Bonsoir Olivier,
Ce que dit GS sur la possibilité offerte à tous d'être associé au mystère pascal ne peut, dans le contexte, qu'être compris comme une possibilité effective et non uniquement une puissance passive. Cela ne me semble contrarier aucun enseignement infaillible ou authentique. Sans doute cela va-t-il au-delà de certaines écoles théologiques, mais ce n'est pas contraire à Tradition.
D’abord l’affirmation conciliaire d’une possibilité offerte à tous d’être associés au mystère pascal ne relève pas d’un enseignement infaillible mais faillible, potentiellement erroné. Ensuite, quelques aient pu être les intentions des pères conciliaires sur ce point - il faudrait aller les vérifier dans les Actes du Concile, le magistère ne peut présumer des libres-choix divins. De sorte qu’à supposer votre lecture conforme aux intentions des pères conciliaires, n’en demeurera pas moins qu’elle ne préserve pas assez la liberté de Dieu, si fortement surlignée par saint Augustin (cf. supra).
Si l'Eglise, bien que de manière non magistérielle, a pendant longtemps proposé la doctrine des Limbes, la position actuelle ne peut être regardée comme définitive, mais uniquement comme un pis-aller destiné à "boucher le trou" laissé vide par le rejet implicite de la doctrine des Limbes.
D’abord, si la grâce est un don gratuit (ce qui est un dogme de foi), où est la nécessité à ce que Dieu justifie extra-sacramentellement tous les enfants morts sans baptême ? Et s’il n’y est pas nécessité, d’où vient cette présomption à affirmer assuré qu’il les sauverait librement tous ? Mais si ce n’est pas assuré, c’est qu’il est à tout le moins possible que certains soient damnés.
Ensuite, il est de foi que la peine du seul péché originel est la peine de damn. Comment donc le seul péché originel pourrait valoir damnation, si nul n’est damné pour le seul péché originel = si la justification extra-sacramentelle est assurée pour tous les enfants morts sans baptême ? Conséquemment, quant à la possibilité de justification extra-sacramentelle des enfants morts sans baptême, et sans aucunement présumer des libres-choix divins, il semble qu’il faille seulement dire qu’il est possible que certains de ces enfants soient justifiés extra-sacramentellement, non qu’il serait possible qu’ils le soient tous, car comment pourraient-ils tous l’être, de sorte que nul ne soit damné pour le seul péché originel, s’il est de foi que la peine du seul péché originel est la seule peine de damn ?
Enfin Pastoralis actio 13 : « Ainsi, par sa doctrine et sa pratique, l'Église a montré qu'elle ne connaît pas d'autre moyen que le baptême pour assurer aux petits enfants l'entrée dans la béatitude éternelle; c'est pourquoi elle se garde de négliger la mission qu'elle a reçue du Seigneur de faire " renaître de l'eau et de l'Esprit " tous ceux qui peuvent être baptisés. Quant aux petits enfants décédés sans avoir reçu le baptême, l'Église ne peut que les confier à la miséricorde de Dieu, comme elle le fait dans le rite des funérailles qu'elle a créé pour eux. » Si la doctrine des Limbes était abandonnée, la CDF aurait dû dire, tout au contraire de ce qu’elle dit, qu’elle connaît que le salut des enfants mort sans baptême est assuré, de sorte qu’elle puisse négliger sa mission baptismale relativement à ces derniers.
Bref, la doctrine catholique est que les enfants morts sans baptême sont damnés, sauf à être justifiés extra-sacramentellement, sans qu’il paraisse possible qu’ils le soient tous (pour la raison ci-avant exposée). Les Limbes s’imposent donc relativement à ceux des enfants morts sans baptême et non-justifiés extra-sacramentellement.
- [+] Texte masqué
-
Quant à la CTI, qui n’est aucunement un organe du magistère, je suis assez enclin à la considérer comme une sentine d’impiété doctrinale.
La même observation vaut sur les infidèles négatifs adultes. Même de jure, il ne me semble pas possible de soutenir qu'il pourrait en exister un qui ne se serait jamais vu accorder de grâces prévenantes. Si Notre Seigneur a donné sa Vie pour tous, alors je ne vois pas comment certains pourraient être exclu du Salut si ce n'est par leur seule faute.
Trente, Décret sur la justification, chapitre 3 : « Mais, bien que lui soit " mort pour tous " (II Cor. V, 15), tous cependant ne reçoivent pas le bienfait de sa mort. mais ceux-là seulement auxquels le mérite de sa Passion est communiqué. »
De sorte que savoir si la non-application a pour principe un refus divin d’octroyer la moindre grâce ou de n’octroyer qu’une grâce sue ou faite inefficace n’a que peu d’importance relativement à ce qui nous occupe ici : la pleine compatibilité du refus au fait que la mort du Christ a de soi, de sa nature même, une valeur salvifique universelle, ce indépendamment de l’application du mérite de la Passion à ceux là seuls qui seront sauvés.
Dans l’hypothèse - qui n’est pour moi qu’une hypothèse, qu’il me semble nécessaire de poser pour sauvegarder la souveraine liberté de Dieu - où Dieu n’offrirait aucune grâce actuelle de conversion à quelque infidèle négatif, il sera damné pour sa seule faute. Soit celle de ses nombreux péchés actuels (que l’infidélité négative ne soit que matérielle n’obstacle pas que de nombreux péchés formels et mortels puissent être commis par cet infidèle), soit même seulement celle du seul péché originel. « En effet, de même qu'en toute vérité les hommes ne naîtraient pas injustes s'ils ne naissaient de la descendance issue corporellement d'Adam, puisque, quand ils sont conçus, ils contractent une injustice personnelle par le fait qu'ils descendent corporellement de lui » (Trente, Décret sur la justification, chapitre 3).
