De l'art contemporain

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Que pensez vous de l'art contemporaine (la peinture)

Ca m'indiffère
4
29%
C'est génial
4
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C'est la décadence
2
14%
Génial et décadent
4
29%
 
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Jean-Pierre DALIBOT
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Contemporain...

Message non lu par Jean-Pierre DALIBOT » mar. 25 janv. 2005, 9:35

Je ne sais ma préférence. Mais a regarder les quelques tableaux représentés je pense actuellement à une exposition que l'on va mettre en place cette année au Prieuré d'Airaines dans la Somme. Jean-Michel BACQUET. L'on peut le trouver sur
http://www.jean-pierre-dalibot.net - page agenda et ensuite Prieuré d'Airaines.

Dans toutes les époques il y a des artistes qui sont un peu plus que ceux "du dimanche"

MB
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Message non lu par MB » mar. 25 janv. 2005, 16:00

Bonjour

Euh, je crains que les questions du sondage soient mal posées... Les options proposées ne correspondent pas au "panel" d'opinions possibles.

Cher Charles, j'attends aussi le commentaire que vous ferez des échantillons que vous nous avez montrés. Je vous attends au tournant ! :)

Cordialement

MB
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Message non lu par MB » mer. 26 janv. 2005, 20:52

Bonsoir Charles (ou bonjour, je ne sais pas...)

Ce que vous dites et montrez est très intéressant, et on aurait beaucoup de choses à dire....

1° Il y a de tout dans les oeuvres d'art que vous avez présentées dans le premier message : les sculptures sont très bien (désolé de donner ces commentaires aussi bêtement, d'une manière aussi peu détaillée, mais c'est une question de modestie, la prose sur l'art est un exercice très difficile.... j'espère que vous ne m'en voudrez pas).
Pour les peintures, c'est autre chose. Il y a de la veine expressionniste dans les portraits, l'un des deux me fait penser à plusieurs choses datant des années 20 ; j'dis pas non, pour parler comme Séraphin Lampion, cela dit, entre nous, je ne trouve pas qu'ils fassent beaucoup avancer le schmilblick.
Mais là où ça ne va pas, c'est avec le paysage. Je ne veux pas vous blesser (et j'ai plusieurs fois réédité ce message pour éviter cela), mais franchement, il n'est pas bon du tout, et pas intéressant. Si vous connaissez l'artiste en question, si vous aimez ce qu'il/elle fait, il serait peut-être bien, dans la mesure du possible, d'en montrer autre chose. Vous ne pouvez pas tout trouver sur la Toile : mais si vous avez des liens des artistes dont vous parlez, j'irai voir avec plaisir (ou au moins leurs noms ?).

Les sculptures, plus je les regarde, sont vraiment très bien ; mais ce qui me chagrine un peu, c'est que ces peintures ont un goût de déjà-vu (et même un petit peu les sculptures, finalement...). A en voir certaines, on devine que vous aimez les oeuvres expressionnistes, très bien, moi aussi, mais bon... pourquoi continuer dans cette veine si longtemps ? so what, a-t-on envie de dire.
J'avais vu récemment, dans un catalogue d'expo de jeunes artistes un peu en marge du monde parigot à la Sophie Calle, une section comportant des oeuvres tout à fait dans le style des peintres abstraits des années 1910-1920. C'était bien fichu, léché, bien construit, et parfois beau, mais là encore, quel intérêt ? C'est comme si on continuait d'écrire le mieux du monde des sonnets dans le style de Hérédia. (ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit : je n'ai pas réclamé un happening scatologique non plus ! il y avait aussi des très bons trucs dans d'autres endroits du catalogue)
Question : il se trouve que toutes les oeuvres que vous avez montrées sont figuratives. Appréciez-vous des choses d'un autre ordre ?

(comme il faut contribuer aussi, je cherche également dans mes papiers d'autres artistes dont j'ai vu qqs réalisations... je finirai bien par trouver qqch de montrable ici !)

