Encore un prêtre assassiné

« Voici maintenant que ce monde est jugé ! » (Jn 12.31)
Règles du forum
Forum de discussions entre personnes de bonne volonté autour des questions d'actualité.
Cinci
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 11765
Inscription : lun. 06 juil. 2009, 21:35
Conviction : catholique perplexe

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par Cinci » mar. 10 août 2021, 13:04

[...]

Quant au coupable originaire du Rwanda, il faut dire que des gens de notre Église catholique auront certainement tout fait pour que celui-ci reste en France et au contact des religieux. Puis je me questionnerais un peu au sujet de sa «maladie mentale». Depuis des années, j'aurai toujours entendu dire que les vrais malades psychiatriques ne commettent que très très rarement de véritables agressions violentes. Des gens peuvent être perturbés, psychologiquement instables, en très mauvaise capacité de se maîtriser eux-mêmes sous le coup d'émotions, sans pour autant être des fous, non pas comme des personnes ayant réellement perdu le contact avec la réalité. Un peu comme nos enragés de la route pouvant ponctuellement "péter des plombs".

Avatar de l’utilisateur
Fée Violine
Consul
Consul
Messages : 12400
Inscription : mer. 24 sept. 2008, 14:13
Conviction : Catholique ordinaire. Laïque dominicaine
Localisation : France
Contact :

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par Fée Violine » mar. 10 août 2021, 18:44

Il me semble qu'il y a eu deux erreurs :
*pourquoi ce gamin traumatisé par le génocide n'a-t-il pas été régularisé ? Ça n'aurait pas supprimé le traumatisme, mais il aurait pu plus tranquillement se poser et se reconstruire, peut-être.
*et pourquoi l'a-t-on laissé sortir de l'hôpital psychiatrique alors qu'après un premier passage à l'acte on pouvait logiquement en craindre un deuxième ? D'ailleurs lui-même, d'après ce que j'ai cru comprendre, avait demandé à être hospitalisé. Mais pour cette question, Kerniou avait écrit un message, en se trompant de débat et ce message a malheureusement été victime d'une fausse manoeuvre de la modération : elle disait que les hospitalisations en HP, ainsi que les emprisonnements, coûtent très cher... C'est quand même déplorable qu'un souci d'économie ait entraîné la mort d'un homme...

Avatar de l’utilisateur
Roronoa Zoro
Ædilis
Ædilis
Messages : 21
Inscription : jeu. 08 oct. 2020, 17:33

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par Roronoa Zoro » mer. 11 août 2021, 12:33

Fée Violine a écrit :
mar. 10 août 2021, 18:44
Il me semble qu'il y a eu deux erreurs :
*pourquoi ce gamin traumatisé par le génocide n'a-t-il pas été régularisé ? Ça n'aurait pas supprimé le traumatisme, mais il aurait pu plus tranquillement se poser et se reconstruire, peut-être.
*et pourquoi l'a-t-on laissé sortir de l'hôpital psychiatrique alors qu'après un premier passage à l'acte on pouvait logiquement en craindre un deuxième ? D'ailleurs lui-même, d'après ce que j'ai cru comprendre, avait demandé à être hospitalisé. Mais pour cette question, Kerniou avait écrit un message, en se trompant de débat et ce message a malheureusement été victime d'une fausse manoeuvre de la modération : elle disait que les hospitalisations en HP, ainsi que les emprisonnements, coûtent très cher... C'est quand même déplorable qu'un souci d'économie ait entraîné la mort d'un homme...
Il y a énormément d'incompétence dans la psychiatrie je sais de quoi je parle. Et je suis pas le seul à le dire, même des médecins que je connais sont les premiers à cracher dessus.
"Si je meurs aujourd'hui, c'est que je n'aurais pas pu aller au-delà."

Avatar de l’utilisateur
Foxy
Prætor
Prætor
Messages : 2177
Inscription : ven. 01 nov. 2013, 1:14
Conviction : catholique
Localisation : Bretagne

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par Foxy » mer. 11 août 2021, 15:04

Veillée de prière et obsèques

du Père Olivier Maire en direct sur KTO

Le diocèse de Luçon propose une veillée de prière pour le père Olivier Maire ce mercredi 11 août à 20h30 en la cathédrale de Luçon. La veillée, présidée par Mgr François Jacolin, sera marquée par la méditation de textes de st Louis-Marie Grignion de Montfort, le fondateur des Missionnaires Montfortains dont le père Olivier Maire était le provincial.

