réprimer efficacement le crime en rendant incapable de nuire celui qui l’a commis, sans lui enlever définitivement la possibilité de se repentir, les cas d’absolue nécessité de supprimer le coupable " sont désormais assez rares, sinon même pratiquement inexistants " (Evangelium vitae, n. 56).
http://www.vatican.va/archive/FRA0013/_P7U.HTM

Vous ne citez pas le catéchisme en vigueur qui interdit clairement la peine de mort à notre époque actuelle (comme si vous pouviez piocher le catéchisme qui vous plaît le mieux):
2267. Pendant longtemps, le recours à la peine de mort de la part de l’autorité légitime, après un procès régulier, fut considéré comme une réponse adaptée a la gravité de certains délits, et un moyen acceptable, bien qu’extrême, pour la sauvegarde du bien commun.

Aujourd’hui on est de plus en plus conscient que la personne ne perd pas sa dignité, même après avoir commis des crimes très graves. En outre, s’est répandue une nouvelle compréhension du sens de sanctions pénales de la part de l’État. On a également mis au point des systèmes de détention plus efficaces pour garantir la sécurité à laquelle les citoyens ont droit, et qui n’enlèvent pas définitivement au coupable la possibilité de se repentir.

C’est pourquoi l’Église enseigne, à la lumière de l’Évangile, que « la peine de mort est inadmissible car elle attente à l’inviolabilité et à la dignité de la personne »[1] et elle s’engage de façon déterminée, en vue de son abolition partout dans le monde.
http://www.vatican.va/roman_curia/congr ... te_fr.html


Vous avez maladroitement détourné les citations du Pape Pie XII qui met le magistère au dessus des théologiens:
Non, Saint Augustin et Saint Thomas ne sont pas les garants du magistère, ou du dépôt traditionnel de la foi, bien qu'ils peuvent en témoigner. C'est donc bien un faux argument d'autorité que de les utiliser comme des références sur la question alors que le magistère peut parfaitement les contredire. La fidélité aux enseignements du Pape est dû au fait qu'il exerce ce magistère, magistère que vous rejetez dès qu'il vous dérange. Vous ne pouvez donc pas dire qu'un saint était d'un autre avis pour justifier de rejeter l'avis du magistère. Vous ne pouvez pas suivre St Jean-Paul II (quoique superficiellement, car il expliquait bien que la peine de mort devait être évitée au maximum et qu'elle était rarement sinon jamais nécessaire) et ne pas suivre le Pape François sous son pontificat sans tomber dans l'hypocrisie.

Vous esquivez les citations de Pie XII en leur donnant une utilité que je n'ai jamais invoqué
Les citations du Pape Pie XII sont là pour vous rappeler que l'obéissance est due au Pape même quand ses ordonnances sont faillibles, et c'est exactement ce que vous contestez en le défiant et en disant que le Pape n'est pas infaillible en tout: ça n'est en rien une justification catholique traditionnelle pour désobéir. En plus de cela, vous dressez une fausse opposition entre lui et le Pape François sur l'immoralité intrinsèque de la peine de mort, or c'est complètement faux, car le Pape François fait un jugement temporel et disciplinaire en décidant d'interdire la peine de mort à l'heure actuelle. Il ne dit pas que la peine de mort est intrinsèquement immorale. A l'inverse, le Pape Pie XII n'a jamais dit non plus que la peine de mort devrait être autorisée en tous temps y compris 70 ans plus tard.

Et si votre intention malhonnête est de dire "je ne dois pas consentir à la discipline actuelle car la discipline passée autorisait la peine de mort", sachez que Pie XII condamnait ce comportement chez les schismatiques en disant que seul la discipline en vigueur importe:
28 Nous savons bien, hélas ! que pour légitimer leurs usurpations, les rebelles se réclament de la pratique suivie en d'autres siècles, mais il n'est personne qui ne voie ce que deviendrait la discipline ecclésiastique si, en telle ou telle question, il était permis à n'importe qui de reprendre des dispositions qui ne sont plus en vigueur parce que la suprême autorité de l'Eglise en a décidé autrement depuis longtemps. Bien plus, le fait d'en appeler à une discipline diverse, loin d'excuser leurs actes, prouve leur intention de se soustraire délibérément à la discipline actuellement en vigueur, la seule qu'ils doivent suivre : discipline qui vaut non seulement pour la Chine et pour les territoires d'évangélisation récente mais pour toute l'Eglise ; discipline qui a été sanctionnée en vertu du pouvoir suprême et universel de gouvernement qui fut conféré par Notre-Seigneur aux successeurs de l'apôtre Pierre.
http://www.clerus.org/bibliaclerusonline/fr/i3e.htm#c