2° Dans votre deuxième message illustré, j'ai l'impression que vous avez présenté des oeuvres de diverses époques avec un commentaire polémique... à quel sujet ?
Il faut se méfier aussi quand on montre des oeuvres de l'Antiquité : vu comme ça, le temple de Saqqara fait penser à du style "administratif" des années 30, et ne manque pas d'élégance ; mais qu'est-ce qui nous dit que cette construction avait effectivement l'aspect qu'on lui voit ? quid des peintures, tentures, orfèvrerie, etc., et de la restauration ?)... cela vaut aussi pour la belle pièce cycladique que vous montrez ; ou aussi, en général, pour ce que nous connaissons de l'Antiquité (nous n'apprécions des temples grecs que leur squelette, et c'est seulement de ce squelette que nous nous sommes inspirés).
Il faut donc être prudent avec d'aussi anciennes réalisations, et éviter de nous en sentir trop proches - les Egyptiens, les Grecs, les Egéens, les Romains, etc. nous sont aussi étrangers que les Papous ou les Nambikwara. Nous nous sommes inspirés de ce qui restait de leurs oeuvres tel que nous le voyions ; mais c'est notre goût, pas le leur, que nous cherchions en elles et qui nous dictait notre comportement : le Parthénon, à l'époque de Xénophon, n'avait pas du tout le même aspect, et je ne suis pas du tout sûr qu'il nous plairait ainsi.


... quant à l'archtitecture moderne... faites attention ... dans ce domaine, il y a de quoi être particulièrement réac ! lol (on peut en reparler plus tard)
:twisted:
A bientôt
MB

MB
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Message non lu par MB » jeu. 27 janv. 2005, 17:27

Bonjour

Tout d'abord, ne nous fâchons pas... c'est drôle, souvent, quand nous nous parlons, ça tourne plus ou moins au vinaigre. J'ai fait un petit effort dans mon message, en m'y reprenant à plusieurs fois (j'ai effacé un commentaire "peu charitable" du paysage en question), alors par pitié, faites de même.

Je vous cite : "Oui, l'art fait souvent penser à l'art d'aujourd'hui. On dit en parlant de telles oeuvres du passé "comme c'est moderne", mais rarement en parlant d'oeuvres modernes "comme c'est antique !"... quand il y a ressemblance. C'est cela qui m'agace un peu, cette ethnocentrisme temporel. Et d'ailleurs d'une temporalité factice, celle de l'avant-gardisme."
Tout à fait d'accord avec vous.

- Pour en revenir aux tableaux du peintre en question - je suis heureux que vous ayez montré autre chose. Le premier tableau est très chouette, et me plaît beaucoup plus (j'aime beaucoup le jeu avec la filiation d'après Cézanne et Pissarro) ; il semble que l'artiste se soit plus, comment dire, "lâché", là-dedans. Je ne reviens pas sur le deuxième. Le dernier est effectivement très bien, c'est le meilleur même, "il y a de la vie", il y a la perception de l'atmosphère vécue et ressentie (c'est mal dit, j'espère que vous me comprenez ; c'est la chose qui me paraît signaler les bons tableaux de paysage). Ca doit certainement être encore mieux en direct ; où peut-on trouver des galeries, des centres, qui exposent ?

[de mon côté, origines obligent, j'ai mes habitudes dans une galerie près de Beaubourg, la galerie Koralewski rue Quincampoix à Paris ; je pense notamment à une artiste qui vit en Normandie, Malgorzata Paszko, très, très chouette ; je tâcherai de trouver des liens]

- Ensuite, cessez de me qualifier d'avant-gardiste ou de je ne sais quoi. J'aime ce qui est bon, de quelque époque que ce soit, j'aime l'antique, le médiéval, le roman, le gothique, le renaissance, le maniériste, le baroque, etc.
Si je vous dis que plusieurs de ces oeuvres "ne font pas avancer le schmilblick", cela ne signifie pas que je ne souhaite que du nouveau. La question n'est pas là ; il me semble que le problème du "nouveau" ou de "l'ancien", ou de "l'éternel", ou de "l'intemporel", ne se pose pas dans le domaine artistique, ou du moins pas des manières qu'on suit habituellement. Il y a ce qui est bon, et ce qui ne l'est pas ; il y a ce qui révèle quelque chose, et ce qui ne révèle pas. Dans le cas de plusieurs des oeuvres de ces artistes dont vous avez parlé, on trouvait (à côté des sculptures qui elles sont effectivement très bien) des tableaux bons, des trucs de pros, pour ainsi dire, mais qui de mon point de vue ne révélaient rien. Le dernier tableau, celui dont je parle un peu plus haut, lui, révèle quelque chose, il parle, il vit ; mais pour le reste, ça ne marche pas à tous les coups, voilà tout.