La messe d’obsèques du père Olivier Maire sera célébrée ce vendredi 13 août à 14h30 en la basilique de Saint-Laurent-sur-Sèvre. Les funérailles seront célébrées en privé, avec la famille, des membres de la congrégation religieuse et des officiels. La basilique se situe à proximité de la communauté des Missionnaires Montfortains où le père Olivier Maire a été tué par un migrant qu’il accueillait. Il est un « martyr de la charité », a exprimé Mgr Jacolin, évêque de Luçon.


🔴 Pour permette une large communion de prière, KTO retransmet en direct sur son antenne, ktotv.com et ses plateformes digitales :

- Mercredi 11 août à 20h30 : veillée de prière

- Vendredi 13 août à 14h30 : messe d’obsèques du père Olivier Maire
La foi que j’aime le mieux,dit Dieu,c’est l’Espérance.
Charles Péguy

Avatar de l’utilisateur
Jean-Mic
Pater civitatis
Pater civitatis
Messages : 4092
Inscription : mar. 07 févr. 2012, 20:17
Localisation : Nevers

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par Jean-Mic » mer. 11 août 2021, 15:10

Bel article du journaliste Philippe de Saint-Germain :
L’HONNEUR DE LA CHARITÉ
Père Olivier Maire, SMM, martyr de la charité (+ 9 août 2021). C’est l’honneur de la charité, c’est l’honneur de l’Église d’accueillir sans compter les pécheurs, les miséreux, mais aussi les cinglés et les criminels. Cette hospitalité sans limite supporte tout et endure tout car elle espère tout (1Co, 8 ). Sans ce sanctuaire de la charité, qui peut paraître insensé, c’est le monde qui deviendrait fou. Car ce serait une erreur de croire que cet amour sans limite constitue une politique. La logique de la charité n’est pas de ce monde, elle ne compte pas mais elle n’est ni aveugle, ni naïve car « elle ne se réjouit pas de ce qui est injuste, et trouve sa joie dans ce qui est vrai » (1Co, 6). La politique de l’Église est de se battre pour la sanctuarisation de la charité, pas pour transformer la justice de ce monde en charité. Mais c’est en respectant la charité sans limite qui espère tout que la justice des hommes peut trouver son sens, sa mesure et sa rigueur, en acceptant ses limites à elle qui sont celles du bien commun de l’homme dans sa dignité et de tous les hommes dans les exigences de la vie commune. Faute de quoi, cette justice cogne à tort et à travers ou lâche tout sans discernement. Il est vrai que cet ordre codépendant de la justice et de la charité est incompréhensible dans une société sans Dieu qui ne croit que dans ses propres forces. Il faut de tragiques faits divers comme l’assassinat du père Olivier pour saisir que la logique ultime de la charité n’est pas de ce monde. Ce martyre peut avoir les apparences de l’imprudence, mais cette imprudence consentie dit autre chose : la justice ou l’injustice des hommes passe, la charité ne passe pas. C’est en reconnaissant cet ordre de la charité qui ne passe pas que les hommes seront moins barbares et que la justice sera plus juste.
Heureux ceux qui savent rire d'eux-mêmes. Ils n'ont pas fini de s'amuser !

Cinci
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 11765
Inscription : lun. 06 juil. 2009, 21:35
Conviction : catholique perplexe

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par Cinci » mer. 11 août 2021, 16:56

Oui, et c'est ce que voulait dire aussi Oscar Wilde dans son temps, faisant remarquer que l'Église catholique était pour les saints et les grands pécheurs, par opposition à une Église anglicane réservée aux gens «respectables». Les saints ne sont pas respectables, ni logiques ni conformes aux «valeurs du monde». Pas nécessairement, pas toujours.

Tout cela peut être vrai touchant des personnes dans l'Église, comme ceux qui auraient la folie de persister à vouloir prendre un risque de leur côté, pour accueillir ...



Mais, en même temps. la folie reste comme une folie, une exception. et le «déraisonnable» ne peut pas devenir comme la règle sur laquelle toute la société devrait s'ajuster. La folie même qualifiée de folie «évangélique» reste comme un signe qu'il existe un autre ordre des choses qui dépasse l'ordre naturel. Cet ordre supérieur ne vise pas à faire disparaître l'ordre naturel inférieur, l'ordre naturel en soi.

