Effectivement, c'est très compliqué de parler de ces choses-là. Tantôt je découvre quelque chose et tantôt j'ai l'impression de me tromper tant c'est toujours une conception limitée de choses infiniment plus vastes.Riou a écrit : ↑dim. 06 nov. 2022, 16:17Ce qui est délicat dans le lien entre nouveauté et immuabilité, c'est que cela implique la tension entre des catégories apparemment contradictoires : le Même et l'Autre, le Mouvement et le Repos.
Dire de quelque chose qu'il est "nouveau", c'est dire qu'il y a quelque chose de plus qu'auparavant, qu'une forme "d'inédit" est advenue. C'est donc dire que, d'une certaine manière, il y a eu altération (Autre), changement, c'est-à-dire mouvement venant troubler le repos.
Or, la notion d'altération, à propos d'un être Absolu et éternel, pose problème, puisque cela revient à introduire en lui du changement, voire de la corruption, perdant ainsi le caractère éternel de l'être en question. Pour autant, envisager un Repos qui serait inerte et comme mort serait tout aussi problématique et limité, pour ne pas dire insatisfaisant.
Il faudrait donc que Dieu intègre l'Autre tout en restant le Même, qu'il soit Mouvement vivant et Repos éternel en même temps. Nous sommes donc à la limite du langage et de la théologie, car nous pensons ces catégories à partir de nos conditions de représentations empiriques des choses, ces mêmes représentations étant plongées dans le relatif. C'est en ce sens que parler de Dieu est toujours équivoque, et qu'il faut toujours s'empresser de nier ce qui a été posé à l'instant.
Pour ce qui est d'intégrer l'Autre tout en restant le même, je me pose la question de cette réelle séparation, distance entre cet autre et Dieu.
Notre condition, nos œillères, nos représentations, nous font penser que l'autre n'est que autre.
Mais je pense qu'il y a une unité bien plus profonde en Dieu, l'alpha et l'oméga de toute chose, qu'une simple entente d'individualités, même forte.
Pour autant, il me semble être en accord avec le reste.
Vous m'éclairez sur le pourquoi les Pères grecs comme Origène par exemple avaient cette conception du temps cyclique.Riou a écrit :Mais il me semble que la Vie (Zoé) permet de penser la contradiction de manière féconde. Il s'agit de la Vie vivante qui caractérise, dans la Bible, la vie même de Dieu, et pas de la bios, la vie biologique et éthique de l'être humain.
Deux choses peuvent exprimer cette Vie qui dépasse cette tension contradictoire entre le Même et l'Autre, le Mouvement et le Repos :
- La Trinité, qui intègre la Vie de Dieu dans la circulation d'amour au cœur des trois Personnes.
- Le cercle : les grecs, pour se figurer une éternité vivante qui ne soit pas la négation de la vie et du mouvement utilisaient la géométrie : un cercle en mouvement sur lui-même dépasserait la contradiction. Car bien qu'en mouvement et en changement, le cercle qui tourne sur lui-même demeure le Même que lui-même. La figure du cercle s'oppose à la ligne droite indéfinie, souvent utilisée pour figurer la ligne temporelle ou des idéologies comme le progrès (quand la ligne monte vers le haut du plan), la décadence (quand elle va vers le bas), ou les allers et retours incessants (quand elle forme des montagnes).