Bonsoir chère Magdaléna ,Magdalena a écrit : ↑sam. 30 janv. 2021, 12:43Je ne cherche absolument pas un père pour mes enfants, j'ai fait le deuil d'avoir des enfants. Mais suite à, entre autres, des viols quand j'avais treize ans, j'ai beaucoup de mal à avoir des relations amicales sans passer par le sexe, j'ai l'impression que c'est ce que l'autre attend de moi et j'ai peur qu'en refusant il me traite d'allumeuse(alors que je ne fais rien pour) et m'abandonne. J'essaie de changer ça mais c'est difficile...
je vous recommande de lire "le consentement" de Vanessa Springora. Elle a rencontré à 13 ans l'écrivain pédophile Gabriel Matzneff et est demeurée sa proie pendant deux ans avant de le quitter. Elle s'aperçoit pendant de longues années ensuite qu'elle ne peut avoir de plaisir et l'explique : après voir été instrument de plaisir dans les mains d'un homme qui ne pensait qu' à lui et à ses fantasmes, elle n'avait plus accès à son propre désir et à son propre plaisir. Ayant désespérément besoin de l'attention masculine (son père avait été totalement absent), elle cédait aux hommes, confondant attention sur elle et désir sexuel masculin. Elle a guéri au bout d'un long cheminement thérapeutique, a rencontré son mari et a eu un enfant. Ce livre est probablement l'aboutissement de son chemin de guérison.
Les viols dont vous parlez ont laissé des séquelles encore actives et ont vraisemblablement défoncé votre pont - levis. J'ai été bien étonnée d'entendre l'un de mes thérapeutes (merveilleux) me dire lors d'une de nos premières séances "Bon ! Et bien nous allons rebâtir ton pont-levis". Je venais de lui raconter le viol que j'avais subi à l'âge de 5 ans dont je m'étais souvenue en analyse après 25 ans d'amnésie traumatique.
Viol qui avait eu pour conséquence un évitement presque complet de la relation amoureuse, une anesthésie de mon corps et du dégoût en cas de "tentative de rapprochement". Enfin, j'étais chargée d'une énergie défensive potentiellement très agressive à la fois auto-destructrice et destructrice de tout sentiment amoureux, et de certains liens naissants. Ah, c'est sur, je n'avais pas peur des hommes ni de leur dire non, j'avais une peur bleue de l'amour et de l'abandon. (abandon dans l'amour physique, pas l'abandon de quelq'un qui vous quitte).
Donc le pont-levis : il y a un beau château ou règne la maitresse des lieux, une princesse. Au coeur du château, le donjon. En haut du donjon, la chambre haute, la chambre secrète. Le château est fortifié de hauts remparts parfaitement protecteurs, lesquels sont entourés de douves profondes. Et à l'Est ou le soleil se lève, l'entrée du château avec sa lourde porte en bois bardée de fer et au dessus des douves, le pont-levis !
La maîtresse des lieux, du haut des remparts, regarde approcher les visiteurs. Si elle vit ainsi dans un château fortifié, c'est bien sur que tous les visiteurs ne sont pas recommandables ! Il y a des personnages lumineux et sombres, ceux qui apportent des vivres pour le château et ceux qui sont porteurs de la peste, des cavaliers noirs ténébreux et des cavaliers blancs porteurs de lumière et toutes sorte d'individus dont on ne sait pas trop qui ils sont ni ce qu'ils veulent...
La princesse du haut des remparts prend le temps d'observer ceux qui approchent, de discerner, de choisir qui peut rentrer, qui reste dehors. Elle ordonne quand lever le pont-levis, quand le laisser baissé. Une fois rentré, le visiteur n'est pas pour autant invité à rentrer au donjon, il doit montrer patte blanche ! Quand à la chambre haute, doux Jésus ! Les contes sont formels là-dessus : seuls les princes charmants y entrent.
Il arrive des tragédies. Il arrive que des cavaliers noirs attaquent le château et armés d'une arme bélier, détruisent le pont-levis et ravagent le château. Après leur départ, la princesse est perdue, meurtrie, désemparée. Le pont-levis étant cassé, rentre qui veut, sans y être invité. La princesse ne peut plus discerner à qui elle a affaire et toute sorte d'individus parfois peu recommandables s'imposent. La princesse ayant tellement besoin d'aide et d'attention, s'accroche au cou du premier qui lui prête attention sans savoir qui c'est...
Quand j'ai entendu cette histoire, j'ai dit que, ah mais non, moi pas du tout, moi j'ai un pont levis ! Surpuissant même !Ultra défensif !
Le thérapeute a ri et a insisté : "non, tu n 'as plus de pont-levis mais contrairement à celles qui sont sans défense, tu as posté des défenses en amont, tu as posté des guetteurs surarmés loin autour du château, qui envoient des jets de catapulte sur TOUS les visiteurs, sur les cavaliers noirs, ce qui te protège, mais aussi sur les cavaliers blancs, ce qui te prive d'eux et de leur présents. Pour que ces guetteurs acceptent de revenir au château, il faut rebâtir le pont-levis."
Alors, j'ai compris que celles qui ont été violées dans leur enfance se répartissent entre celles qui n'ont plus de défenses psychiques opérantes dans la relation amoureuse (ce qui semble être votre cas) et celles dont les défenses psychiques sont excessives et les prive d'une part de la vie (ce qui est mon cas).
J'ai rebâti ce fameux pont-levis avec ce jeune thérapeute, en prenant le temps d'accueillir et d'accepter la peur, de ne plus fuir. Et un jour, au moment ou je ne m y attendais pas, lors d'une belle rencontre, le dégoût et la peur se sont envolées, la confiance est venu et l'inconnu miraculeux est advenu : l'accès à mon propre désir et à mon propre plaisir. Je n'étais plus le jouet des cavaliers des Ténèbres, je devenais sujet.
J'ai enfin respiré. L'Amour devenait possible, je quittais la malédiction dont je me croyais prisonnière.
Je voulais vous confier cela chère Magdaléna. Voyez si cette image de pont-levis vous parle.
Je m'interroge sur cette formation pour devenir laique consacrée. Est ce un appel clair et évident de Dieu ou un refuge pour panser vos plaies que vous croyez à tort, inguérissables ?
Que le Seigneur vous bénisse et vous garde, dans la lumière de Marie,
Samaritaine