pierrot2 a écrit : ↑jeu. 15 juil. 2021, 20:42
Bonsoir aux citoyens de la cité.
Quelqu'un saurait-il, svp, qui Jésus désigne sous le vocable d "ennemi"? Notamment dans
Mt 5,43 Vous avez appris qu'il a été dit: Tu aimeras ton prochain, et tu haïras ton ennemi...etc..
Je veux dire de même que l'identification du prochain est suggérée par la parabole du bon samaritain, existe-t-il un équivalent pour l'ennemi?
Dans la même parabole, il y a les agresseurs, le prêtre, le lévite. L'un ou l'autre pourrait-il représenter selon vous ce que Jésus entend par "ennemi"?
Ou faut-il chercher ailleurs? Avez-vous des indices, svp?
C'est un verset très intéressant, car il fait partie de ces cas où le Christ semble citer des passages des Écritures que l'on ne retrouve pas sous cette forme. Dans la note de ma Bible de Jérusalem, on renvoie au Lévitique 19,18, où il est simplement dit : "Tu aimeras ton prochain comme toi-même", et non la suite ("tu haïras ton ennemi"). D'après la note, l'original araméen aurait été : "tu n'as pas à aimer ton ennemi", qui au gré des traductions, aurait donné la version que l'on connaît. En tout cas, cette loi ne se trouve pas dans le Lévitique. Alors d'où vient-elle ? D'après la note, elle pourrait venir d'autres passages comme un verset de la Sagesse (ou Siracide), 12,4 "Les anciens habitants de la Terre Sainte, tu les avais pris en haine pour leurs détestables pratiques" (on peut songer d'ailleurs à plusieurs passages équivalents dans les Psaumes, les Prophètes, et dans toute l'histoire du peuple hébreu : on parle des peuples idolâtres et impies ennemis d'Israël, et plus globalement les pêcheurs que le Juste hait), voire des Esséniens (puisque l'on trouve des écrits du même style dans les manuscrits de Qumran).
En tout cas, cela montre bien le caractère flottant des Écritures, puisque la version que l'on connaît de l'Ancien Testament a tendance à s'écarter des passages que le Christ cite dans sa prédication.
Toujours est-il que cet ennemi peut recouvrir plusieurs significations. À première vue, il désignerait l'impie, à commencer par le Samaritain. D'ailleurs, dans sa parabole pour illustrer l'amour du prochain, le Christ met justement en scène un Samaritain. Autrement dit : celui qui ne partage pas la même foi, ou du moins les mêmes rites. Dans un second sens, il désignerait le pécheur : celui qui est infidèle à la loi de Moïse, qui ne suit pas les préceptes religieux. Enfin, il pourrait être celui avec lequel on est en conflit, ou du moins en affaire (avec une certaine tension dans la relation), ce qu'évoque le Christ par ailleurs en énumérant quelques cas, comme : celui qui te frappe sur la joue, celui qui te demande ton manteau, celui qui te requiert pour une course, celui qui te doit de l'argent, etc. Et puis, il y aurait un dernier cas, peut-être le plus important : celui qui te persécute, avec l'exemple du Christ lui-même, et de sa Passion : ici, l'ennemi se confond avec le pécheur, puisqu'on dit qu'il a été "livré aux mains des pécheurs".