C'est pour cela qu'il ne me paraît pas utile, ou intéressant, ou ce que vous voudrez, de continuer dans une veine artistique précise longtemps après qu'elle s'est dissoute ; je vous ai parlé de pastiches de sonnets de Hérédia ; on pourrait parler d'autre chose : par exemple, un meuble de Riesener est une oeuvre d'art ; un meuble d'aujourd'hui de style Riesener est un beau meuble et c'est tout. Une église gothique du 13ème siècle est ce qu'elle est ; une église néo-gothique du 19ème, malgré tout ce qu'on veut, même si elle est très réussie (il y en a), ne sera jamais aussi bien. Après, on peut s'inspirer du passé, on peut y trouver des maîtres, et c'est ce qu'on fait ; mais c'est pour créer soi-même des choses qu'un autre n'a pas créées et n'aurait pas pu créer.

Vous parlez de cette faculté de se communiquer à tous qu'aurait l'oeuvre d'art authentique ; et à l'appui de votre idée, vous citez le cas du marchand d'art camerounais. Il faudrait que vous donniez des exemples d'oeuvres qui l'ont concerné et ont plu aussi à ses clients américains.
Comment expliquer leur entente ? C'est très simple :
1° parce que personne n'est enfermé dans son identité (ce n'est pas parce qu'on est camerounais qu'on ne peut pas comprendre ce que comprennent les autres) ; toute culture est au moins partiellement communicable.
2° parce que nous vivons dans un monde globalisé, où les goûts de chaque pays ou de chaque culture peuvent être examinés et appréciés d'un bout à l'autre de la planète. Cela n'est pas nouveau, évidemment (estampes japonaises à la fin du 19ème, tableaux hollandais en Italie au 15ème siècle, etc.).

Mais je reviens sur cette question de communicabilité. Vous dites en substance : nous nous retrouvons dans certaines oeuvres d'autrefois. Ben justement, c'est là le problème : c'est nous qui nous retrouvons dans ces oeuvres. Le goût n'est pas une chose autonome ou désincarnée. Il naît dans une culture où il se forme d'une certaine manière, et lorsque les tenants de ce goût en viennent à découvrir ou redécouvrir un art d'un autre lieu ou d'un autre temps, c'est que cet art, vu par eux, répond à ce moment à plusieurs de leurs aspirations. Les primitifs italiens ont mis un temps fou à être appréciés de nouveau : pourquoi ? pourquoi à un certain moment du 19ème, et pas avant ? Vous dites en substance, si je vous lis bien, qu'il y a qqch dans l'art qui lui fait dépasser les temps et les lieux, et vous citez plusieurs oeuvres en exemple : je veux bien, mais ces oeuvres, il a fallu qu'on les redécouvre ; il a fallu qu'on s'y intéressse ; pourquoi l'a-t-on fait à tel moment et pas avant ?
Nous aimons ce qui reste du temple de Saqqara (dans sa restauration, donc dans une vision moderne et a posteriori, ne l'oublions pas !), parce que sa beauté nous dit quelque chose, elle nous parle dans un langage que nous pouvons comprendre parce que nous y avons été formés ; autrement dit, elle rentre dans les catégories de notre culture, là, présentement. Elle répond donc à nos aspirations ; mais ces aspirations sont une question de contexte : il suffirait que nous n'y ayons pas été formés, et alors le temple de Saqqara ne nous dirait rien. Par ailleurs, dans la formation de notre culture architecturale, le temple de Saqqara existe déjà, nous l'avons vaguement en tête ; donc nous tournons en rond...

Restons encore à l'exemple de l'art antique. Ex. le Parthénon, même si ce peut être autre chose. Nous aimons le Parthénon, il est magnifique, etc. et c'est vrai. Mais nous n'en voyons que la colonne vertébrale, les colonnes, le fronton, les frises, etc. ; nous le voyons sans couleur et sans décoration. Dans un contexte antique, cela n'aurait aucun sens : le temple était bariolé, les sculptures étaient peintes, et nous n'aimerions pas forcément ; il faudrait imaginer les tentures tendues entre les colonnes (donc les tissus, les motifs, les couleurs, certainement très vives), les forêts de statues (peintes) et de dédicaces, les guirlandes, les bucranes, le sang des sacrifices, etc. Autant dire que ce temple n'avait pas du tout la même tête. Nous l'adorons dans son état contemporain, il nous inspire et nous donne une idée de la perfection architecturale ; cette perfection se voit dans des constructions contemporaines (Mies van der Rohe p. ex.). Mais en fait nous le préférerions dans son état présent : c'est donc un aspect particulier du Parthénon qui nous touche, et qui donne accès à quelque chose que nous cherchions déjà en lui. Avant que le Parthénon ait formé notre goût et nous ait inspirés, il ait fallu que nous ayons eu une vague idée de ce que nous cherchions en lui.
Donc, ok pour parler de l'éternité de l'art, etc., mais en sachant prendre du recul sur notre vision, savoir qu'elle est historiquement constituée, et qu'aucun art ne doit être sorti de son contexte ; vous aimez les oeuvres qui sont pleines de vie, d'énergie, de chair, et moi aussi - mais justement, cette chair, il ne faut pas l'oublier.


