Bonjour Libremax,
maintenant que le dernier post de Cinci m’éclaire sur ce que serait la doctrine de Arnaud Dumouch (j’y reviendrai plus tard envers eux), je me pose la question d’abord de la vôtre que je ne peux croire similaire et m’interroge : quelle est-elle et en quoi diffère-t-elle selon vous de la sienne mais aussi du point de vue que j’ai exposé en creux sur ce fil ? Et aussi : quelle est celle de ces autres théologiens qui penseraient comme lui et vous, sachant que lui irait probablement plus loin ?
Car dans nos derniers échanges, je ne disconviens pas que « dans ces passages, Jésus signifie à ses contradicteurs qu'ils s'obstinent dans leur erreur. Lui prêter par conséquent l'idée, à chaque fois que ceux auxquels il s'adresse seront damnés, c'est lui faire dire ce qu'il se garde bien de dire. » Néanmoins, il est clair que s’ils persistent dans cette erreur (qui est loin de n’être qu’intellectuelle), damnés ils le seront, et le discours de Jésus ne laisse nullement envisager un autre sort, laissant entendre qu’ils ont déjà reçu les grâces nécessaires à leur salut et qu’à l’avenir, il ne dépendra que d’eux d’y agréer or ils s’y refusent ( et que de nouvelles grâces y changeraient quoi ? Il ne se livre à aucune extrapolation et contrairement à vous, je n’’y vois pas de signe d’espérance quant à leur salut de sa part).
Ce n’est pas un benêt et nous savons le grand respect qu’il a envers la liberté de chacun !
Il y a dans ces propos une grande différence de ton d’avec ceux où il s’adresse à ses disciples et leur fait des reproches, ou leur annonce leur trahison.
Un point où nous sommes d’accord mais que je crois bon de clarifier, c’est que bien que venu comme sauveur, Jésus leur a d’abord signifié qu’il serait LE juge (Jean, 5 ; 19-32) : ce qui est nécessaire, car quel sauveur ce serait et pourrait-il être s’il n’était pas aussi ce juge ! Or s’adressant à eux en tant que sauveur, ce qu’il leur dit a clairement valeur de condamnation future car il ne leur annonce aucun changement (sans l’empêcher, certes) et s’en remet à leur liberté qui a en quelque sorte déjà « fait ses preuves ».
Je pense à cette parole dans Daniel envers les accusateurs de Suzanne : « tu vieillis dans le péché ! » combien plus souvent vérifiée qu’une conversion, et si juste si l’on tient compte du mal qu’ils ont déjà fait délibérément et sans aucun repentir depuis : pourquoi cela changerait ? La grâce ne violente pas la liberté ! C’est à cause des habitudes prises qu’ils n’ont déjà pas saisi la grâce offerte, alors cela n’ira probablement pas en s‘améliorant !
C’est vous qui m’aviez fait observer par le passé une différence de ton, à mon tour de vous la faire observer, même si formellement, en effet, ils pourront encore se convertir, même après l’avoir crucifié (mais l’histoire montre plutôt le contraire). S’il ne convient pas non plus de les mettre « tous dans le même panier », certains se sont convertis à différents moments, mais assurément pas la majorité pour autant qu’ils étaient encore sous nos radars – et à la différence de ce que nous pourrions dire de nos contemporains, ils ont bien reçu un « check up » complet de Jésus himself qui a de quoi faire froid dans le dos et n’en ont pas été affectés, mais plus endurcis encore.
Réaction psychologique qui se retrouve très bien chez nos contemporains au quotidien et qui suscite des analogies troublantes…
Oui, Jésus n’a jugé personne, parce que ce n’était pas le moment, mais sous bien des angles il leur a développé en quoi ils étaient plus que dans l’erreur, dans le mal, le refus et la mauvaise foi, et il n’a pas semblé avoir beaucoup d’illusion sur ce que cela changerait dans leur cœur ! Et il agissait bien là en tant que sauveur et c’est bien en quoi cela ne laisse pas d’être plus qu’inquiétant concernant leur sort, car le juge qu’il sera ne saurait avoir un avis différent, d’autant qu’il les aura bien confrontés par avance à la vérité.
Ce qui est ce que semble vouloir rattraper des doctrines comme celles de Arnaud et la vôtre (pas la mienne : est-ce là notre différence ? J’envisage des cas de « redressement » où Dieu sait déjà que la vérité de la personne n’est pas incompatible avec la sienne, mais où elle a été pervertie par des expériences retorses, au pire ou au mieux, où il y a « ballotage », simplement que ces cas contrediraient apparemment le dogme), mais précisément, ces exemples montrent que cela ne suffit pas (et n’est pas souhaitable, car ce serait injuste) : celui qui s’est endurci n’en sera pas converti, il ne pourrait l’être que « de force », ce qui n’arrivera JAMAIS.
Et Jésus, en nous voulant missionnaires, a voulu que nous partagions ce drame qui est le sien, d’être impuissant.
Il y a bien sûr un grand mystère : sa toute-puissance s’effaçant derrière la liberté humaine accordée - et qui explique que nous disons (par réflexion théologique) que c’est l’âme qui reflue volontairement vers l’enfer, tandis que lui, Dieu, en assume pleinement sa Responsabilité en disant que c’est sa décision à Lui.
Encore une fois l’idée selon laquelle la grâce du salut aura toujours été donnée, et qui conduit à celle de Mr Dumouch car ici-bas il se peut que non, mise en application ne revient pas pour l’Eglise à donner une seconde chance, mais à concrétiser une mise au point, ou levée des masques, qui rectifie ou corrige le tir : l’âme à la mort remplissait toutes les conditions ici-bas pour être en état de péché mortel, toutes sauf celle qui impliquait le for interne, mais si interne que Dieu seul (pas toujours ! sinon nous n‘en discuterions pas…) pouvait le percevoir.
