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Re: Notre Dame de Paris est en feu

Publié : mar. 07 mai 2019, 14:17
par Carhaix
Bonjour Laurent Van, Houellebecq fait une analyse assez proche de la vôtre de l'architecture contemporaine, conçue pour être indéterminée, vide, et ne traduire que l'image de rayonnages et infinis, rythmés par des formes géométriques, des lignes droites, verticales, horizontales, faisant penser à des casiers transparents, le tout exerçant une sorte de stress aidant à stimuler la productivité, et une mentalité axée sur le chiffre, et l'absence d'âme.

On cite souvent la pyramide du Louvre comme un exemple réussi de transplantation du contemporain dans le patrimonial, qui, paraît-il, ne soulèverait plus aucune objection aujourd'hui. Mais quand on y réfléchit, si la pyramide est acceptée, c'est qu'elle est essentiellement pratique. Elle permet la circulation des masses de touristes, et leur acheminement vers un forum souterrain permettant de distribuer efficacement toutes les entrées du musée. C'est un coup de maître. Mais seulement sur le plan fonctionnel. Et si on y réfléchit bien, la forme pyramidale n'a aucune importance. Cette entrée aurait tout aussi pu être cubique ou sphérique, elle aurait été tout autant fonctionnelle. L'effet aurait été le même. Le fait qu'elle soit transparente lui permet de ne pas trop abîmer l'environnement. Et donc, on peut s'y habituer. Mais uniquement parce qu'elle est avant tout fonctionnelle, et pratique. En l'occurrence, orientée à accueillir massivement des touristes vers des espaces de commerce. J'ai remarqué, il y a peu, qu'à présent, il était impossible de rebrousser chemin, et que le visiteur est contraint de traverser le vaste centre commercial s'il veut sortir.

Or, il existe un projet semblable d'aménagement de l'île de la Cité, en particulier le parvis de Notre-Dame, qui devrait être recouvert d'un toit transparent, et abritant d'immenses espaces commerciaux. Le même modèle, donc. L'incendie de la cathédrale semble être une aubaine pour faire avancer ce projet.

En revanche, je ne suis pas d'accord avec la conclusion "doux-rêveur" du curé de campagne. On ne peut pas laisser le bâtiment en l'état, car il s'effondrerait forcément au bout d'un moment. La voûte ne peut pas se maintenir sans toit, ni les pignons. Et même, une fois les pignons et la voûte effondrés, les murs seraient une menace constante d'éboulement. Le site devrait forcément être interdit d'accès. C'est donc impensable. J'y vois un fantasme romantique pas très raisonnable. Sur le papier, si vous voulez. Dans la réalité, non.

Re: Notre Dame de Paris est en feu

Publié : mar. 07 mai 2019, 15:08
par zelie
Houellebecq fait une analyse assez proche de la vôtre de l'architecture contemporaine, conçue pour être indéterminée, vide, et ne traduire que l'image de rayonnages et infinis, rythmés par des formes géométriques, des lignes droites, verticales, horizontales, faisant penser à des casiers transparents, le tout exerçant une sorte de stress aidant à stimuler la productivité, et une mentalité axée sur le chiffre, et l'absence d'âme.
Mais tout à fait, et j'aime bien la façon dont LaurentVan l'a formulé, parce qu'à mon sens, il est encore plus sincère que Houllebecq en mettant Dieu au centre ou sur la marge selon le but pour lequel on construit. Et ça va même plus loin; on pourrait transférer ce positionnement, théocentré ou décentré, sur tous les aspects de nos vies; quand Dieu n'est plus au centre, petit à petit, on ne se mobilise plus que pour de plus en plus de tout, matière, productivité et richesse.
Or, il existe un projet semblable d'aménagement de l'île de la Cité, en particulier le parvis de Notre-Dame, qui devrait être recouvert d'un toit transparent, et abritant d'immenses espaces commerciaux. Le même modèle, donc. L'incendie de la cathédrale semble être une aubaine pour faire avancer ce projet.
Soyez sympa, dites-moi que non... :bomb:

