Les partisans du Dividende Universel (DU) proposent une allocation inconditionnelle versée à tous les citoyens, de la naissance à la mort, dont le montant mensuel varierait (en fonction de l'âge) entre 300 et 600 €.
Le DU est une vieille théorie qui fut aussi appelée "Allocation Universelle", "Allocation d'Existence", "Revenu Inconditionnel", "Revenu de Base", "Revenu Minimum Garanti", "Revenu Citoyen"...
Différents arguments philosophiques ont étés avancées pour légitimer cette idée : héritage des générations passées pour Christine Boutin, respect de la dignité de la personne pour d'autres...
Les avantages annoncés de cette mesure seraient, en vrac : la simplification du système d'aides sociales, l'abolition de la misère, une baisse significative du coût du travail, le possibilité offerte à tous de travailler ou non...
La mesure est réputée ne pas s'inscrire dans le clivage classique droite/gauche, puisqu'elle est soutenue aussi bien par libéraux-chrétiens (Christine Boutin), des ultras-libéraux (Alain Madelin), des socialistes, la mouvance New-Age...
II. Une généralisation du RMI...
Mettons à part le prêchi-prêcha promotionnel du DU, il reste que l'ambition du DU est de garantir un revenu minimum à chaque citoyen, de la naissance à la mort. Il ne s'agit donc, ni plus ni moins, que d'une généralisation du Revenu Minimum d'Insertion (RMI) à tous les citoyens. Un Revenu Minimum Universel dont les justifications philosophiques s'effaceront rapidement, dans l'esprit des allocataires, au seul profit de la dimension financière de la mesure...
Une extension du RMI ne serait légitime qu'à la condition qu'elle touche les "oubliés" (ou considérés tels) du système actuel. Mais qui sont ces oubliés ? Ce ne sont ni les sans-abris, ni les mendiants, ni les personnes sur-endettées, ni les étrangers en situation irrégulière... qui peuvent déjà prétendre à un RMI (insaisissable par les établissements bancaires). Le RMI n'a pas éradiqué la misère, le DU ne le fera pas non plus. Les jeunes de moins de 25 ans et les femmes au foyer alors ? Peut-être. Mais il ne semble pas qu'une généralisation du RMI à toute la société soit la mesure la plus économique pour porter secours à des catégories ciblées de la population...
Le DU ne corrige donc aucune des imperfections du RMI. Tout au contraire même : en le généralisant, le DU en démultiplie les travers. L'application d'une telle mesure constituerait une véritable r-évolution culturelle aux répercussions sociales et économiques dramatiques...
III. Une mesure inéquitable
Tous les citoyens n'ont pas les mêmes besoins. Cette conception s'oppose à la justice distributive qui prend en compte la situation particulière et personnelle de chacun. Les handicapés n'ont, par exemple, pas les mêmes besoins que les personnes saines...
Tous les citoyens n'ont pas le même mérite. Or la Justice naturelle commande que le mérite soit récompensé. En effet, traiter de façon identique le citoyen et l'étranger ; l'étranger régulier et le clandestin ; la personne malade et le bien portant ; le riche et le pauvre ; le travailleur et le chômeur ; la victime et son bourreau ; le glandeur et le bosseur... constitue un déni de justice ostensible. La justice suppose un certain discernement qui s'oppose à une simplification excessive (ou simplisme). Gageons que les coûts induits par ce sain discernement sont rendus au centuple par la responsabilité personnelle et collective qui en découle.
IV. Une mesure contraire au droit naturel
D'inspiration totalitaire, cette mesure suppose que la société est redevable du pain de chacun des citoyens. En prenant à charge une part non négligeable des revenus de chaque citoyen, cette mesure place toutes les personnes particulières dans la dépendance totale à l'État.
En contraignant les citoyens à vivre du versement d'une aumône plutôt que de leur travail, le DU constitue une insulte pure et simple à la dignité humaine des citoyens, dont elle nie et détruit toute velléité d'autonomie matérielle tout en le privant de la fierté de subvenir lui-même à ses besoins.
En versant un salaire aux enfants et aux femmes au foyer, l'État outrepasse ses prérogatives et empiète largement sur celles de la famille ! En effet il revient, en vertu du droit naturel, respectivement aux parents et aux travailleurs de subvenir aux besoins de leurs enfants et de leur famille. Cette grave ingérence des pouvoirs publics constitue une atteinte à la responsabilité des familles… qui ne va pas renforcer mais, au contraire, risque de désagréger le lien social encore un peu plus .