Dans la «verte» critique qui est adressée souvent de nos jours à des religieux catholiques, assimilés peu ou prou à des compagnons de route du gauchisme institutionnel (sympatisants de BLM, LGBTQ, etc.), par des «identitaires» ou des catholiques conservateurs de droite, il y a le fait qu'on accuse non pas la «sainte folie évangélisatrice» comme le fait de vouloir forcer politiquement toute une société civile, pour que cette dernière fasse de l'imprudence sa règle de conduite prioritaire, risquant également d'en entraîner beaucoup dans le désastre, la ruine, le malheur; des concitoyens qui n'auront rien demandé, eux, ni ne se seront portés volontaires pour être des sacrifiés.

Il s'agit juste de reconnaître ici que l'ambiguïté existe, de même que l'abus parfois.

Et un peu comme le disait Chesterton avec ses vertus chrétiennes devenues folles. Une vertu comme hypertrophiée, déséquilibrée du fait d'avoir perdu de vue un tableau d'ensemble plus large, une vertu détachée de la vraie doctrine complète de l'Église. Un risque existe de part et d'autre, de même que la critique restera possible aussi.

Tout reste une affaire d'équilibre.

Autre exemple : le père Kolbe à Auschwitz et sa folie sacrificielle parfaitement chrétienne du reste. Il n'aurait pas pu faire de cette folie une règle d'obligation sous peine de péché pour tous les autres ou le pays tout entier ! Sans avoir obtenu préalablement la vraie grâce du martyre, il rimerait absolument à rien de vouloir forcer tout le monde, bon gré mal gré, à «bien agir» en se sacrifiant soi-même comme le père Kolbe. Ce ne serait plus là telle qu'une vertu chrétienne devenue dingue. Il y aurait déjà dans cette obligation un parfum de totalitarisme en germe.

Avatar de l’utilisateur
Foxy
Prætor
Prætor
Messages : 2177
Inscription : ven. 01 nov. 2013, 1:14
Conviction : catholique
Localisation : Bretagne

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par Foxy » mer. 11 août 2021, 17:05

Les condoléances du Pape François après la mort du père Olivier Maire

https://youtu.be/qG50-twXCtY
Les paroles du pape: "Je suis heureux de saluer les personnes de langue française ! Avec beaucoup de douleur, j’ai appris le meurtre du Père Olivier Maire. J’adresse mes condoléances à la communauté religieuse des Montfortains à Saint-Laurent-sur-Sèvre, en Vendée, ainsi qu’à sa famille et à tous les catholiques de France. Je vous assure de ma compassion et de ma proximité spirituelle. A tous, ma bénédiction !"
La foi que j’aime le mieux,dit Dieu,c’est l’Espérance.
Charles Péguy

Avatar de l’utilisateur
PaxetBonum
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 9858
Inscription : lun. 21 juin 2010, 19:01

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par PaxetBonum » jeu. 12 août 2021, 19:03

Requiem æternam dona ei Domine !

Quant à ce pyromane- assassin faudra-t-il qu'il ajoute d'autres qualificatifs à son palmarès avant que l'on applique enfin l'une des multiples demandes d'expulsions que la justice française a déjà prononcé à son égard ?

Avatar de l’utilisateur
PaxetBonum
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 9858
Inscription : lun. 21 juin 2010, 19:01

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par PaxetBonum » jeu. 12 août 2021, 19:10

Fée Violine a écrit :
mar. 10 août 2021, 18:44
*pourquoi ce gamin traumatisé par le génocide n'a-t-il pas été régularisé ? Ça n'aurait pas supprimé le traumatisme, mais il aurait pu plus tranquillement se poser et se reconstruire, peut-être.
Bonjour Fée Violine,

Ce criminel n'est pas un survivant des massacres rwandais traumatisé à vie.
C'est sa famille qui massacrait les tutsi…
Il a été ensuite intégré aux forces de police et subitement est parti en France en annonçant à sa famille qu'il partait y faire une enquête.
Arrivé en France il a prétendu avoir fuit la police où il travaillait car on lui demandait de pratiquer des exécutions sommaires.
Les enquêtes menées prouveront que c'est un afabulateur et qu'il n'en était rien.

Bref on à affaire à un psychopathe dangereux qu'on garde après qu'il ait incendié l'église qu'il devait garder.
Maintenant il assassine sauvagement le prêtre qui l'accueille.
C'est qui traumatise la France et ses prêtres, il faut cesser d'en faire une victime.
Qu'il aille se recontruire dans les geôles rwandaises !

Avatar de l’utilisateur
Fée Violine
Consul
Consul
Messages : 12400
Inscription : mer. 24 sept. 2008, 14:13
Conviction : Catholique ordinaire. Laïque dominicaine
Localisation : France
Contact :

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par Fée Violine » ven. 13 août 2021, 10:24

Parce que vous trouvez qu'avoir des parents génocidaires, ce n'est pas traumatisant pour un gamin ?