Re: Notre Dame de Paris est en feu

Publié : mar. 07 mai 2019, 16:48
par Carhaix
zelie a écrit :
mar. 07 mai 2019, 15:08
Houellebecq fait une analyse assez proche de la vôtre de l'architecture contemporaine, conçue pour être indéterminée, vide, et ne traduire que l'image de rayonnages et infinis, rythmés par des formes géométriques, des lignes droites, verticales, horizontales, faisant penser à des casiers transparents, le tout exerçant une sorte de stress aidant à stimuler la productivité, et une mentalité axée sur le chiffre, et l'absence d'âme.
Mais tout à fait, et j'aime bien la façon dont LaurentVan l'a formulé, parce qu'à mon sens, il est encore plus sincère que Houllebecq en mettant Dieu au centre ou sur la marge selon le but pour lequel on construit. Et ça va même plus loin; on pourrait transférer ce positionnement, théocentré ou décentré, sur tous les aspects de nos vies; quand Dieu n'est plus au centre, petit à petit, on ne se mobilise plus que pour de plus en plus de tout, matière, productivité et richesse.
Or, il existe un projet semblable d'aménagement de l'île de la Cité, en particulier le parvis de Notre-Dame, qui devrait être recouvert d'un toit transparent, et abritant d'immenses espaces commerciaux. Le même modèle, donc. L'incendie de la cathédrale semble être une aubaine pour faire avancer ce projet.
Soyez sympa, dites-moi que non... :bomb:
Malheureusement si. C'est le projet Perrault, répondant à la Mission d'étude Île de la Cité. Il y a même eu une exposition pour présenter ce projet au public récemment.

Quand je dis que cela semble être une aubaine, je reprends juste ce que j'ai lu par ailleurs. C'est un peu une spéculation : certains supposent que maintenant que Notre-Dame a brûlé, le projet de refonte du quartier trouve subitement une nouvelle dynamique.

Il serait étonnant que les deux projets ne fonctionnent pas ensemble. Voilà pourquoi je suis un peu pessimiste, car avec cette manie des toits en verre, qui font rêver Bassmeg, si ça se trouve, on va vraiment avoir droit à ça :(

À tous les coups, on va avoir droit à un jardin suspendu, avec un chêne au milieu, à la place de la flèche, sortant par un toit-véranda en verre, pour faire genre : on a replanté la "forêt". Avec toute la symbolique qui va avec (l'arbre de vie, l'arbre de la Croix, etc.)

Re: Notre Dame de Paris est en feu

Publié : mar. 07 mai 2019, 17:49
par zelie
Et la sainte Croix au bout de la flèche, le coq contenant les reliques? Un toit de verre sans croix?
Les maisons de Dieu où on oublie Dieu, ont un mauvais pronostic de survie...

Re: Notre Dame de Paris est en feu

Publié : mer. 08 mai 2019, 0:09
par Nanimo
Je dis tout de suite que je suis pour la reconstruction de la flèche de N-D. Toutefois, il est intéressant de prendre connaissance des avis contraires. Ici, c'est Jacques Attali qui s'exprime : Pas de flèche, s'il vous plaît. Site : http://www.attali.com/art-et-culture/pa ... ous-plait/

(Si nous avons des gens comme cela contre nous, ayayaille!) :boxe:

Re: Notre Dame de Paris est en feu

Publié : mer. 08 mai 2019, 9:27
par zelie
Jacques Attali est un Juif d'Algérie, né en Algérie, qui a les idées suivantes (de Wik...........) :
Défenseur de la constitution et de l'établissement d'un État de droit mondial, condition pour lui de la démocratie et de l'homme, il pense en postulat que l'économie régulée par une institution de surveillance financière mondiale peut être une solution à la crise financière émergeant en 2008. Cette institution financière serait une première étape vers l'instauration d'une gouvernance démocratique mondiale dont l'Union européenne peut devenir un laboratoire.
Comment dire... L'état français, la France et son histoire, la religion catholique... c'est pas son truc.

Re: Notre Dame de Paris est en feu

Publié : mer. 08 mai 2019, 23:33
par SAINT ANGE GARDIEN
Les nouvelles sont bonnes. Il semblerait que plus de 100 personnes travaillent tous les jours à l'intérieur de la cathédrale pour la remettre en état. Je vous l'ai dit qu'ils allaient faire de vrais miracles.

Re: Notre Dame de Paris est en feu

Publié : jeu. 09 mai 2019, 11:15
par Kerniou
Un toit en verre, opaque, pourquoi pas ?
Pas une véranda, mais seulement une partie de la toiture ... sans serres, ni promenade, ni terrasse ...
la cathédrale en serait plus éclairée mais pas en plein soleil ...
... je sens que je vais faire exploser les négations et oppositions ...

