Cher Prodigal,
merci de livrer votre point de vue avec autant de sincérité. Pour autant, et ni voyez aucune acrimonie, je ne partage pas votre analyse comme je le suspectais. Mais il est plus intéressant de discuter avec quelqu'un d'avis contraire justement.
Témoigner de ce que l'on a reçu, et le transmettre, est un devoir si vous voulez, et en même temps une joie. Cependant il ne faut pas présumer de sa science. Expliquer la Parole Divine réclame des lumières dont tout le monde ne dispose pas. Or, expliquer mal, ou à l'envers, est pire que ne rien dire.
La parole divine comme vous dites est particulièrement limpide, et simple. Quels sont les deux principaux commandements demande Jésus? Et il ne s'agit pas de faire des cours d'exégèse, on n'a pas affaire à des étudiants de théologie dans une université de renom
. Et comme l'a fait très justement remarquer Booz quelques messages plus tôt, il s'agit dans un premier temps plus de faire réfléchir les gens sur leur propre position, et au travers de questions (sorte de maïeutique socratique si l'on veut) faire prendre conscience que leur position qu'ils pensaient solide est en réalité bien fragile voire s'appuyant sur des informations fausses (ex: la Bible est fausse à cause de l'évolution, la religion engendre la guerre, les catholiques n'ont commis que des atrocités dans le passé, la religion catholique est contre la sexualité, la religion c'est l'endoctrinement et le manque de liberté etc...)
Je reprends l'exemple de cette jeune femme musulmane qui s'était convertie. Son long chemin (gratifié à la fin par une présence de Jésus) a commencé sur une incompréhension (donc une démarche rationnelle) : l'islam dit que les chrétiens iront en enfer, mais pourquoi donc des saints comme Mère Térésa, que j'admire et qui ont fait le bien, iraient-ils en enfer? Quand elle a posé cette question autour d'elle dans son monde musulman, tous le monde lui a répondu "je ne sais pas, c'est comme cela". Ce qu'elle a jugé inaudible et incohérent. Et elle a commencé à regarder ailleurs, à trouver des réponses à cette question du salut. Si elle vous avait parlé de cela, n'auriez vous pas su à votre tour parler de la miséricorde de Jésus et de l'amour de Dieu? Parler de la parabole de la brebis perdue, du fils prodigue? Il suffit souvent d'un petit grain de sable pour bloquer une pensée trop automatique, et amener la personne à se mettre en recherche pour creuser davantage. L'Esprit Saint agit, mais à nous de semer les graines dans le vent.
Quant à ce que vous appelez des évangélisations de rue, en théorie on ne peut les condamner, car elles ne sont pas incompatibles avec la sainteté. Cela doit correspondre à un charisme particulier que l'on doit a priori respecter.
Mais dans les faits, je songe aux sectes qui se disent chrétiennes, car je n'ai jamais vu d'évangélisation de rue que faites par elles. Or, voir la Parole de Dieu vendue comme de la soupe par des personnes incapables de la comprendre et de la faire vivre est évidemment catastrophique. Troisième raison pour préférer, là encore, le silence.
Je vous assure qu'il y a eu (et a encore) de nombreuses initiatives, faites par des prêtres tout à fait catholiques romains, accompagnés de bénévoles laïcs. Un journaliste tenant un blog que je lis assez régulièrement racontait sa participation à l'une d'elle, et comment d'une discussion avec un musulman d'un certain âge, celui-ci avait fondu en larmes et demandé à faire partie d'un groupe de catéchumènes.
La tristesse n'est pas que des sectes fassent de l'évangélisation, mais qu'elles soient les seules à le faire. Il est là le problème.
D'autant que le silence st beau et mystérieux, et qu'il n'est pas incompatible avec une certaine forme de témoignage.
Certes non. Mais c'est quand même une drôle forme de logique de dire qu'une chose n'est pas forcément nécessaire ou simplement utile, sous prétexte qu'une autre qui n'est pas incompatible avec la première l'est?