Et pour vous, un psychopathe doit aller en prison ? Ce n'est pas un malade qu'il faut soigner ?

Altior
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 2856
Inscription : sam. 05 juil. 2008, 23:59
Conviction : catholique traditionaliste
Localisation : In Ecclesia Dei

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par Altior » ven. 13 août 2021, 10:54

Fée Violine a écrit :
ven. 13 août 2021, 10:24
Et pour vous, un psychopathe doit aller en prison ? Ce n'est pas un malade qu'il faut soigner ?
Vous avez raison. Ainsi, si ce psychopathe était responsable au moment où il a mis le feu à la cathédrale, tout comme au moment où il a matraqué le religieux qui l'hébergeait, alors il doit aller en prison et y bénéficier de traitement. Là, il y a infirmerie, médecin, psychologue. Si le cas dépasse les moyens du milieu carcéral, alors il doit être envoyé exécuter sa peine dans une institution spécialisée pour les emprisonnés psychopathes. Oui, oui, ça existe, en Sarthe.

Si, par contre, il s'avère qu'il était irresponsable lors de ses deux crimes (irresponsable ça veut dire qu'il n'avait pas la représentation de ce qu'il fait au moments des faits, car n'imaginez pas que tous les psychopathes soient irresponsables par principe), alors il doit être, compte tenu de sa dangerosité, interné en psychiatrie, recevoir un traitement d'appointe, puis vite expulsé, pour qu'il puisse bénéficier d'un traitement adapté dans son pays.

En tout cas, le fait qu'un clandestin incendiateur se balade dans la rue, en dépit de trois ordres d'expulsion depuis 2017 et d'une mise en examen depuis un an est inacceptable et montre un grave impuissance de l'État. État qui, pourtant, s'avère très puissant contre ses opposants.

Avatar de l’utilisateur
apatride
Quæstor
Quæstor
Messages : 376
Inscription : lun. 06 juin 2016, 1:24
Conviction : Catholique romain

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par apatride » ven. 13 août 2021, 12:38

Un témoignage d'une proche d'Emmanuel, le meurtrier du père Olivier Maire, qui apportera un peu de perspective sur cette tragique affaire : https://www.facebook.com/ccylou/posts/10159516250561667

Texte intégral pour ceux qui n'ont pas accès à Facebook :
[+] Texte masqué
Témoignage que je viens de rédiger. Je ne peux plus me taire. Cécile Murray, le mardi 10 août 2021.
Partagez si le cœur vous en dit.

Je suis choquée d’apprendre le meurtre d’un homme, qui était prêtre et qui tendait la main aux personnes dans le besoin. Je veux lui dire merci.

Je suis bouleversée pour cet homme qui a tendu la main à Emmanuel.

Et je suis bouleversée parce que Emmanuel, le suspect, était mon élève et mon ami depuis 2013.

Et pour cette raison, je ressens vraiment le besoin en lisant tout ce qu’il se dit sur les réseaux de donner mon témoignage, qui j’espère clarifiera et aidera à mieux comprendre cette tragique situation.

Peut être pourra il aider à ne pas juger trop vite.

Je ne crois pas, comme beaucoup le déclarent, qu’il s’agisse d’un incident terroriste ou radical.

Madame Le Pen, non, ne faites pas l’erreur de vous emparer trop vite de cette histoire tragique. Car cette histoire nous ramène bien avant l’incendie, bien avant ce meurtre terrible.

J’avais 24 ans lorsque j’ai connu Emmanuel. Aujourd’hui j’en ai 32. Emmanuel a mangé à notre table, nous avons été au musée ensemble, plusieurs fois je l’ai conduit ici ou là en voiture, seule, parce qu’Emmanuel était un homme bon et doux, profondément respectueux, avec lequel on se sentait en sécurité. Il a offert à la naissance de mon premier fils une peluche que nous avons toujours. Il a joué avec mes enfants.

Il a été hébergé par des membres de ma famille plusieurs mois, lorsqu’il n’avait nulle part où aller. Il était discret, gentil, était aimé de tous. Bref, vous l’avez compris, je connais bien cet homme.

Il avait la confiance de beaucoup de personnes, avant l’incendie à la cathedrale. Il était benevole, tous le décrivaient comme calme, paisible, plutôt timide et discret. Il bégayait un peu. De tous les réfugiés que je connais (et on emploie le terme “réfugié” à tort parce que justement, il ne l’était pas), il était que j’aurais placé en dernier sur la liste de ceux qui pourraient un jour faire du mal à autrui.