V. Une négation du principe de responsabilité
L'application d'un tel dispositif constituerait une négation de la responsabilité humaine. C'est par son travail que l'homme mérite son salaire : "Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front." (Gn). Reconnaître la liberté de l'Homme, ce n'est pas le soustraire au travail mais lui laisser assumer pleinement les conséquences de ses choix.
L’évolution qui consiste à transformer les citoyens en ayants-droits me semble lourde de conséquences : elle accrédite l’idée que la Société est débitrice à l’égard des citoyens, sans aucune réciprocité… Encore une fois, le droit est proclamé et le devoir est nié.
VI. Une dévalorisation du travail
Le DU est une proposition empreinte de relativisme moral. Elle se propose de libérer l'homme de l'asservissement au travail. Mais, en versant un salaire à chacun, sans regard sur ses choix de vie, cette mesure signifie clairement que tous les modes de vie sont équi-valents. Travailler ou non serait donc indifférent ?
Verser un salaire de façon inconditionnelle, c’est nier le caractère incontournable du travail. Or le travail n’est pas une option de vie : il est une dimension incontournable de la vie : tout être humain apte à travailler a l’obligation morale de travailler ! Je rappelles le mot de l'Apôtre : "Celui qui ne veut pas travailler, qu'il ne mange pas non plus." (2 Th 3.10)
Les partisans du DU, font mine d'oublier que les richesses ne sont jamais produites que par le travail et par l'effort, et certainement pas par les loisirs... Cette mesure (qui constitue une véritable invitation au parasitisme social), hypothèque l'avenir en gaspillant les richesses accumulées par le travail de nos aïeux. Avec un programme du type "Tous à la plage !" et "Demain on rase gratis !", cette mesure et la société ludique qu'elle nous promet sont finalement hautement utopiques...
VII. Une mesure coûteuse
En contradiction avec le principe de parcimonie, l'argent de la politique sociale ne sera plus mis "là où il y en a besoin" mais réparti de façon abusivement égalitaire. Or (et contrairement à ce qu'insinue une telle mesure) tout le monde ne va pas mal, fort heureusement ! En versant des subventions à des personnes qui n'en ont pas le besoin, on augmente d'autant le coût de la politique sociale. La mise en place de ce dispositif provoquerait donc une aggravation sensible de la pression fiscale...
Si l'État et les organismes sociaux doivent contrôler, c'est afin que l'argent dépensé serve à ce à quoi il doit servir. Chaque centime donné à quelqu'un qui ne le mérite pas, c'est un centime dont est privé quelqu'un qui en a besoin et qui le mérite !
Ce minimum vital que d'aucun considèrent comme un dû, est financé par l'effort de quelques-uns. Le financement de cette mesure, au bénéfice des oisifs, se fera sur le dos des travailleurs...
VIII. Des pistes alternatives
Femmes au foyer. C'est aux personnes individuelles, et non à la société, que revient le droit et le devoir, le privilége et la responsabilité inaliénable de subvenir à leurs besoins propres et à ceux de leur famille.
La rétribution du travail au niveau du juste salaire couplé aux allocations familiales, doivent couvrir les besoins du travailleur et de sa famille et permet de répondre à cet impératif sans ingérence dans la sphère d'autonomie des familles. La création d'une allocation femme au foyer" dans le cadre des allocations familiales serait parfaitement envisageable et conforme à la Doctrine Sociale de l'Église.
Pour réduire le coût du travail, tout en maintenant constant le pouvoir d'achat des travailleurs (ou pour augmenter le pouvoir d'achat des travailleurs sans augmenter le coût du travail), nous pouvons augmenter les "crédits d'impôts". Cette mesure provisoire ne pouvant se justifier qu'en période de chômage structurel de masse.
Pour corriger les effets pervers du RMI actuel, et le détournement de fonds publics institué par le RMA "Fillon-Boutin", je propose l'application du "RMA Bayrou" (présenté ici)
IX. Conclusion
Le principe de subsidiarité, le caractère incontournable du travail, et la responsabilité civique ne sont-ils pas au centre de la Doctrine Sociale ? Le DU est une mesure immorale, contraire au droit naturel, et qui marquerait notre déclin. Un parti d'inspiration chrétienne ne peut pas rester cohérent et proposer une telle mesure.
La reconnaissance consiste d'abord à revaloriser le travail, à rétribuer l'effort des travailleurs et à leur verser un salaire qui leur permette de vivre dignement, eux et leur famille. Pour redonner leur dignité aux nécessiteux, commençons par reconnaître à chacun le droit de travailler et de subvenir ainsi aux besoins du foyer !
Christophe