Bonjour,
ademimo a écrit : ↑jeu. 17 août 2023, 17:36
Le christianisme fait partie d'un ensemble culturel que l'on qualifie parfois d'abrahamique, où toutes les jouissances terrestres sont réputées éloigner de Dieu.
Je suis plutôt dubitatif sur cette affirmation. On trouve tout de même dans l'Ancien Testament une injonction faite au jeune marié de réjouir sa femme. Le vin y est présenté positivement comme réjouissant le cœur de l'homme. Je ne parle même pas du Cantique des cantiques... Notre Seigneur, quant à lui, passait selon les Evangiles pour un ivrogne ce qui, naturellement, est exagéré, mais n'en démontre pas moins qu'Il devait être plutôt bon vivant...
Le problème, à mon sens, ne vient pas des religions issues du substrat israélite, mais de la philosophie grecque, notamment platonicienne. C'est pour celle-ci que la matière est mauvaise, pas pour Israël.
Quant à la pureté légale, elle est exclusive de toute notion de péché : il n'est pas peccamineux d'être impur. Du point de vue de la progressivité de la Révélation, Dieu s'est servi de quelque chose qui existait dans le religieux archaïque, la pureté rituelle, pour inculquer au peuple d'Israël sa transcendance.
ademimo a écrit : ↑jeu. 17 août 2023, 17:36
Donc, on peut dire que la sexualité est toujours tenue en haute suspicion, et qu'elle est seulement concédée au laïc considéré comme trop faible spirituellement pour pouvoir s'en passer, mais à condition de la canaliser vers quelque chose d'utile à la société chrétienne qui est l'institution du mariage. Dans ce cadre, et seulement en vue de la procréation - afin de faire droit au commandement divin : "croissez et multipliez" - la sexualité est exceptionnellement considérée comme "bonne", à la seule condition de ne pas la détourner vers un autre objet qui serait la jouissance pour la jouissance.
Cette tendance existe effectivement, mais il n'est pas exact d'y voir un reflet adéquat de la doctrine chrétienne en la matière. Il faut garder à l'esprit que le christianisme se déploie dans une histoire, et qu'à l'époque où le christianisme commence son envol, la culture est marquée par une défiance envers la matière que ce soit dans les cultes religieux ou la philosophie. Il faut du temps pour que les choses évoluent dans les faits et dans l'exposé de la doctrine.
L'exclusion de la jouissance pour la jouissance est exact. Ceci parce que, dans le plan divin, la sexualité est censée être l'expression d'un don réciproque de soi. Il n'y a donc pas de dévalorisation, bien au contraire. C'est bien parce que la seule recherche de sa propre jouissance, la
masturbation à deux évoquée par un autre intervenant, ne manifeste pas un don de soi qu'il y a une difficulté. De même s'agissant de la procréation, où il ne s'agit naturellement pas de limiter l'activité sexuelle à la génération. Il se trouve, et c'est un fait naturel, que la reproduction humaine se fait par la sexualité. Au seul regard de la nature, la sexualité sert à ça. C'est une potentialité qui lui est intrinsèque. Il s'ensuit que bloquer artificiellement cette potentialité, c'est mettre un obstacle au don réciproque de l'homme et de la femme. Une union sexuelle qui serait volontairement rendue inféconde ne traduirait pas un don réciproque total.
S'agissant de la position de Paul, il compare le mariage et le célibat, non pas la sexualité et la continence. Il n'y a pas de dévalorisation de la sexualité en tant que telle, et c'est d'ailleurs lui qui fait défense aux époux de se refuser l'un à l'autre, sauf temporairement pour vaquer à la prière. Le mariage ne se limite pas à la sexualité mais a des conséquences sur l'ensemble de l'existence. Ce que veut dire Paul est, finalement, assez prosaïque, à savoir que les époux doivent prioritairement se consacrer à leur famille là où celui qui choisit le célibat pour le Royaume doit prioritairement se consacrer à Dieu.
Je vous concède cependant sans difficulté que cette compréhension de la doctrine chrétienne relative à la sexualité n'a pas toujours été, loin de là, la doctrine communément enseignée par les pasteurs, ce dont il faut rechercher la cause, comme je le disais précédemment, dans le fait que le christianisme se déploie dans une histoire. Il reste que cette compréhension n'a rien d'inédit. On la retrouve, en des termes certes différents, chez S. Jean Chrysostome par exemple.
ademimo a écrit : ↑jeu. 17 août 2023, 17:36
Vous voyez donc où je veux en venir. Dans l'homosexualité - dans cette perspective - la sexualité ne peut pas être considérée comme orientée à accomplir la volonté divine, à savoir "croître et multiplier", c'est-à-dire faire fructifier l’œuvre de la Création, et faire vivre l'institution du mariage qui lui est liée. La sexualité y est nécessairement recherchée pour elle-même.
Il est donc impossible, sur le plan doctrinal, de l'insérer dans l'architecture du plan divin visant à glorifier et faire grandir sa Création.
Rigoureusement exact, à plus forte raison dans la compréhension plus adéquate de la doctrine chrétienne que j'ai brossé ici à grands traits. Ceux qui prétendent que la doctrine catholique en la matière pourrait changer se fourvoient complètement.
+