Je précise, avec regret mais je m’y sens forcée vu les commentaires lus aujourdui, qu’il n’était pas musulman. Il était chrétien, catholique.

Et il s’est beaucoup investi bénévolement au service de l’Eglise Catholique.

En 2013 j’ai lu en long et en large Les documents qu’il a reçus oú sa demande d’asile était refusée. Nous étions assis dans ma salle à manger, je lisais en silence le courrier de l’OFPRA (office français de protection des réfugiés et apatrides), essayant de rester calme. Emmanuel pleurait, impuissant. Dans ce dossier, il y avait la transcription de son interview à l’OFPRA, et donc de son histoire. J’ai tout lu en ravalant mes larmes et j’ai attendu qu’il reparte de chez moi pour m’effondrer. C’était la première fois que je lisais les détails de son histoire. Je me demandais comment il pouvait tenir si calmement, sans suivi psychiatrique après ces horreurs. Il me faudrait, si je traversais ça, un suivi psychiatrique de plusieurs années pour m’en remettre !

Non seulement il avait besoin d’un suivi psy, comme de nombreux demandeurs d’asile d’ailleurs, qui vivent hantés par leurs souvenirs et les traumas... mais en plus, puisque le refus de ‘OFPRA doit toujours être argumenté, on lui disait que son histoire n’était pas la vérité. On remettait en question la véracité des documents qu’il avait fournis, par exemple. Tant de personnes vivent ça. Ça serait tellement plus sain pour ceux qui racontent la vérité d’entendre qu’on ne peut pas accueillir davantage de personnes en France. S’entendre dire qu’on ment n’est pas facile pour tout le monde. J’ai vu ce jour là commencer pour cet homme qui avait déjà vécu la torture (au premier degré) une torture psychologique. L’angoisse, la peur, le sentiment d’injustice. Ce dossier est confidentiel et j’espère qu’un jour il sera relu, afin qu’on puisse réaliser non seulement l’horreur que cet homme a traversé, mais aussi la brutalité et l’indifférence avec laquelle on répond à une personne sur un sujet si délicat que l’histoire de sa vie, surtout parsemée de tels traumas.

Vous vous direz peut être : si ils ont jugé que son histoire n’est pas recevable, ils sont experts, nous devons faire confiance.

C’est là que les choses se compliquent : ces 9 dernières années au contact de demandeurs d’asile m’ont appris que, bien au delà de l’histoire de la personne, il y a des enjeux politiques et des accords entre les pays, voire même l’implication de notre pays dans certains conflits qui font que certains demandeurs d’asile ayant vraiment vécu atrocités et danger de mort ne sont pas reconnus réfugiés en France. Pour le Rwanda, la France considère que le genocide est terminé. Elle ne reconnaît pas les représailles qui ont pu avoir lieu après le genocide. Or un genocide et la haine ne se termine pas du jour au lendemain. Ça se saurait. Je me retiens de parler du Tchad et de la position de la France, et tellement d’autres exemples qui peuvent nous faire tellement honte, nous citoyens français.

Personnellement, je n’ai jamais réussi à m’imaginer dans la peau d’Emmanuel.

Il a fui la violence, pour finalement vivre un autre cauchemar de plusieurs années, sans toit, sans futur, sans être cru. Une fragilité psychologique s’est progressivement installée.. une impuissance terrible.

Il a essayé de croire, essayé de positiver. Plusieurs fois, nous avons prié. Il était croyant, catholique. Il essayait de placer sa confiance en Dieu. Il passait du temps d’ailleurs à l’église. Il a même été rencontré le Pape et était très fier d’une photo de lui qui lui serrait la main. L’Eglise, c’était sa bouffée d’oxygène.

Mais récépissés, OQTF se sont enchaînés. Les montagnes russes. Le désespoir revenait souvent. On ne peut pas ce que c’est. Pendant 8 ans, errer sans toit, dépendre de la bienveillance de certains qui t’accueillent. Tu ne peux pas travailler. Tu n’es pas réfugié. Tu ne peux pas retourner au pays, parce même si la France veut pas te croire pour ses raisons à elle qui dépasse de loin l’échelle des individus concernés, toi tu as connu la torture et l’horreur. Mais on te dit que tu mens. Malgré ce que le docteur qui a inspecté ton corps a écrit. Malgré les preuves que tu fournis. Aucune issue.