- Petit point, encore : vous parlez des artistes "réactionnaires" de la Renaissance. Oui et non ; ils sont littéralement réactionnaires, oui, mais uniquement dans leur discours, parce qu'ils ont dit s'inspirer de l'Antiquité ; en fait ils ont inventé qqch de complètement nouveau, avec quelques éléments du langage artistique des Anciens, sans parler de ce que leur permettaient leurs ressources techniques qui étaient bien meilleures. Je vous mets au défi de trouver du Michel-Ange dans l'art antique.
S'ils ont rejeté l'art gothique (et encore, ils l'ont fait assez tard - en plus, ce sont sourtout les néo-classiques qui l'ont fait), ce n'est pas par ignorance ; ils savaient très bien comment cet art fonctionnait, comment il tenait, ses caractéristiques techniques (sauf mauvaise foi), etc. La preuve, c'est qu'on était encore capable de construire du gothique tardif au 17ème siècle. Tout simplement, l'art gothique ne correspondait plus à leurs aspirations.

Vous parlez du gothique comme d'un art "moderne" : de fait, ça dure longtemps, c'est très haut, c'est extraordinairement bien conçu, ça résiste aux bombes alliées en 1945, c'est beaucoup mieux que ce que pouvaient faire les Grecs et les Romains, c'est transparent au sens où ça nous fait penser à des réalisations contemporaines (mur de verre, architecture de piliers, etc.), etc. Je suis d'accord avec vous, et comme vous, j'aime. Mais il faut croire que cela n'intéressait plus les intellectuels de la Renaissance, pour des raisons qui étaient les leurs ; et que si jamais ils avaient une conception de la modernité, eh bien les critères du gothique n'y rentraient plus.
Il y a eu un beau film récemment, d'E. Olmi, Le Métier des Armes, qui se passe en Italie en 1526 - un des rares films historiques qui aient reçu l'assentiment des historiens. On y voit des cadres gothiques, romans, médiévaux ; mais tout d'un coup, l'on y trouve le duc de Mantoue se détendre en parcourant la galerie Renaissance toute neuve de son palais : et alors elle apparaît comme une sorte de paradis, d'îlot en dehors du monde, de nouveauté, de lieu de bonheur. C'était peut-être cela qui comptait.

Bon, je suis bavard, je me calme.
:arrow: Au fait, un beau musée virtuel, très bien fourni : http://www.wga.hu/

Au plaisir de vous lire

MB

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Message non lu par MB » mar. 01 févr. 2005, 13:14

Bonjour Charles

Je ne sais plus par où commencer pour vous répondre...

Enfin, reprenons quelques points de détail : pour la peintre que j'ai indiquées, ellel peint entre autres à l'acrylique, oui, mais avec une technique un peu particulière que j'aurais du mal à expliciter (disons que ça rend la peinture un peu plus ténue, plus délicate).

- Vous avez cité le bâtiment du Panthéon, on aurait pu le dire en effet (en écrivant ma réponse, j'avais pensé à l'église St-Eustache près des Halles à Paris). Mais de fait, quoiqu'on y réemploie des techniques gothiques, ce n'est pas un bâtiment de style dit gothique. Donc cette ascendance n'est pas revendiquée.


- Sur ce que vous dites du Parthénon, quand je pense que son squelette actuel n'avait pas le même aspect à l'époque, pour tout un tas de raisons - en vous citant : "Vous croyez vraiment ? La nudité contemporaine du parthénon rend accessible au plus grand nombre ses accords fondamentaux que seul peut-être un petit nombre voyait sous les décorations qui sont aujourd'hui tombées... mais elle ne les crées pas ni ne les altère."
Pour pouvoir le dire, il faut le prouver, c'est-à-dire examiner si les sources le disent explicitement. J'irai faire un tour chez Pausanias et Vitruve, pour commencer par eux, et je vous dirai ce que j'ai trouvé (laissez-moi juste un peu le temps...) ; s'il n'y a rien dans votre sens, votre affirmation n'est pas fondée (et vice-versa de mon côté).

