Cinci a écrit : Mon idée
Mon idée c'est plutôt la peur qui saisi la créature intelligente et à la vue de ce que Dieu lui demande. Et qu'est-ce que Dieu demande à ses créatures intelligentes ? Dieu demande à ses créatures intelligentes de participer à sa vie divine, d'entrer dans sa dynamique de vie trinitaire, qui est une intensité de vie supérieure, d'accéder au véritable Amour qui est en même temps une sorte d'oblation, de dissolution de soi-même dans la vie d'un autre.
Dieu demande à une créature intelligente qui est "bonne dans son ordre crée" de bien vouloir accepter de se départir de tout ce bien qu'elle a déjà reçue, afin de pouvoir accéder à la marche la plus haute (la vie éternelle, l'amour qui ne passera point, etc.)
Prise de panique à l'idée de perdre, devoir sacrifier ce qui fait sa vie jusque là (une reconnaissance, une position, une liberté, une richesse, un don, un plaisir, etc.), la créature cherche alors à s'agripper à ce qu'elle connaît, qui paraît beaucoup plus rassurant que de devoir entrer dans une terra incognita, sans garantie et comme sur la seule parole de Dieu. La peur incite la créature à décliner l'offre. Il me semble que c'est bien là ce que la Bible nous fait voir. Il y a des invités à un banquet qui se déroberaient à l'invitation ...
[...]
Le mécanisme de la peur peut apparaître comme étant à la racine du péché.
Et en même temps, je me demande bien ce qui peut provoquer cette peur, cette résistance de la créature si ce n'est justement ses limites, ses manques...
Ou alors tu me diras qu'une créature qui réagit ainsi exprime la perfection, la plénitude, l'amour infini ?
Sa volonté ? Mais sa volonté est créée. C'est donc d'un principe créé que viendrait la chute ?...
Cinci a écrit : La foi représente tout juste le contraire de la peur. cf. "peur" = peur de se faire escroquer, mentir, rouler, exploiter; peur de devoir sacrifier du bon au profit d'un truc moins bon, peur de mourir littéralement; peur de "ne plus se reconnaître", peur de perdre le contrôle, peur de se retrouver dans une situation non pas meilleure mais pire, peur de ne plus rien comprendre à rien, peur de déchoir, peur de perdre sa place, peur de se retrouver isolé, peur d'avoir mal, peur de la folie, etc.
Le péché vient s'insinuer en terme de méfiance dans la relation, et parce que la relation exige bien une sorte de saut qualitatif dans la confiance envers un autre. Or la nécessité pour la créature de devoir faire ce saut sans parachute vient ouvrir la porte à la possibilité du péché, qui est de l'ordre du refus. La créature qui se dérobe à Dieu de quelque manière = refus.
Et d'où vient la peur ? D'un manque de confiance ? Ou encore d'une réticence au don de soi ?
Et d'où vient un manque de confiance ou une réticence à se donner ? D'un manque d'amour ?
Et d'où vient un manque d'amour ? Peut-être de ce que nous ne sommes pas justement l'amour incréé et substantiel mais créés ?
Cinci a écrit : Et une nécessité
La nécessité ? Dieu, pour créer un être qui soit "réellement autre que Lui-même" n'en peut que créer une créature qui ne soit pas Dieu. Et pour que cette créature "réellement autre" puisse quand même accéder à la vie même de Dieu, il en nécessite bien qu'elle acceptasse volontairement de se déloger d'elle-même. Tout simplement parce que c'est la dynamique même de la vie trinitaire. La demande paraît exorbitante (accepter de perdre sa vie, sauter de la barque, tout donner ...)
Cinci a écrit : On ne parlerait pas de péché comme on le fait dans le christianisme (de refus, etc.) à mon avis, si Dieu se contentait de créer des créatures dans une sorte d'ordre qui serait complètement fermé et où il ne serait jamais question pour personne de pouvoir accéder à la vie divine. On pourrait toujours bien parler d'erreur, de bévue, de maldonne, d'une faute induite par la méconnaissance ou l'ignorance de ci ou ça, transgression ponctuelle d'une loi quelconque, mais non pas du péché comme on le fait dans l'Église, en terme de décision irrémissible, choix dramatique, volonté de se soustraire à ... refus de vouloir entrer dans la relation.
Oui, il faut un "oui" libre de la créature.
Mais cette volonté autre de la créature est créée par Dieu et pour Dieu et ne trouvera son accomplissement, sa pleine expression qu'en Dieu.
Si cette volonté n'est pas le fruit de ce qu'elle est en son fondement créé par Dieu, alors c'est que cette volonté tire une autre origine que de Dieu. D'où alors ? Du hasard ? Autrement dit de nulle part et surtout pas d'elle-même alors. D'elle-même ? Mais alors cette volonté devient sa propre cause et sa propre origine, elle est donc Dieu.
Cinci a écrit : Un Jean Paul Sartre ne voulait rien savoir du Dieu de la Révélation. Pourquoi ? Parce que de la manière dont il entendait les choses par rapport à ce Dieu, il comprenait qu'il ne pourrait plus jamais être lui-même, plus jamais demeurer lui-même. En somme, le Dieu évoqué aurait été une menace vitale d'aliénation. Il préférait dire : "Non merci !" Dieu ne rimait plus pour lui avec liberté mais avec esclavage. Une menace ...
Alors que c'est plutôt l'inverse en réalité.