Re: Notre Dame de Paris est en feu

Publié : jeu. 09 mai 2019, 15:15
par Cepora
Une belle homélie du père Henri Boulad : https://www.youtube.com/watch?v=y1FO7aAZVAs

Re: Notre Dame de Paris est en feu

Publié : ven. 10 mai 2019, 20:21
par SAINT ANGE GARDIEN
zelie a écrit :
mar. 07 mai 2019, 17:49
Et la sainte Croix au bout de la flèche, le coq contenant les reliques? Un toit de verre sans croix?
Les maisons de Dieu où on oublie Dieu, ont un mauvais pronostic de survie...
Zélie, on n'oubliera jamais Dieu dans cette affaire. Si Macron a décidé de reconstruire en 5 ans à l'identique, c'est que cela est possible. Certes, nos ancêtres ont parfois mis plus de 100 ans, mais leur cas était différent. Il a fallu réfléchir, tailler, mesurer, adapter Pierre après Pierre, ramener et assembler les matériaux dans les conditions les plus difficiles . je ne dis pas que cela est facile aujourd'hui, mais il suffit de copier ce qui fonctionnait à merveille auparavant et de reproduire avec des outils, moyens de transport, etc... actuels. Et puis, l'argent est un facteur important. Il est possible d'aller de l'avant. Sans argent, rien n'est possible.

Re: Notre Dame de Paris est en feu

Publié : ven. 10 mai 2019, 23:10
par Nanimo
Carhaix a écrit :
mar. 07 mai 2019, 14:17
Bonjour Laurent Van, Houellebecq fait une analyse assez proche de la vôtre de l'architecture contemporaine, conçue pour être indéterminée, vide, et ne traduire que l'image de rayonnages et infinis, rythmés par des formes géométriques, des lignes droites, verticales, horizontales, faisant penser à des casiers transparents, le tout exerçant une sorte de stress aidant à stimuler la productivité, et une mentalité axée sur le chiffre, et l'absence d'âme.
... et Victor Hugo, dans Notre-Dame de Paris part dans une réflexion qui n'est pas loin de la vôtre. Il pousse la réflexion jusqu'à donner la cause, l'origine, de la dégénérescence de l'architecture.
(…) Si l'on résume ce que nous avons indiqué jusqu'ici sommairement en négligeant mille objections de détail, on est amené à ceci : que l'architecture a été jusqu'au quinzième siècle le registre principal de l'humanité, que dans cet intervalle il n'est pas apparu dans le monde une pensée un peu compliquée qui ne se soit faite édifice, que toute idée populaire comme toute loi religieuse a eu ses monuments ; que le genre humain enfin n'a rien pensé d'important qu'il ne l'ait écrit en pierre. Et pourquoi? C'est que toute pensée, soit religieuse, soit philosophique, est intéressée à se perpétuer, c'est que l'idée qui a remué une génération veut en remuer d'autres, et laisser trace. Or quelle immortalité précaire que celle du manuscrit! Qu'un édifice est un livre bien autrement solide, durable, et résistant! Pour détruire la parole écrite il suffit d'une torche et d'un turc. Pour démolir la parole construite, il faut une révolution sociale, une révolution terrestre. (...)

Au XVe s. tout change.

La pensée humaine découvre un moyen de se perpétuer non seulement plus durable et plus résistant que l'architecture, mais encore plus simple et plus facile. L'architecture est détrônée. Aux lettres de pierre d'Orphée vont succéder les lettres de plomb de Guttenberg. Le livre va tuer l'édifice. L'invention de l'imprimerie est le plus grand événement de l'histoire. C'est la révolution mère. (...) c'est la pensée humaine qui dépouille une forme et en revêt une autre.(...) Sous la forme imprimerie, la pensée est plus impérissable que jamais (...)