- Sur ce que vous dites de la finesse, je voudrais tout simplement vous inciter, justement, à plus de retenue. Votre interlocuteur peut ne pas tout dire, non par manque de réaction, mais par pauvreté d'expression. La langue contemporaine, telle qu'on nous la transmet (ce qui reste de l'école, TV, pub, etc.), nous devient de plus en plus étrangère à nous-mêmes, elle est de plus en plus inapte à retranscrire notre pensée ; alors soyez patient.
Vous avez été formé à manier précisément le langage philosophique et artistique, et moi, un peu moins ; après, cela ne veut pas dire que je sois incapable de la finesse dont vous parlez. Imaginez que quelque chose de presque inexprimable me tienne à coeur, que j'essaie de le dire : mais, comme il faut être très fort pour exprimer tout cela, je n'y arrive pas, je ne parviens qu'à sortir des banalités. N'est-ce pas déprimant ? Vous comprendrez donc que je ne dise pas tout.

Et d'ailleurs, la finesse, la brise légère, le "paroxystique", qu'est-ce que cela veut dire ? le vers le plus simple, le plus élégant, la phrase la plus badine, peuvent traduire la plus grande horreur. On pourrait dire la même chose avec la musique : vous citez Bach, vous citez ses interprétations, et vous avez raison ; mais on pourrait trouver tel ou tel compositeur dont un accord, dont une phrase senties, et particulièrement raffinées - ou au contraire particulièrement "simples" -, suscitent en vous des tremblements "primaux".

A l'inverse, dans l'univers artistique qui mêle le plus sauvagement les passions, les formes, etc. on peut trouver un vrai dépassement, une autre dimension. Ce n'est pas forcément de la dégoulinure ; les fresques de la ch. Sixtine sont-elles de la dégoulinure ? pourtant, elles frappent, elles marquent. J'ai vu sur un autre fil de ce salon que vous n'étiez pas un fan du retable d'Issenheim ; pour l'avoir vu (comme vous sûrement), je peux vous dire que c'est inoubliable, mais que ce tableau n'a rien de "démagogique". La finesse consiste aussi à reconnaître la grandeur et la force là où elles peuvent être. Peut-être craignez-vous que le contact aux oeuvres les plus "dégoulinantes", comme vous dites, ne finisse par gâter le sens artistique, et finisse par rendre invisibles bien des choses plus délicates : rassurez-vous, c'est le contraire. Plus on voit, plus on voit ; et plus on est exigeant.
Je suis aussi capable de sentir la brise légère, mais peut-être dans d'autres choses que vous, innombrables ; seulement, je ne le dis pas. Vous aurez d'ailleurs remarqué que j'apprécie énormément l'un des tableaux que vous avez montrés (le dernier, qui me va droit au coeur) ; si je ne réagis pas à l'autre, c'est peut-être qu'il y a une différence ? Ou alors - soyons consensuels - c'est la retranscription par écran d'ordinateur qui lui fait perdre toute sa délicate saveur, et dans ce cas, il faut que je prenne l'avion pour NY. Au fait, comment s'appelle le peintre ? Si jamais il expose à Paris, je saurai où aller.

- pour finir. Vous avez vu que j'étais un peu agacé en vous lisant. On est bien sûr persuadé de votre bonne foi - pas de souci - mais tout simplement votre manière de répondre a quelque chose d'agressif. Peut-être est-ce une méthode pour obliger votre interlocuteur à "cracher" ce qu'il pense vraiment ? Si c'est le cas, sachez que parfois vous pouvez en tirer des résultats contraires (j'ai un très mauvais souvenir du débat, par ailleurs, sur la Géorgie).
Je serais très curieux de voir les commentaires "peu charitables" que vous m'aviez réservés, et que vous avez finalement effacés ; est-ce le mot "expressionniste" qui vous a gêné (je n'avais pensé qu'à deux oeuvres présentées, en le disant) ? On peut voir ça en privé, je vous pardonne d'avance ! :cool:

Bien à vous

MB
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Message non lu par MB » mar. 01 févr. 2005, 13:32

