I. Explication succincte des termes.
Les théologiens scolastiques distinguent la gloire en « objective » et « formelle ». La
gloire formelle est « l’éclat qui s’attache à quelqu’un à cause de l’excellence bien connue de son état, de ses mérites, de ses actions ». La
gloire objective, au fondement de la gloire formelle, « est l’excellence même de l’être glorifié, excellence qui une fois connue, lui attire louanges, honneur, amour ». Bref la gloire objective est le seul fondement de la gloire formelle.
La gloire formelle est intrinsèque quand celui qui est objectivement glorieux sait qu’il est tel et s’estime (se respecte et s’aime) en conséquence. Elle
est extrinsèque quand, connaissant la gloire objective d’un tiers, vous l’estimez et l’aimez à raison de sa gloire objective.
II. La gloire de Dieu.
La gloire objective de Dieu n’est autre que la déité, l’être-même de Dieu, auquel les actes divins de connaissance et d’amour de Dieu se confondent, la déité étant absolument simple : en Dieu, gloire objective et gloire formelle intrinsèque sont identiques. La gloire formelle extrinsèque de Dieu est notre fin dernière absolue : nous avons été créés pour voir Dieu dans la vision intuitive, de sorte que le voyant « totus sed non totaliter », nous l’aimions nécessairement : l’acte de charité (amour pour Dieu) des bienheureux est un acte de la volonté naturelle, pas de la volonté libre. Les saints du Ciel aiment nécessairement Dieu, parce que la beauté ou perfection ou gloire objective de Dieu est infinie, de sorte que Dieu soit infiniment aimable, et que vu tel, aimé en conséquence.
III. La gloire du Christ-homme.
La gloire objective du Christ-homme lui vient toute entière de Dieu. D'abord parce que sa nature humaine est unie à son hypostase divine, est en-hypostasiée, de sorte que c'est le Fils de Dieu, Dieu le Fils, seconde des trois personnes divines, qui est le Fils de l'homme, le Messie et Sauveur des hommes. Ensuite parce que l'ensemble des vertus, des mérites et des actes humains du Christ-homme sont ceux d'une personne divine ; et que de surcroit, l'ensemble de ces actes, mérites et vertus, estle fruit de la grâce habituelle et actuelle, de sorte qu'en Christ comme en ses saints, « c’est Dieu qui opère le vouloir et le faire, selon son bon plaisir » (Ph. II, 13).
Quant à la gloire formelle extrinsèque du Christ-homme, elle lui vient toute entière de Dieu puisque :
- D'une, c'est Dieu qui, reconnaissant les mérites humains de son Fils, glorifie l'homme qu'est son Fils jusqu'à lui conférer un surcroît de gloire objective en l'intronisant ressuscité au Ciel : « Jésus leva les yeux au ciel, et dit : Père, l'heure est venue ! Glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie, selon que tu lui as donné pouvoir sur toute chair, afin qu'il accorde la vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés » (Jn. XVII, 1-2). « Car l'Esprit n'était pas encore [donné], parce que Jésus n'avait pas encore été glorifié. » (Jn.VII, 39). « Jésus répondit : Si je me glorifie moi-même, ma gloire n'est rien. C'est mon Père qui me glorifie, lui que vous dites être votre Dieu » (Jn. VIII, 54). « Jésus-Christ, lequel, existant en forme de Dieu, n'a point regardé comme une proie à arracher d'être égal avec Dieu, mais s'est dépouillé lui-même, en prenant une forme de serviteur, en devenant semblable aux hommes; et ayant paru comme un simple homme, il s'est humilié lui-même, se rendant obéissant jusqu'à la mort, même jusqu'à la mort de la croix. C'est pourquoi aussi Dieu l'a souverainement élevé, et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu'au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre et sous la terre, et que toute langue confesse que Jésus-Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père. » (Ph. II, 6-11).
- De deux, « nul ne peut dire : Jésus est le Seigneur ! si ce n'est par le Saint-Esprit » (I Cor. XII, 3)
C'est pourquoi en vérité le Christ dit : « Je ne tire pas ma gloire des hommes » (Jn. V, 41).
IV. La vaine gloire.
La
vaine gloire consiste à se glorifier de choses qui ne sont pas objectivement glorieuses. Soit qu'elles soient insignifiantes, soit même qu'elles soient objectivement honteuses (comme le sont les péchés et les vices). La vaine gloire est un prurit de l'amour déréglé de soi, un fruit de l'orgueil. Relève encore de la vaine gloire d'agréer les louanges, même justifiées, qui viennent de la bouche des pécheurs.
« Nous n'avons point cherché la gloire qui vient des hommes, ni de vous ni des autres » (I Th. II, 6). « Comment pouvez-vous croire, vous qui tirez votre gloire les uns des autres, et qui ne cherchez point la gloire qui vient de Dieu seul ? » (Jn. V, 44). « Car ils aimèrent la gloire des hommes plus que la gloire de Dieu. » (Jn. XII, 43). « Adultères que vous êtes ! Ne savez-vous pas que l'amour du monde est inimitié contre Dieu ? Celui donc qui veut être ami du monde se rend ennemi de Dieu. » (Jc. IV, 4). « Où donc est le sujet de se glorifier ? Il est exclu. » (Rm. III, 27).
V. Que celui qui veut être glorifié se glorifie en Christ Jésus !
« Ainsi parle l’Éternel : Que le sage ne se glorifie pas de sa sagesse, que le fort ne se glorifie pas de sa force, que le riche ne se glorifie pas de sa richesse. Mais que celui qui veut se glorifier se glorifie d'avoir de l'intelligence et de me connaître, de savoir que je suis l’Éternel, qui exerce la bonté, le droit et la justice sur la terre ; car c'est à cela que je prends plaisir, oracle de l’Éternel. » (Jr. IX, 13-24). « Jésus-Christ, lequel, de par Dieu, a été fait pour nous sagesse, justice et sanctification et rédemption, afin, comme il est écrit, que celui qui se glorifie se glorifie dans le Seigneur. » (I Cor. I, 30-31). « Que celui qui se glorifie se glorifie dans le Seigneur. Car ce n'est pas celui qui se recommande lui-même qui est approuvé, c'est celui que le Seigneur recommande. » (II Cor. X, 17-18). « Et Dieu a choisi les choses viles du monde et celles qu'on méprise, celles qui ne sont point, pour réduire à néant celles qui sont, afin que nulle chair ne se glorifie devant Dieu. » (I Cor. I, 28-29).