Le fait est que d'un point de vue strictemment objectif, faire la distinction entre ceux qui peuvent faire sienne la proposition suivante et ceux qui se refuse à la tenir ne me semble pas ahurrissant:
"Je crois dans le dépot de la Foi reçu par l'Eglise, tenant a-priori pour vrai toute proposition qu'elle tient pour vrai dans son infaillible interprétation de l'Ecriture et de la Tradition, tel qu'enseigné par le magistère pétrinien dans les canons des Conciles et les enseignements suprêmes des Pontiffes, en matière de Foi et de Moeurs, en reconnaissant l'autorité spirituelle de droit divin des successeurs des apôtres et de Saint Pierre dans leur enseignements ordinaire continu."
Il y a ceux qui peuvent tenir cette phrase et les autres. Je ne suis pas sûr que l'on puisse dire que ceux qui s'y refusent ne sont PAS catholiques (c'est équivoque), mais il y a quelquechose de la catholicité qui est en jeu ici.
L'argument de Suliko, qu'elle voulait que je formulle et que je voulais expréssément éviter en commençant cette discussion, est le suivant: 'Nous ne devrions pas avoir cette discussion en premier lieu, parce que la réponse est dans le Catéchisme de l'Eglise Catholique, dans l'écriture, l'enseignement continu de la Tradition, en bref parce que l'Eglise Apostolique, Oracle de Dieu sur la Terre, "Colonne et Fondation de la Vérité" (I Tim, 3, 15) a déjà tranché et que si nous sommes partie prenante de cette Eglise, notre réponse ne peut être que la réponse de l'Eglise'.
Bien sûr c'est un argument sensé.
Bien sûr, c'est la seule position intellectuellement valable pour un catholique. Maintenant, les 'Liberal Catholics', pour utiliser le terme anglais qui est plus 'fin' que "progressistes", ont une certaine allergie aux mots "raison", "position intellectuelle", "argument", etc... Pour eux, ce n'est pas de cela dont il s'agit. Que les conservateurs s'amusent avec la raison pour prouver aux athées l'existence de Dieu si ça leur chante, mais qu'ils n'amènent pas leur scholastique sèche dans les domaines humains de l'éthique personnelle. Si je dit par exemple que, si il advenait demain que l'Eglise définisse infailliblement l'homosexualité comme n'étant pas un péché, je cesserait d'être catholique, un 'liberal catholique' me regardera avec des yeux ronds. 'Qu'est-ce que cela vient faire là ?' 'Quel est le rapport ?'. Le rapport, c'est que la position catholique a une cohérence intellectuelle, et que ces mots, qui n'ont rien de rebutant, veulent tout simplement dire que la foi catholique se tient, qu'elle n'est pas une contradiction. Bref, on peut dire les 'liberal catholics' sont marqués par un certain irrationnalisme assumé, au nom du fait que le 'souffle de l'esprit' va bien au-delà de nos contructions humaines. Irrationalisme qui n'est pas sans rappeler l'irrationalisme protestant, d'ailleurs, et qui fait la faute de ne pas distinguer les contradictions strictes des paradoxes supra-rationels qui nous ouvrent au mystères, deux structures logiques distinctes.
Un théologien moral progressiste qui s'affranchit des catégories classiques de la pensée catholique définies par le magistère, est-il encore catholique ? Non, certainement pas. Un théologien qui dit que l'homosexualté n'est pas un péché est définit par les mêmes catégories comme un hérétique.
Maintenant, pour beaucoup de raisons, je crois qu'il faut éviter, à ce niveau, de passer de l'anathème d'une position théologique à celle des catholiques à la base. Une de ces raisons, c'est qu'être catholique c'est un peu plus que de tenir une position conceptuelle. C'est vivre des sacraments, c'est aller à la paroisse le dimanche, c'est vivre du Corps Mystique du Christ. Une autre, c'est qu'il y a plein de façon de tenir une positions conceptuelle. On peut la tenir, d'un côté, comme une
cause, de façon militante et revendicatrice. A l'extrême inverse, il peut s'agir d'une conclusion jaillit de pures spéculations au fond de notre intellect. Et il y a beaucoup de nuances.
Mon chargeur est vide, et j'en suis pas forcément très heureux.
En tout cas le fait est que le dialogue avec les catholiques libéraux est, de mon ressenti personnel, très frustrant parce qu'il manque de terrain commun pour dialogue. Au fond le débat revient à discuter de savoir qui a le primat sur l'autre de la Subjectivité (l'expérience individuelle) ou de l'Objectivité (le Magistère). Le Concile et le Catéchisme sont clairs sur la nature de la relation entre conscience et enseignement écclésial, pourtant... Mais les utiliser pour trancher, c'est déjà se revendiquer de l'objecivité externe.
Mais c'est pas comme si on arrivait à ce point du débat pour la 45ème fois depuis les 5 dernières années sur le Forum.
D'où mon manque d'intérêt pour la forme d'argumentation théologico-magistérielle, chère Suliko : je viens de parler en l'air, parce que mes propos, reçu dans la Subjectivité, perdent leur force rationnelle objective. On peut démontrer tel ou tel point de doctrine morale à n'importe quelle personne qui accepte les prémisses de la doctrine, mais c'est pas la peine de parler à quelqu'un qui pense que la morale se découvre dans le rapport humain avant tout, duquel jaillit une expérience qui est injugeable par un critère externe et surtout pas un raisonnement scholastique qui respire les parchemins poussièreux.
Je n'ai pas votre acèse silencieuse, chère axou...
Héraclius -
[Edit : j'ajoute à votre intention, Axelle, que je sais très bien que le raisonnement d'au-dessus vous rasera au dernier degré au mieux, et vous fera vous sentir blessée au pire. C'est bien pour cela que je ne voulais pas en venir là. N'y accordez pas trop d'importance. Bien sûr ce serait un plaisir de discuter de ces réflexions sur le plan logique, mais je doute que cela vous intéresse. Mais je préfère que vous passiez sur ces lignes sans les lire plutôt que cela vous donne le sentiment d'être personnelement jugée et vous donne une raison de plus de quitter le forum.]