Cher Charles,

Une remarque en passant (mais cela pourrait donner lieu à un autre fil). Je cite votre commentaire sur la Renaissance, et celui de Paul Claudel.
Bien sûr, je suis d'accord avec vous. Je voulais seulement évoquer la possibilité d'une autre Renaissance que celle qui nous est souvent proposée - un retour à la lumière "après l'obscurantisme médiéval", et qui me semble complètement injuste. Disons que j'ai été un peu provocateur sur cette question là. J'aime beaucoup ce que dit Claudel de la Renaissance, insistant sur la constance de la modernité catholique dans le sillage des innovations du Moyen-Age :

"Je considère la Renaissance comme l'une des périodes les plus glorieuses du catholicisme, celle où l'Evangile termine ses conquêtes dans l'espace et dans le temps, où, attaquée dans un petit coin par les hérétiques, l'Eglise se défend avec l'univers, où les humanistes retrouvent l'antiquité pendant que Vasco de Gama retrouve l'Asie, que Christophe Colomb voit un monde nouveau jaillir pour lui du fond des eaux, que Copernic ouvre la Bible du ciel, que Don Juan d'Autriche refoule l'Islam, que le Protestantisme est arrêté à la Montagne Blanche et que Michel-Ange élève la courronne de Saint-Pierre."


D'abord, Claudel est un peu fourre-tout (d'habitude, les catholiques de son époque haïssaient la Renaissance parce qu'ils la jugeaient responsables de la Réforme - enfin, remarquez, ça montre ici que Claudel a une plus grande largeur de vue - ; il faudrait voir également, je le dis sans vérifier, le comportement de l'Eglise catholique du XVIème siècle vis-à-vis des thèses de Copernic ).
Ensuite, je trouve qu'il n'y a aucun sens, et même aucun intérêt, à vouloir donner un parfum particulier à telle ou telle époque (à charge à chacun de la périodiser, en plus). Ce parfum, cette ambiance, n'existent que dans notre tête et dans les reconstructions historiographiques. Vous n'appréciez guère la reconstitution historiographique, un peu démodée soit dit en passant, qui veut que le Moyen Age ait été une période obscure. Vous avez raison : mais vous ne devez pas la critiquer pour simplement la remplacer par une autre. L'histoire, ce n'est pas une ambiance, un sens particulier, un parfum - ce sont des êtres humains qui agissent, et qui auraient pu faire autrement que ce qu'ils ont fait.

Autre chose : Claudel met dans le même sac bataille de Lépante et bataille de la Montagne blanche. Je suppose qu'il en tire implicitement la conclusion de la "reconquête du monde" par l'Eglise, etc.
Or ces deux événements sont séparés par presque une cinquantaine d'années (donc, sauf exception, ne concernent pas les mêmes individus, qui n'ont pas les mêmes mondes, et donc pas les mêmes raisons d'agir). En plus, la Montagne blanche ne rentre pas dans la périodisation habituelle de la Renaissance ; ce qui montre le peu d'utilité de ce genre de démarches. Autrement dit, Claudel a mis ensemble deux événements qui semblaient lui montrer la ré-ascension irrésistible de l'Eglise, suivant une démarche pré-établie.
Manque de pot, ce qui a permis la bataille de Lépante, ce fut une alliance politique de court terme (sitôt dissoute après la fin des combats, cf. le comportement des Vénitiens) provoquée par un événement politique et non religieux (la prise de Chypre). Par ailleurs, les vainqueurs de la Montagne blanche n'étaient pas tous catholiques - et à l'inverse, parmi les vaincus, il y avait aussi des catholiques ; cette bataille est avant tout d'origine politique (un prince contre un autre). Le déroulement des combats a certes été livré à l'instigation d'un moine mystique, un peu surgi de nulle part ; mais il a fallu qu'il motive les combattants qui à l'origine n'étaient pas du tout chauds pour livrer bataille. S'il avait donc eu une indisposition ce jour-là... Enfin, je trouve absurde de considérer cet événement de manière positive - c'est une bataille qui marque le début de trente ans d'une guerre atroce, et dont la conclusion - les traités de Westphalie - a été peu appréciée par la Papauté.
Donc Claudel a plutôt fait joujou avec la légende des événements. Je n'en vois pas l'intérêt.