Il y a eu un tournant, dans la santé mentale d’Emmanuel. C’était en hiver 2019 (?) il me semble. Ça faisait déjà longtemps qu’on ne s’était pas revus. Emmanuel est venu chez nous, balafré à la joue, ses lunettes cassées, dans un état de panique, il était confus, il pleurait, il n’arrivait pas à s’exprimer. Le regard dans le vide, il répétait qu’il ne comprenait pas pourquoi il avait été attaqué. Quelques jours plus tôt, sur le parvis de la cathédrale, il avait été attaqué. Je lui ai mis de la crème sur la joue, je lui ai donné le tube. Je devais partir faire je ne sais quoi avec mes enfants, je n’ai pas pris le temps qu’il fallait. Je n’ai pas mesuré ce qu’il se passait. Je crois que ce jour la, il a vécu un trauma de plus, un trauma de trop. Peut être qu’à cette attaque, des traumas sont remontés...

Il y a quelques mois, je parlais avec un jeune qui était dans ma classe de francais, avec Emmanuel. B. avait 16 ans quand il est arrivé. Lui aussi avait eu un OQTF (obligation de quitter le territoire français ) et lui aussi je l’avais vu pleurer, dans notre salon. Sa maman lui manquait. Il n’était qu’un ado, après tout ! Il ne savait pas où il allait. Mais parce qu’il était mineur, il a bénéficié de la protection de l’enfance et après une année de galère et de détresse, il a reçu ses papiers. Aujourd’hui iil a fait des études, il travaille et il conduit. Alors que je lui donnais la terrible nouvelle de l’incendie de la cathedrale, voici ce qu’il a dit: « Si les problèmes avaient duré 8 ans pour moi, moi aussi je serais devenu fou, c’est invivable, intenable. Je suis désolé pour Emmanuel.»
...

Comprenons nous ?

Déjà l’année dernière à l’incendie de la cathédrale, de nombreuses personnes ont crié à l’attaque terroriste. Cette cathédrale, Emmanuel l’aimait beaucoup. C’était son lieu de travail et son lieu de recueillement. En quelque sorte, c’était chez lui. Il ne s’agit pas d’un homme qui est entré dans une cathédrale pour y mettre le feu! Il s’agit d’un homme qui n’en pouvait plus et qui a foutu le feu à l’endroit qu’il connaissait peut être le mieux. Nous qui connaissons Emmanuel savons que c’était bien plus profond. Il aimait vraiment servir à l’église, ça lui permettait de penser à autre chose. Il aimait vraiment l’église. Sauf que même l’Eglise n’avait pu l’aider à hauteur du besoin. Le soutenir comme il l’aurait fallu. Parce qu’un homme a qui on refuse de vivre comme un homme, à un moment, ne peut plus tenir. Malgré le vrai soutien qu’il a reçu de la part de plusieurs personnes et de l’Eglise.

Je voudrais dire à Madame Le pen que oui, oui, il fallait accueillir cet homme menacé de mort au Rwanda. Oui il fallait l’accueillir. Mais ce n’est pas ce que nous avons fait. Il n’a pas été accueilli par la France, on lui a refusé l’asile suite à une interview, on lui a dit qu’il mentait, et pour des raisons qui dépassent son histoire et qui concernent la France et ses accords politiques, et cela malgré son intégration, son bénévolat, ses grands efforts, sa claire envie de s’en sortir, toutes les attestations que nous autres avons fournies, sa motivation à travailler, on l’a laissé survivre seul, sans ressources, sans toit, sans futur et sans perspective d’avenir. On l’a laissé la nuit revivre l’horreur de son passé dans ses cauchemars et le jour, faire face au cauchemar que vit l’homme débouté du droit d’asile. L’homme qui ne peut vivre comme un homme. On la laissé dans une détresse psychologique telle qu’un homme pourtant si doux, et encore une fois je ne suis pas la seule à le dire, se retrouve aujourd’hui tellement perturbé psychologiquement qu’il a tué celui qui lui tendait la main. Sans parler de la prison depuis l’acte terrible d’incendier la Cathédrale. L’Unité psychiatrique de la prison. Il ne mangeait plus pendant un temps. Il ne parlait plus. L’avez vous visité? avez vous cherché ce qui a pu le pousser à déclencher un incendie dans la cathédrale?