Vous calomniez le Pape François en disant que ça n'est qu'une initiative personnelle, mais c'est faux, il a fait appel à la congrégation sur la doctrine de la foi et n'a jamais établi de changement seul
http://www.vatican.va/roman_curia/congr ... te_fr.html
J'ajouterai que même si ça n'était que sa propre initiative, ça ne justifierait aucune désobéissance à sa discipline. Le Pape Pie X a pris des initiatives contestées de son temps et sa qualité de Pape lui en accordait totalement le droit:
blog.adw.org/2017/09/strange-moments-liturgical-history-paragon-liturgical-tradition-may-caused-unintended-effects/
Votre argument selon quoi le Pape pourrait être dissocié du magistère alors qu'il en est le chef suprême est donc fallacieuse / mensongère.

Vous faites semblant de ne pas voir une progression dans la position de l'Eglise
Jean-Paul II, dans le catéchisme que vous avez tronqué dit que " les cas d’absolue nécessité de supprimer le coupable " sont désormais assez rares, sinon même pratiquement inexistants", et c'est clairement un progrès vis à vis de ce qu'enseignait Pie XII. Par ailleurs, il n'existe PAS de règle qui interdit à un Pape de changer, même radicalement, une discipline, et c'est à croire que vous seriez prêt à en inventer si ça pouvait justifier votre haine des ordonnances de l'Eglise.

Vous prétendez que votre désaccord politique vous permet de rejeter la position de l'Eglise, alors que c'est faux:
Même en donnant tous les arguments du monde, ce n'est absolument pas par votre libre examen que vous pouvez juger d'une telle décision. Pas même si vous étiez un théologien, comme l'enseignait la congrégation pour la doctrine de la foi sous Jean-Paul II:
27. Même si la doctrine de foi ne lui apparaît pas être en cause, le théologien ne présentera pas ses opinions ou ses hypothèses divergentes comme s'il s'agissait de conclusions indiscutables. Cette discrétion est commandée par le respect de la vérité ainsi que par le respect du Peuple de Dieu (cf. Rm 14, 1-15; 1 Co 8; 10, 23-33). Pour les mêmes raisons, il renoncera à leur expression publique intempestive. [ce que vous faites Cinci, rendez vous à l'évidence]

28. Ce qui précède trouve une application particulière dans le cas du théologien qui aurait de sérieuses difficultés à accueillir, pour des raisons qui lui paraissent fondées, un enseignement magistériel non-irréformable.

Un tel désaccord ne pourrait être justifié s'il se fondait seulement sur le fait que la validité de l'enseignement donné n'est pas évidente, ou sur la persuasion que la position contraire est plus probable. De même, le jugement de la conscience subjective du théologien ne saurait suffire, car celle-ci ne constitue pas une instance autonome et exclusive pour juger de la vérité d'une doctrine.

29. Jamais en tout cas ne pourra manquer une attitude fondamentale de disponibilité à accueillir loyalement l'enseignement du Magistère, comme il convient à tout croyant au nom de l'obéissance de la foi. C'est pourquoi le théologien s'efforcera de comprendre cet enseignement dans son contenu, dans ses raisons et dans ses motifs. À cela il consacrera une réflexion approfondie et patiente, prompt à revoir ses propres opinions et à examiner les objections qui lui seraient faites par ses pairs.
http://www.vatican.va/roman_curia/congr ... on_fr.html

