marcb a écrit :Merci beaucoup pour ces éléments sur l'évolution de l'oeil, dont j'ignorais tout !
Merci, moi qui pensais écrire dans le vide depuis un certain temps déjà...
A ce sujet, je me pose une question à mi-chemin entre math et bio : quid des combinaisons inefficaces ? Si je comprends bien la théorie néodarwinienne (ce qui est un postulat assez fort vue mes compétences !!!) les mutations se faisant aléatoirement, on devrait se retrouver avec un nombre non négligeable d'individus déficients pour le ou les caractères considérés : est-ce qu'on les retrouve bien ? (disons la proportion "déchets"/"succès" est-elle conforme à celle attendue pas des modèles probabilistes ?)
La notion de "succès" dépend beaucoup de l'environnement que vous considérez (ce qui est utile dans un contexte ne l'est pas forcément dans un autre). Les estimations sont donc variables (d'autant plus qu'il faut compter des bactéries ce qui, comme chacun sait, n'est pas facile) mais on considère qu'une mutation détectable sur 10 000 à 100 000 confère un avantage sélectif (les mutations "non-détectables" sont, elles, neutres : ni avantage ni désavantage. Elles pourraient bien être très fréquentes mais c'est un autre problème).
Le point délicat est que cette question, en plus d'être mathématique et biologique, est surtout chimique : elle se ramène aux nombres de façons dont on peut améliorer/modifier le fonctionnement d'une protéine donnée en la modifiant à un endroit au hasard. C'est évidemment très compliqué. Les expériences de "criblage" systématique qui ont pu être faites par des méthodes aussi rustiques que l'assemblage d'acides aminés dans un ordre aléatoire ont montré qu'il était en fait assez facile d'obtenir (à une fréquence faible mais détectable) des protéines accomplissant une fonction chimique quelconque par cette méthode. Donc la fonction des protéines, contrairement à ce qu'on s'imagine souvent, est assez flexible et facilement modifiable, ce qui est cohérent avec le fait que des mutations avantageuses surviennent. Elles demeurent néanmoins minoritaires comme on s'y attendrait intuitivement.
L'argument proposé par ti'hamo :
(Certains se fondent d'ailleurs sur l'observation de la même tendance évolutive dans des embranchements très différents, comme donc l'œil chez les mollusques et l'œil chez les vertébrés, pour émettre l'hypothèse de l'existence d'"archétypes" et d'une évolution "canalisée" qui n'est donc pas due principalement au hasard...)
n'a pas reçu de réponse, sauf erreur, et je le trouve plutôt pertinent, avec mes "yeux" de naïf...
En effet, je n'avais pas du tout remarqué ce passage. En réalité, dans le cas des modèles informatiques que j'ai déjà évoqués, si vous modifiez la forme d'une tache photosensible au hasard et que vous laissez la sélection faire (assez lâchement) le tri entre les différentes variantes ainsi obtenu, vous vous retrouvez effectivement avec la forme standard d'un oeil-caméra de calamar au bout de 500 000 générations. Vous l'obtenez mécaniquement par hasard et par sélection naturelle. Si vous pouvez expliquer son émergence par des mécanismes ordinaires, le principe de parcimonie déconseille d'imaginer plus compliqué.
ti'hamo :
je constate que vous ne me lisez plus depuis un certain temps déjà : vous vous contentez de répéter des choses auxquelles j'ai déjà répondu.
La forme purement darwinienne de l'évolution, imagine des histoires : "ça aurait pu se passer comme ça, si on part du principe que notre hypothèse de départ est vraie".
Ce que je note, c'est que ce qu'on observe ne CORRESPOND PAS à ce que ces histoires décrivent. (notamment la non-disparition des espèces "moins évoluées", entre autre).
Vous êtes le seul à imaginer que les espèces "moins évoluées" doivent disparaître ! La sélection naturelle n'est pas (ou pas principalement) un mode de tri entre espèces, c'est un mode d'évolution
au sein des espèces. Au départ, seuls les yeux simples existaient. Il y a des cas où les garder était avantageux, et ils sont restés. Il y a des cas où les modifier était avantageux, et ils ont été modifiés. Encore une fois, ce n'est pas que spéculatif, c'est confirmé par des masses d'éléments que je n'ai pas le courage de répéter, ni de compléter, étant donné l'attention à peu près nulle que vous semblez disposé à prêter à quoi que ce soit qui puisse suggérer que votre vision ultra-caricaturale de la biologie de l'évolution puisse être fausse.
Donc je reprends : si vous croyez que le "darwinisme", c'est le remplacement systématique des formes ancestrales par les formes descendantes, vous avez tort. Cette thèse est fausse et
personne ne la soutient. La théorie de l'évolution moderne considère que la
diversification des lignées est un processus se faisant en partie "à l'aveugle", selon les ressources disponibles, les hasards de la géographie et pas mal d'autres éléments ; et que l'évolution
au sein d'une même lignée, en revanche, est attribuable au jeu des mutations et de la sélection naturelle. Vous vous contentez depuis dix messages (ou quelque chose comme ça) d'insister sur la diversification, que personne n'a jamais prétendu expliquer par la sélection seule, comme étant un obstacle insurmontable. Vous n'êtes pas sérieux.
"J'ai écrit il y a longtemps déjà que l'apparition d'une nouvelle espèce exploitant de nouvelles ressources n'était pas nécessairement un processus compétitif "
Oui, mais moi je disais que, d'après les observations que l'on fait sur la Nature telle qu'elle est actuellement,
et bien l'apparition d'une nouvelle espèce exploitant de nouvelles ressources n'EST PAS un processus compétitif. Mais qu'une fois une nouvelle espèce occupant une nouvelle niche écologique, effectivement on observe une sélection par compétition des individus, qui pour autant demeurent de cette même nouvelle espèce.
ça fait un mot en moins ("nécessairement") mais ça change tout.
Mais si vous enlevez le mot "nécessairement", la phrase devient fausse ! On a déjà observé l'apparition de nouvelles espèces par un processus compétitif, de remplacement de l'espèce initiale (vraiment de nouvelles espèces, je vous assure, rien de "micro-évolutif"). Mais je m'interroge sur l'utilité de fournir des données à quelqu'un qui ne les verra pas et se contentera de répéter le même argument, inchangé, deux messages plus loin.
(non, je n'ai pas découvert ce sujet avec Jean Staune ni avec Rémy Chauvin, je dirais plutôt que leurs questions et objections sur ce sujet rejoignaient très exactement les miennes, que je me posais vaguement depuis le lycée, puis de plus en plus précisément par la suite. Une sorte de convergence évolutive intellectuelle et scientifique, en quelque sorte :-)
Ben, c'est précisément là que se situe le problème à mon avis : vous croyez qu'on peut aborder un champ technique, comme la théorie de l'évolution, qui est tout aussi complexe et sophistiqué que par exemple l'immunologie ou la mécanique des fluides, avec "quelques questions que l'on se pose vaguement" assorties de quelques lectures de gare. Non. C'est un peu comme dire qu'on peut disputer la coupe du monde de football parce qu'on joue avec ses enfants le dimanche. Votre façon de ne pas me répondre sur Conway Morris est à cet égard révélatrice : vous pensez qu'une approche dilettante, superficielle, de la question suffit à remettre en question le travail de milliers de spécialistes depuis 150 ans sur un champ complexe et technique dont vous ignorez quand même pas mal de choses, jusqu'à ne pas savoir comment la théorie traite la diversification des espèces (point quand même assez crucial) par exemple. Je vous le dis donc très simplement : la biologie de l'évolution, c'est plus abouti et compliqué que vous ne le croyez.