On a fait vivre un cauchemar à ce pauvre homme, pendant de nombreuses annees. Aujourd’hui, je pense qu’Emmanuel souffre de troubles psychiatriques graves qui ont fait de lui, hier, lundi 9 août 2021, un criminel. Il a tué cet homme qui lui tendait la main. C’est un acte d’une gravité énorme, et un acte incompréhensible qui, pour moi et à la lumière de ce que je sais de cette histoire, ne s’explique que par le trouble psychiatrique. Un trouble psychiatrique qui doit être reconnu. Un trouble psychiatrique installé par des années d’angoisse, dû à l’indifférence et la survie que vivent les déboutés du droit d’asile.

Et ce sont des citoyens, des religieux, des missionnaires, qui dans l’ombre prennent soin de ces gens qui sont là sans être là. Peu d’associations le font puisqu’il n’y a pas de financement pour ce public la. Qui sont les fantômes de notre République des droits de l’homme. Qui bossent au black dans notre pays.

Aujourd’hui je peux dire que mon ami Emmanuel est devenu un meurtrier, lui qui avait fui son pays et tout risqué pour ne pas l’être. Il est devenu un meurtrier.

Mais jamais je n’oublierais qu’avant hier, lundi, il était d’abord une victime, une victime du Rwanda, et une victime d’une France qui ne lui a pas tendu la main alors qu’il avait besoin de secours, pendant de longues années.

Madame Le Pen se permet de s’emparer du sujet en le reliant à un acte terroriste, disant que cet homme n’aurait jamais dû venir en France. Elle se saisit d’une histoire qu’elle ne connaît pas comme d’un argument pour faire pencher la balance en sa faveur.

Cet homme comme tant d’autres est venu trouver refuge en France parce que nous sommes le pays des Droits de L’Homme. Mais nous ne lui avons pas donné refuge. Nous l’avons laissé dans la misère et sa souffrance a pris le dessus. Hier il a commis le pire.

Aucun de nous ne peut savoir s’il aurait supporté les souffrances d’Emmanuel. Celles du Rwanda, et celles de ces 9 dernières années en France. Moi, je ne pense pas que j’aurais pu les supporter. Déjà les lire dans un dossier c’était trop. Alors les vivre, non.

Au prêtre décédé hier, tué par l’ami qu’il hébergeait, avec l’espoir de le voir aller mieux : merci du fond de mon cœur ♥️ il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. Vous avez tendu la main que la France n’a pas tendu à cet homme.

A tous, que celui qui a déjà vécu une vie comme celle d’Emmanuel lui jette la première pierre.

Moi, fille de fils d’immigré d’Algerie, j’ai eu la chance d’apprendre à écrire. Aujourd’hui je tenais à ce que ma plume témoigne de l’histoire d’un exilé, qui n’a lui pas eu la même chance que ma famille en France. Un exilé qui a été ignoré lorsqu’il tenait bon, et qui aujourd’hui est connu parce qu’il est tombé.

Voila, merci de m’avoir lue.

Cécile Issaad Murray
cecile.asolidaire@gmail.com

Ma tante, Odile Brousse, qui a hébergé Emmanuel plusieurs mois, tient à dire qu’elle co-signe cette lettre.
Vous pouvez partager, et largement si le cœur vous en dit.
[Merci pour ce témoignage dont la Modération propose quelques extraits ci-dessous pour ceux qui ne liraient pas ce long récit]

Je suis bouleversée parce que Emmanuel, le suspect, était mon élève et mon ami depuis 2013.

J’avais 24 ans lorsque j’ai connu Emmanuel. Aujourd’hui j’en ai 32. Emmanuel a mangé à notre table, nous avons été au musée ensemble, plusieurs fois je l’ai conduit ici ou là en voiture, seule, parce qu’Emmanuel était un homme bon et doux, profondément respectueux, avec lequel on se sentait en sécurité. Il a offert à la naissance de mon premier fils une peluche que nous avons toujours. Il a joué avec mes enfants.

Il a été hébergé par des membres de ma famille plusieurs mois, lorsqu’il n’avait nulle part où aller. Il était discret, gentil, était aimé de tous.

Il était chrétien, catholique.

Et il s’est beaucoup investi bénévolement au service de l’Eglise Catholique.

En 2013 j’ai lu en long et en large les documents qu’il a reçus où sa demande d’asile était refusée.
J’ai tout lu en ravalant mes larmes et j’ai attendu qu’il reparte de chez moi pour m’effondrer. C’était la première fois que je lisais les détails de son histoire. Je me demandais comment il pouvait tenir si calmement, sans suivi psychiatrique après ces horreurs.