Aussi voyez comme à partir de la découverte de l'imprimerie l'architecture se dessèche peu à peu, s'atrophie et se dénude. Comme on sent que l'eau baisse, que la sève s'en va, que la pensée des temps et des peuples se retire d'elle! Le refroidissement est à peu près insensible au XVe s., la presse est trop débile encore, et soutire tout au plus à la puissante architecture, une surabondance de vie. Mais, dès de XVIe s., la maladie de l'architecture est visible; elle n'exprime déjà plus essentiellement la société; elle se fait misérablement ; (...)
Victor Hugo poursuit sur la dégénérescence de l'architecture avec des mots comme "roide, glaciale, ennuyeuse", disant que le mal "croît en progression géométrique"... Au fond, la perte qu'il décrit explique aussi en partie ce que nous avons ressenti le 15 avril dernier en voyant brûler N.-D.

Et donc, lorsque l'on parle "d'imagination" pour rebâtir Notre-Dame (Macron), il y a de quoi se poser des questions. Comprend-on réellement ce qu'elle représente?

Re: Incendie à Notre-Dame de Paris

Publié : sam. 11 mai 2019, 16:15
par Kerniou
Pourquoi vouloir faire comme si Notre-Dame n'avait pas été détruite ? On ne peut nier la réalité. Quand quelqu'un meurt, Il meurt. Pour accéder à une autre vie. Pourquoi n'en serait-il pas de même pour Notre-dame ? La "reconstruction partielle" de Notre-Dame va obliger ceux qui en sont chargés à se poser des questions. Même s'ils n'apportent pas les réponses que nous pourrions attendre. Pourquoi se désespérer dès maintenant, avant que quoique ce soit ne soit ébauché ?

Re: Incendie à Notre-Dame de Paris

Publié : dim. 12 mai 2019, 8:01
par X Y Z
Dans une interview de Patrick Chauvet par Léa Salamé sur YouTube, j'ai cru comprendre que d'ici un an il serait à nouveau possible d'utiliser l'intérieur de la cathédrale, puisque sécurisée. Le cardinal Aupetit pourra a nouveau officier là-bas. D'ailleurs, ou officie-t-il actuellement ?

Re: Incendie à Notre-Dame de Paris

Publié : dim. 12 mai 2019, 9:49
par Kerniou
Vous me faites un procès d'intention, Carhaix ...
Qui vous dit que je me moque des Bâtiments Anciens, du patrimoine religieux ou non et de Notre -Dame, en particulier ?
Il y a des siècles, nos ancêtres ont construit des cathédrales ... pour glorifier Dieu et s'y retrouver lors de la célébration de la messe comme je l'ai souvent fait, le dimanche soir, à Notre-dame, quand je vivais à Paris ..."
Ces bâtisseurs de cathédrales avaient utilisé les techniques de construction les plus "modernes", en vigueur à cette époque ...
Après, ce malheureux incendie, pourquoi ne pas tenir compte de l'évolution de la construction et décider, d'emblée, d'écarter les techniques et matériaux actuels ?
Pourquoi ne pas envisager cette reconstruction partielle en tenant compte de l'évolution de l'architecture et des nouvelles techniques?
J'ai connu la liturgie préconciliaire, avec les demoiselles "le long bec" de l'époque qui massacraient le chant grégorien ...
Alors, sans aucunement mépriser l'ancien, je prends du recul par rapport au culte du "c'était mieux avant"...

Re: Incendie à Notre-Dame de Paris

Publié : dim. 12 mai 2019, 10:43
par X Y Z
Kerniou a écrit :
dim. 12 mai 2019, 9:49
Vous me faites un procès d'intention, Carhaix. Qui vous dit que je me moque des Bâtiments Anciens, du patrimoine religieux ou non et de Notre -Dame, en particulier ? (…) Pourquoi ne pas envisager cette reconstruction partielle en tenant compte de l'évolution de l'architecture et des nouvelles techniques?
J'ai connu la liturgie préconciliaire, avec les demoiselles "le long bec" de l'époque qui massacraient le chant grégorien. Alors, sans aucunement mépriser l'ancien, je prends du recul par rapport au culte du "c'était mieux avant".
Pour le chant, je confirme que c'était mieux avant. Pour les matériaux, je suppose que du chêne il y a 850 ans est toujours du chêne de nos jours et que la pierre naturelle extraite de nos carrières est toujours de la pierre . Par contre, il est possible d'acheminer des tonnes de bois ou de pierres taillées par camion, train, en quelques jours là où il fallait des mois par chevaux il y a 850 ans, etc.. Nous disposons de nos jours d'engins de chantier, de levage, etc. hyper sophistiqués qui facilitent grandement la tâche des acteurs.