Donc elle n’est par ce biais en rien contradictoire avec le dogme traditionnel, Il se peut que ce changement radical de perspective soit ignoré et même pas perçu par elle, tant elle est engluée dans un contexte pernicieux et vicieux, où sa « défense de la pureté » l’a conduite à produire des choix erronés qu’elle condamnait elle-même et à perdre des repères, à se mettre dans une situation de « perte du salut » jusqu’à ses propres yeux (imaginez ce qu’une adolescente très fervente mais pas forcément très « doctorante » peut être amenée à devenir et faire, décider, si enlevée et prostituée contre son gré, pour « survivre » (ou pas…), etc.)
Alors pour la dessiller, Jésus lui donnera une sorte d’épreuve pour que son choix lui donne conscience de ce qu’il en est vraiment et rectifie les sales coups durs de la vie qui l’ont cabossée, elle, ses actes et son jugement. Elle pourra prendre une décision libérée des contraintes qui affectaient ici-bas sa lucidité. Cela semble être une proposition de salut, et cela l’est, sauf que Dieu sait déjà ce que sera son choix, et que c’est le déroulé d’un jugement. Et comme nous disons que c’est l’âme qui choisit l’enfer, nous pouvons dire que cette proposition n’est pas toujours faite pour sauver, que c’est donc une proposition, mais Jésus savait la réponse de sa volonté/liberté, et en cela il ne faisait qu’exprimer en elle sa volonté et l’y faire adhérer,
Car pour l’âme endurcie, cette proposition ne changera rien, elle ne serait que formelle. Qu’on ait ou non reçu des grâces de conversion ici-bas, Dieu sait faire abstraction de ce sort et savoir en quoi, au regard de la loi naturelle, une âme choisit la mauvaise voie et refuse d’en changer. La liberté qui serait donnée après la mort et avant le jugement ne serait qu’un résidu à l’image de ce qui l’a formé, son choix sera alors comme programmé par la force résultant de ses bons et mauvais choix, et le plus fort des deux l’emportera : là se tient la justice (et s’oublie le fait que mourir avec un seul péché mortel non confessé, alors que toute notre vie fut droite auparavant pour prendre un cas extrême, vaut damnation selon une justice qui tient compte de Dieu aussi et qui s’oublie par trop dans de telles considérations aux yeux des fanas du dogme actuel) .
On peut imaginer que la liberté de l’instant peut intervenir pour changer un destin qui sera éternel, mais cela ne relèvera plus de la foi (Dieu sera devant nous) ni de l’espérance (la vérité sera devant nous) mais de la charité, d’une affinité profonde et particulière entre Jésus, et nous.
Et qui suppose qu’elle ait été cultivée comme en secret au moins ici-bas. Ce qui parfois et dans certaines situations ou impasses, nous oblige à prendre des initiatives audacieuses et apparemment très opposées à la morale chrétienne. (Et n’oublions pas l’existence et le sort de ceux qui obligent les autres à se trouver dans de telles situations, dont c’est le quotidien non contraint mais délibéré ! Ce ne sont pas des exceptions ici-bas, sauf et plus pour nous qui évitons généralement leur contact, en plus qu’il nous est déjà au départ évité pour la plupart… Nous les croisons dans la rue sans les reconnaitre, ni soupçonner le cloaque d’impureté et de vice qu’ils sont… cessons de rêver… ! Beaucoup rêvent de pouvoir devenir comme eux et regrettent quelque impossibilité ! Nous sommes en train de nous chatouiller la glotte avec un mets fin alors que d’autres en avalent à grands traits de bien plus épicés… ! Remercions Dieu de ne pas les mieux connaître et d’en être protégés, au lieu de rêver à leur salut ! Le « mal » que peut nous faire ou représenter un homme qui serait Mr Dumouch, à côté, en cela je suis d’accord avec vous je crois, c’est de la rigolade… (même s’il semble les défendre malgré lui ou plutôt malgré eux, en somme) ! Au moins il nous invite à réfléchir et consolider note foi… et cela ne le privera pas du paradis d’avoir ces pensées étranges qui montrent son souci de parvenir en ce qui le concerne à tout pardonner à tous…
Il est loin d'être le seul à avoir besoin d'imaginer que Dieu fera pareil pour y parvenir, quant à lui. D'autres au contraire ont besoin de se dire que "Dieu les vengera" pour parvenir à cette paix, je crois que sa sensibilité mérite à cet égard un meilleur éloge.
Changement qui ne s’envisage que dans un seul sens, celui qui nous sera favorable (là se tient la miséricorde), parce que le temps de la miséricorde (ici-bas) n’aura pas été assez clément pour cette âme et que « toutes choses étant par ailleurs égales à tous et pour tous », si cette égalité a du sens ce sera bien à cet instant unique, elle aura droit à un « coup de pouce » de redressement proportionnel (d’où le « il sera plus demandé à celui qui aura plus reçu »).
Il n’y a pas besoin pour cela d’un délai, ni d’ajouter à la rencontre de notre juge et sauveur autre chose que notre complète nudité. Tout est entre ses mains et alors mais alors seulement, certes, il peut tout décider et nous pouvons tout imaginer : cela ne change rien sur le cadre posé tel qu’il nous l’a annoncé et que l’Eglise a essayé et n’a sans doute pas fini de tracer.
Désolé si j'ai dû être un peu long...