En partant de là, je ne vois même pas l'intérêt de répondre au dernier paragraphe, vu que vous ne faites pas de poids sur cette décision et que votre devoir est au mieux d'humblement garder votre désaccord comme hypothétique. En plus, c'est un homme de paille car personne n'a dit que les conditions propices à l'abolition étaient partout. Cependant, étant donné que les réformes carcérales en questions peuvent être développées par ces pays, ce qui éviterait d'appliquer la peine de mort, alors c'est leur devoir de le faire. Cela revient exactement au même.
Et oui, votre vision statique du milieu carcéral est caricaturale, je vois pas pourquoi vous prétendez avoir la science infuse sur les prisons du monde et leur histoire (à moins que vous connaissiez des historiens qui disent que le système carcéral n'a pas progressé du tout en un siècle dans vos pays en question). Il y a toujours et encore des réformes carcérales pour améliorer les prisons:
Au mexique: http://www.law.northwestern.edu/academi ... eforms.pdf
A Haiti: https://issat.dcaf.ch/fre/Apprendre/La- ... ule-of-Law
En amérique latine en général:
https://www.unodc.org/unodc/fr/frontpag ... bbean.html
En Europe et aux Etats-Unis:
https://en.wikipedia.org/wiki/Prison_reform
Dans le monde:
The role of technology in criminal justice and prison systems, such as the use of ‘telemedicine’ to provide mental healthcare and treatment, and the rise in access to online education and training.
The expansion of prison alternatives, including community service orders and electronic monitoring, and a growing trend in the use of restorative justice.
https://www.penalreform.org/resource/gl ... ends-2018/

En cas de doute, le Pape Pie XII dit qu'il est plus juste de faire confiance en priorité au magistère, vous ne faites de toutes évidence confiance qu'en vous même et votre prétention à la compréhension du système carcéral dans le monde. Je rappelle le contexte de ma position au cas où on chercherait encore à l'esquiver:
Si comme théologiens ils sont activement intéressés à l’ « orientation » et utilisent des arguments théologiques scientifiques, on aurait pu se demander si c’est la parole des théologiens ou celle du magistère de l’Eglise qui a le plus de poids et offre une meilleure garantie de vérité. A ce propos, on lit dans l’encyclique Humani generis : Quod quidem depositum (fidei)… nec ipsis theologis divinus Redemptor concredidit authentice interpretandum, sed soli Ecclesiae Magisterio… Quare Decessor Noster imm. mem. Pius IX, docens nobilissimum theologiae munus illud esse, quod ostendat quomodo ab Ecclesia definita doctrina contineatur in fontibus, non absque gravi causa illa addidit verba : eo ipso sensu, quo ab Ecclesia definita est6. Donc pour la connaissance de la vérité, ce qui est décisif ce n’est pas l’opinio theologorum [l’opinion des théologiens] mais le sensu Ecclesiae [le sens de l’Eglise]. Sinon ce serait faire des théologiens presque des magistri Magisterii [timoniers du Magistère] ; ce qui est une erreur évidente.
http://www.clerus.org/bibliaclerusonline/es/cl5.htm

Bonne journée.
Chaîne Youtube: https://www.youtube.com/c/Archidiacre

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Suliko
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Re: La peine capitale en question

Message non lu par Suliko » mer. 10 juil. 2019, 14:40

Si je comprends bien, Archidiacre, vous êtes en train de nous dire que François à le droit d'enseigner que la peine de mort est intrinsèquement immorale ? Car en disant qu'elle est contraire à la dignité de l'homme et qu'il faut lutter partout pour son abolition, c'est exactement ce qu'il fait. Et bien moi, je vous réponds que cette position n'est pas traditionnelle et est intenable face aux multiples écrits du passé qui disent exactement le contraire. Et je ne suis pas la seule à le penser. Si vous pensez que je suis donc une irréductible schismatique, pourquoi donc vous fatiguer à débattre avec moi dans une conversation que vous considérez de toute façon "sans issue" ? Mon but était ici simplement de rappeler que l'enseignement traditionnel de l'Eglise, que François contredit (on commence à être habitué...). Chacun en tirera les conclusions qu'il veut bien sur le sujet.
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: La peine capitale en question

Message non lu par Carhaix » mer. 10 juil. 2019, 16:28

.
Dernière modification par Carhaix le dim. 14 juil. 2019, 2:27, modifié 1 fois.

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