Remarquez bien que si, sur le plan des principes, je suis hostile à toute assertion qui présumerait indûment de la liberté divine, je me garde bien de sombrer dans un crypto-prédestinatianisme. Les citations de saint Augustin précédemment données, qui ont l’admirable avantage de rappeler à tous la souveraine liberté de Dieu sur le créé, ne peuvent être le prétexte aux errements prédestinatiens (c’est à dire à cette fausse conception de la prédestination, commune aux augustiniens, aux dominicains, et aux congruistes, selon laquelle le décret de réprobation positive post prævisa demerita résulte inéluctablement d’un décret de réprobation négative pris ante prævisa). Les révélations privés du Sacré-Coeur nous incitent à l’optimisme, c’est à dire à la confiance, et c’est heureux. Comme par ailleurs je considère l’acte surnaturellement bon comme relevant conjointement d’une double causalité réciproque et simultanée, je suis plus qu’enclin à penser qu’en de nombreux cas la conversion des adultes reste possible jusqu’à l’article de la mort. Ce que je ne peux aucunement concéder, c’est qu’il en serait toujours ainsi, une telle assertion attentant à la souveraine liberté de Dieu. Pire encore dans la présomption des libres-choix divins, l’assertion que Dieu donnerait à tous les pêcheurs des grâces ut quod à l’article de la mort.
Par ailleurs, l'existence d'un châtiment temporel ne me pose aucune difficulté, et je ne méconnais pas combien il peut être terrible. Ce qui me semble plus difficile, c'est que ce châtiment soit, lors de son infliction, déterminé par Dieu comme étant définitif et qu'il se présente donc comme les prémisses du châtiment éternel sans aucune solution de continuité entre l'un et l'autre. La possibilité d'un tel châtiment définitif ne ressort pas des livres bibliques que vous visez.
Que les châtiments temporels décrits par Jérémie soient principalement les affres terribles de la guerre, du massacre, du viol, du saccage, de la désolation, de la famine qui frappèrent Jérusalem, ne peut faire oublier que Jérémie a aussi prophétisé Dieu endurcir les israélites. Or théologiquement, l’endurcissement stricto sensu est la privation définitive des grâces de conversion dès ici-bas. De sorte qu’à supposer, comme vous le pensez, que le sens littéral des citations relatives à l’endurcissement par Dieu ne viserait qu’un endurcissement provisoire, ce qui reste à démontrer, je vous répondrais qu’en passant du sens présumé littéral au sens plénier, on ne voit pas ce qui pourrait exclure ce que vous niez.
Il ne me semble pas qu'une grâce de conversion puisse être ab initio une grâce efficace, sauf à méconnaitre la liberté humaine. Il ne peut s'agit que d'une grâce suffisante suivi, s'il n'y est pas résisté, d'une grâce efficace.
Détrompez-vous. La doctrine dominicaine de la grâce efficace n’attente pas à la liberté de l’homme. Dans la perspective dominicaine, la grâce efficace est une motion physique exerçant infailliblement la volonté à s’exercer librement à l’acte bon auquel la grâce la meut. Et parce que cette motion exerçant infailliblement la volonté-libre à s’exercer, loin d’attenter à la liberté du vouloir, à la liberté de choix de la volonté, lui donne de s’exercer, la conclusion que cette motion physique est infaillible (puisqu’efficace de soi) mais non-nécessitante (puisque condition d’exercice de l’acte de volonté-libre, qui comme libre ne peut être nécessaire).
Et, dès lors qu'une grâce suffisante est offerte, le rejet de cette grâce relève bien du seul exercice de libre arbitre de la créature de telle sorte que la damnation s'ensuivant résulte bien exclusivement de la décision de celle-ci.
Le rejet d’une telle grâce relève du seul refus de la volonté créée, mais nonobstant ce rejet est préconnu de science moyenne (variante : de science d’anticipation relevant d’un ordre d’intentionnalité extra-divin), de sorte que vous devez appliquez à votre doctrine votre reproche (qui pour moi n’en est pas un) « que la damnation ne serait pas la conséquence exclusive du comportement de celui qui se damne, mais la conséquence conjointe dudit comportement et du délaissement consécutif privant l'homme de la possibilité, de jure réelle, de corriger son comportement ».
Votre notion de "refus d’une grâce faite efficace ou sue devoir être rendue efficace" me semble une contradiction dans les termes puisque le propre, si l'on peut dire, d'une grâce efficace est précisément d'être efficace et donc de ne pouvoir être refusée.
L’assertion visait à conjoindre en une formule brève les deux modes d’efficacité de la grâce. Le mode dominicain, où l’efficacité de la grâce résulte de ce que la grâce est efficace de soi ; le mode jésuite, où l’efficacité de la grâce résulte de la libre coopération de la volonté à une grâce suffisante, coopération par laquelle la grâce est rendue efficace (puisqúelle atteint l’effet pour lequel elle fut influée).
Perlum Pimpum a écrit : ↑lun. 04 sept. 2023, 23:31
Il suffit de montrer que le délaissement définitif jusqu’à la mort n’a rien d’impossible, pour ruiner votre thèse d’une grâce ut quod d’illumination finale accordée
à tous les pécheurs à l’article de leur mort : pour démontrer que vous présumez sans droit ni titre des libres choix divins.
Ce que, précisément, vous ne démontrez pas autrement que d'un point de vue théorique, sans pouvoir l'appuyer d'une illustration concrète issue du donné révélé.
Peu importe, puisqu’ayant montré que le délaissement définitif n’a rien d’impossible, est du fait même montré que sa négation relève de la pure pétition de principe relativement aux libres-décrets de Dieu.
Cordialement