Bien à vous

MB
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Message non lu par MB » mar. 01 févr. 2005, 20:28

C'est re-moi !
Charles a écrit :
MB a écrit : Et d'ailleurs, la finesse, la brise légère, le "paroxystique", qu'est-ce que cela veut dire ? le vers le plus simple, le plus élégant, la phrase la plus badine, peuvent traduire la plus grande horreur. On pourrait dire la même chose avec la musique : vous citez Bach, vous citez ses interprétations, et vous avez raison ; mais on pourrait trouver tel ou tel compositeur dont un accord, dont une phrase senties, et particulièrement raffinées - ou au contraire particulièrement "simples" -, suscitent en vous des tremblements "primaux".

A l'inverse, dans l'univers artistique qui mêle le plus sauvagement les passions, les formes, etc. on peut trouver un vrai dépassement, une autre dimension. Ce n'est pas forcément de la dégoulinure ; les fresques de la ch. Sixtine sont-elles de la dégoulinure ? pourtant, elles frappent, elles marquent. J'ai vu sur un autre fil de ce salon que vous n'étiez pas un fan du retable d'Issenheim ; pour l'avoir vu (comme vous sûrement), je peux vous dire que c'est inoubliable, mais que ce tableau n'a rien de "démagogique".
Je ne sais pas si on est d'accord, pas d'accord... Je crois qu'on s'est mal compris. Pour moi le démagogique c'est Amélie Poulain et la publicité pour l'assurance et la banque avec des femmes enceintes ou qui accouchent et des valses de Sibélius... Démagogique dans le sens où le directeur du train fantôme pousserait à fond le volume des cris de monstres pour que tout le monde et les sourds et les blasés soit une fois de plus surpris... Il y a une telle surenchère dans les avant-gardes qui ont compris que le la violence remuait les tripes du public et donc qu'il fallait en rajouter dans le sexe, le viol, la pornographie, le sado-masochisme, le suicide, la mutilation, le meurtre, la charogne, etc. pour bien émouvoir et à coup sûr le public... Et les dégoulinures dont je parle sont devenues de simples et automatiques garanties d'authenticité de l'art de l'artiste qui est forcément libre.
On est d'accord, il n'y a pas de souci. Enfin, Amélie Poulain, ça n'est pas bien méchant... on a pu être porté à apprécier pour la simple raison que Kaganski (le grand inquisiteur des Inrocks), avait en substance qualifié ce film de lepéniste. Esprit de contradiction, quand tu nous tiens... Un film sympathique, ça se laisse regarder avec plaisir ; un happening scatologique, non.

Bien à vous

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Message non lu par thomasthomas » ven. 24 févr. 2006, 22:45

Bonjour Charles , de toute manière , on ne peut meme pas appeller ça de l'art .
L'art a rendu l'ame au début du 20 ème siècle.

Que Dieu vous benisse

Charles
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L'art et l'essai...

Message non lu par Charles » ven. 24 févr. 2006, 22:53


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Message non lu par thomasthomas » ven. 24 févr. 2006, 23:00

J'avoue que j'ai mis 5 minutes pour comprendre que c'était un tableau .
Je cherchais un lien en me disant " mais y rien à voir sur son lien" et d'un coup je me suis aperçu qu'il y avait un cadre , et donc qu'il n'y avait vraiment rien à voir.
J'espère que la personne qui a fait ça n'est pas fière d'elle.
Au moins j'aurais rigolé , j'en rigole encore tout seul.

Merci pour ce moment de détente Charles.
Si vous en avez encore du meme genre , ne vous génez pas.

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Message non lu par Hélène » ven. 24 févr. 2006, 23:52

He's a real nowhere man, sitting in his nowhere land, making all his nowhere plans for nobody... :lol:

J'ai étudié les Arts et l'Histoire de l'art (dans une ancienne vie :cool: ) et je me souviens combien je pouvais bouillir lorsqu'on insultait mon intelligence en nous montrant des "oeuvres" d'art minimaliste. Comme disait une bonne amie à moi : voir des gens s'extasier devant un bocal contenant 3 haricots verts m'exaspère. :lol:

Une amie du cours de peinture et moi disions que c'était les artistes sans talents qui réussissaient à exposer. Nous sommes des artistes qui auraient mangé des croûtes de pain si nous avions poursuivis dans le marché de l'art.

