Homélie de Grégoire Palamas († 1359)
Prenant avec lui uniquement
Pierre, Jacques et Jean, Jésus les emmena à l'écart, sur une haute montagne, et il fut transfiguré devant eux (
Mt 17,1-2), c'est-à-dire sous leurs yeux. "Que signifie : 'Il fut transfiguré'?", demande Chrysostome, le théologien. Cela veut dire qu'il laissa entrevoir, comme il le jugea bon, un peu de sa divinité, et qu'il montra à ses disciples Dieu habitant en lui.
Pendant qu'il priait, dit saint Luc,
son aspect changea (
Lc 9,29), tandis que saint Matthieu écrit :
Il devint brillant comme le soleil (
Mt 17,2).
Il dit
comme le soleil, non pour que nous concevions cette lumière comme une chose sensible, mais il veut nous faire comprendre ceci : ce que le soleil est pour ceux qui vivent selon les sens, et qui voient par les sens, le Christ l'est, dans sa nature divine, pour ceux qui vivent selon l'Esprit et voient dans l'Esprit. Dans la vision divine, ceux qui sont semblables à Dieu n'ont nul besoin d'une autre lumière que lui, car, pour ceux qui sont dans l'éternité, il n'est pas d'autre lumière que lui. Pourquoi, en effet, auraient-ils besoin d'une deuxième lumière, alors qu'ils ont la lumière primordiale ?
Or,
pendant qu'il priait, il resplendit ainsi et révéla, d'une manière indescriptible, en présence des prophètes les plus éminents, cette lumière mystérieuse aux disciples qu'il avait choisis. Il nous montre ainsi que cette vision bienheureuse est le fruit de la prière. Et il nous apprend que ceux qui sont proches de Dieu par la vertu et lui sont unis en esprit parviennent à la vision de cette splendeur. Celle-ci s'offre aux regards de tous ceux qui tendent sans cesse vers Dieu, par la pratique exacte des bonnes oeuvres et la prière sincère. Car, comme le dit saint Jean Chrysostome , "
seul celui dont l'esprit a été purifié peut contempler la beauté véritable et très désirable qui entoure la bienheureuse nature divine. " En contemplant ses rayons et ses beautés, il en reçoit une part, pour ainsi dire un rayon de lumière éclatante, qui fait briller son propre regard.
C'est pourquoi le visage de Moïse fut aussi glorifié pendant qu'il s'entretenait avec Dieu (cf.
Ex 34,29). Pensez-y : Moïse ne fut-il pas aussi transfiguré, une fois monté sur la montagne, et n'est-ce pas qu'il vit la gloire du Seigneur ? Mais il subit la transfiguration et n'en fut pas l'auteur.
Notre Seigneur Jésus Christ, lui, possédait cette splendeur par nature. Dès lors, il n'avait même pas besoin de prier pour faire resplendir son corps de lumière divine. Mais il a indiqué aux saints par quel moyen ils recevraient la splendeur de Dieu et comment ils en auraient la vision. Car dans le Royaume de leur Père les justes resplendiront comme le soleil (
Mt 13,43). Ainsi, devenus tout entiers lumière divine, et en tant qu'enfants de la lumière divine, ils verront le Christ éminemment rayonnant de lumière ineffable et divine. La gloire qui émane naturellement de sa divinité s'est manifestée sur le Thabor, également partagée par son corps, à cause de l'unité de sa personne. C'est donc aussi par une telle lumière que
son visage devint brillant comme le soleil (
Mt 17,2).