Plusieurs fois, nous avons prié. Il était croyant, catholique. Il essayait de placer sa confiance en Dieu. Il passait du temps d’ailleurs à l’église. Il a même été rencontrer le Pape et était très fier d’une photo de lui qui lui serrait la main. L’Eglise, c’était sa bouffée d’oxygène.

Il y a eu un tournant, dans la santé mentale d’Emmanuel. C’était en hiver 2019 (?) il me semble. Ça faisait déjà longtemps qu’on ne s’était pas revus. Emmanuel est venu chez nous, balafré à la joue, ses lunettes cassées, dans un état de panique, il était confus, il pleurait, il n’arrivait pas à s’exprimer. Le regard dans le vide, il répétait qu’il ne comprenait pas pourquoi il avait été attaqué. Quelques jours plus tôt, sur le parvis de la cathédrale, il avait été attaqué.

Déjà l’année dernière à l’incendie de la cathédrale, de nombreuses personnes ont crié à l’attaque terroriste. Cette cathédrale, Emmanuel l’aimait beaucoup. C’était son lieu de travail et son lieu de recueillement. En quelque sorte, c’était chez lui.

Cinci
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 11765
Inscription : lun. 06 juil. 2009, 21:35
Conviction : catholique perplexe

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par Cinci » ven. 13 août 2021, 14:34

Une déposition qui irait dans le sens que j'indiquais précédemment. On n'a pas affaire au cas d'une personne malade, connue pour avoir dû traîner un lourd passif médical en psychiatrie. Ce n'est pas tel un schizophrène qui aurait dû perdre réellement le contact avec la réalité. Il s'agirait bien d'une «fragilité» psychologique, un conflit psychique, une perte de maîtrise de soi consécutive à une frustration quelconque, un sentiment d'injustice, etc.

Vladimir
Ædilis
Ædilis
Messages : 26
Inscription : lun. 28 juin 2021, 21:38

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par Vladimir » ven. 13 août 2021, 19:19

Je vois plusieurs problèmes même si je précise que je trouve louable la volonté de ce prêtre et en général de l'Eglise, d'accorder son pardon et une seconde chance à ceux ne le méritant pas toujours (parfois à ses dépends).

1) Que cette personne (l'accusé) après 4 sommations à quitter le territoire (donc après examen complet de son cas) soit toujours sur le territoire (ce qui arrive souvent pour diverses raisons).

2) Que lorsque l'on est déjà dans l'illégalité, on puisse EN PLUS s'attaque de façon criminelle au patrimoine du pays susceptible de nous accueillir.

3) Que l'accusé ne soit toujours pas jugé plus d'un an après l'incendie, si vraiment son état psychiatrique est en cause, il aurait fallu l'interner (pour son bien) directement au lieu de le laisser dans une pareille difficulté, résultat un honnête prêtre est mort de par le laxisme judiciaire si caractéristique de la France.

4) Dans un message de deuil, que l'on puisse parler de récupération politique.. c'est d'une tristesse.. est-ce dont ce que la société est devenue ?

5) Parler d'acte anti-chrétien, si cette homme avait été recueilli par un imam ou un rabbin, cela se serait également arrivé.

Avatar de l’utilisateur
PaxetBonum
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 9858
Inscription : lun. 21 juin 2010, 19:01

Re: Encore un prêtre assassiné

Message non lu par PaxetBonum » ven. 13 août 2021, 23:08

apatride a écrit :
ven. 13 août 2021, 12:38
Un témoignage d'une proche d'Emmanuel, le meurtrier du père Olivier Maire, qui apportera un peu de perspective sur cette tragique affaire

Merci Apatride pour ce texte.
Il met clairement en valeur l'aveuglement des personnes qui accueillent ces migrants.
Il brûle la cathédrale c'est parce qu'il l'aimait beaucoup…
Il tue celui qui lui tend la main c'est à cause de toubles psychiatriques…
C'est le mal de notre époque de tout psychanalyser afin de trouver des excuses aux pires crimes.
Aujourd'hui Staline serait une victime qui a été traumatisé très jeune.
Kim Jong Un est certainement aussi une pauvre victime comme tout bon taliban d'Afghanistan ou du Mali…
Et pourtant combien de psychopathes sont sortis des camps de concentration vietmin ou des goulags ?

A lire ce texte cette dame explique fort bien pourquoi tout ceci c'est déroulé : ce criminel n'a pas été expulsé aussi rapidement qu'il ne l'aurait dû.

Désolé mes commentaires régulièrement censurés sont toujours en décalage car je suis un ignoble pécheur en pénitence

Répondre

Qui est en ligne ?

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 155 invités