À ce sujet, je vous conseille une excellente lecture pour les jours ensoleillés : L'art du maquillage de Sergio Kokis (XYZ Éditeur, 1997). C'est sous forme de roman mais, il exprime bien toute la frime du marché de l'art.
"Le Père n'a dit qu'une seule Parole, c'est son Fils et, dans un éternel silence, il la prononce toujours". (Saint Jean de la Croix)

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Eremos
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Message non lu par Eremos » sam. 25 févr. 2006, 0:29

Cela me fait penser à ce que Malévitch disait de son oeuvre : « Je sens autour de moi le désert. Perdu, je n'ai trouvé qu'une route vers le salut. C'est ce que tu vois et admires ici : ce carré blanc sur fond blanc. Ce sont mes oeuvres les plus récentes, mon idéal. »

L'art contemporain est probablement à l'image de notre temps : la croissance du désert. J'ai moi aussi du mal à accepter l'imposture d'un art conceptuel ou d'un art engagé dans la déconstruction de ce qui fonde notre humanité. On pourrait se demander si ce n'est pas déconstruire pour mieux reconstruire, mais non. Quand je vois les analyses succintent mais intéressantes de Jean Clair qui décrit l'évolution d'une esthétique de la Beauté vers une esthétique du dégoût, je me dis que ce que l'on "reconstruit" n'est finalement là encore qu'une espèce d'avatar du nihilisme ambiant.

Cependant l'art contemporain a au moins cela d'intéressant qu'il nous renseigne sur l'état de nos sociétés mieux que bien d'autres éléments. Probalement le meilleur moyen de constater cette extension du désert.

Eremos qui parle du désert... c'est très tautologique ! Je suis moi aussi aspiré par le néant :waou:

Toujours est-il que l'art me semble un lieu où les catholiques devraient plus s'engager car il y a beaucoup à y faire. Si je peux reprendre la comparaison de l'art contemporain au désert, je crois qu'il faut en tirer les toutes implications : « À travers le désert, une voix crie : Préparez le chemin du Seigneur ». (Mc 1,3-4)

En Christ,
Eremos
NISI Dóminus ædificáverit domum, in vanum laboravérunt qui ædíficant eam.
(Liber Psalmorum, 126)

Charles
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Message non lu par Charles » mar. 28 févr. 2006, 20:37

- How long have you been doing the "triangles" ?
- I was one of the first...

:lol: :lol: :lol:

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Message non lu par MB » mar. 28 févr. 2006, 22:30

Avé !

D'accord avec ce que tu dis Charles, mais à condition de bien préciser que l'art que tu appelles contemporain n'est qu'une partie, la plus médiatique disons, de ce qui se fait maintenant. Il y a des artistes "contemporains" au sens de "travaillant actuellement" qui sont très bons.

Vale

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Message non lu par alphaomega » dim. 02 avr. 2006, 21:59

C'est assez fort parce que plus je me promène sur le forum plus je me rend compte que certains sont exactement comme les imaginait,ils sont l'image , voir le stéréotupe parfait , du catholique "de base" si jose dire, de droite politiquement, ne se remettant pas ou peu en question , et en plus la cerise sur le gateau ,incapable de sentir la sensiblité de l'art contemporain.Je sais que la pub ( absolument somptueuse selon moi) qui représentait la Cene que vous avez réussir a faire censuré , etait un peu "hard" pour vos petits coeurs , mais l'art contemporain, fais appelle au feeling normalement vous savez faire ça non?
Il est dans tous les cas trés ridicule de dire l'art contemporain n'offre aucune forme aucune couleur , et le reste puisque l'art contemporain, ne se limite pas a qu'une seule forme, l'art contemporain est partout, il se manifeste sous diverses formes, sous divers matériaux, l'art contemporain n'est pas l'art contemporain mais LES ARTS CONTEMPORAINS , evidement c'est loin des peintures de la chapelle Palatine . Evidemment aussi l'art contemporain ne reste rarement sur un tableu ou un mur, il est partout , on peut le rencontrer a chaque coin de rue,.
Je sais que les couleurs et les gouts ne se discutent pas mais faites un effort je vous en supplie,n'exposer pas vos idées comme une vérité universelle, non l'art contemporain n'est pas le silence, c'est plutot que vous este incapable de voir la sensibilité qu"il dégage , et que vous incapable de discuter , de dialoguer, avec l'art contemporain .
Je me souviens de cette phrase de cet architecte a qui je voue un culte sans retenu ( hé oui!) Franck O Ghery , qui disait " L'art est une réponse aux facistes qui essaye d'imposer leurs ignorances a la masse"
"Je suis l'Alpha et l'Omega , le Premier et le Dernier, le Commencement et la Fin"

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